Intervention de Gilles Raguin

Mission d'information sur l'action extérieure de la France — Réunion du 10 juillet 2013 : 1ère réunion
Audition de M. Gilles Raguin directeur d'esther ensemble pour une solidarité thérapeutique hospitalière en réseau

Gilles Raguin, directeur d'ESTHER :

Merci de m'avoir invité. Je suis médecin spécialiste des maladies infectieuses et directeur du groupement d'intérêt public (GIP) ESTHER, organisme de coopération internationale dans le domaine de la santé. Créé en 2002 par Bernard Kouchner et placé sous la double tutelle du ministère des affaires étrangères et du ministère de la santé, cet organisme avait pour mission première de tisser des partenariats hospitaliers. Il finance désormais les besoins de ses partenaires, constituant ainsi le bras armé du Fonds mondial de lutte contre le sida, dont il accompagne les projets.

ESTHER est présent dans dix-sept pays, en particulier ceux à faibles ressources, en Afrique francophone, en Asie et en Haïti. Il dépense 16 millions d'euros par an, dont une moitié est apportée par la subvention qu'il reçoit de l'Etat français pour charge de service public, l'autre par des financements extérieurs.

Le GIP ESTHER est un acteur majeur de la recherche opérationnelle. Pour beaucoup, ce concept reste flou. Nous retenons la définition qu'en a donnée la conférence de Sydney de 2007, au cours de laquelle les grands bailleurs internationaux se sont engagés à lui consacrer 10 % de leur budget. A la différence de la recherche fondamentale, la recherche opérationnelle collecte des informations sur les programmes et opérations les plus efficaces, afin de flécher efficacement les crédits de l'aide internationale. Elle est ainsi au service des programmes nationaux de santé publique, ciblés ou transversaux.

Depuis 2007, les lignes budgétaires consacrées à la recherche opérationnelle ont été constamment sous-utilisées, puisque moins de 5 % des budgets fléchés vers ces programmes ont été véritablement utilisés sur le terrain. La déclaration de Sydney en avait pourtant fait un outil d'analyse essentiel pour les principaux bailleurs des pays destinataires des fonds, ainsi qu'un moyen privilégié de définition des bonnes pratiques nationales.

Donnons quelques illustrations des actions conduites par ESTHER sur le terrain. Au Vietnam, nous travaillons conjointement avec le centre hospitalo-universitaire de Bordeaux et l'université de Pennsylvanie sur la définition d'un modèle de prise en charge des toxicomanes. Nous développons un programme analogue au Sénégal, en partenariat avec l'Agence nationale de recherche sur le sida (ANRS) : sur la base d'un diagnostic de terrain rendu possible par les résultats de la recherche fondamentale en épidémiologie, le GIP ESTHER a bâti un dispositif opérationnel et contribué à la rédaction du premier programme sénégalais de lutte contre la toxicomanie.

En Côte d'Ivoire, après un premier programme pilote conduit dans la prison d'Abidjan, les financements du Fonds mondial de lutte contre le sida ont donné naissance à un dispositif de prévention de la tuberculose et du sida. Au Cameroun enfin, nous travaillons avec l'Institut de recherche pour le développement (IRD) à un important programme pilote de décentralisation de l'accès aux soins, financé par l'ANRS et le contrat de désendettement et de développement : après conception de différents modèles d'organisation, nous sélectionnerons le plus efficace.

Une bonne recherche opérationnelle fait donc intervenir des chercheurs en épidémiologie, ainsi que des experts en santé publique, afin d'aider les institutions du pays d'accueil à construire leur propre programme national. Nous ne sommes pas les seuls à travailler sur ces chantiers : les pays anglo-saxons sont également très présents et plus investis que les Français dans la recherche opérationnelle.

Les cliniciens et les professionnels de santé publique des pays en voie de développement sont de plus en plus demandeurs de ces opérations de terrain, dans un souci d'efficacité de l'action publique, mais aussi parce que les bailleurs de fonds internationaux accordent une importance croissante à l'évaluation des performances des programmes qu'ils financent. Les moins satisfaisants voient leurs perspectives de financements baisser dans le cadre des appels d'offres à venir.

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