La formule des auditions pour suite à donner à une enquête de la Cour des comptes, expérimentée depuis plusieurs années par votre commission, démontre aujourd'hui encore toute sa pertinence et son efficacité, en ce qu'elle a permis d'expliciter les positions des uns et des autres, de faire apparaître des points de convergence mais aussi des zones d'ombres et des points d'interrogation.
Nous aurions pu approfondir davantage certains aspects du sujet, mais nous étions tenus par le délai prévu par la LOLF. Nous nous sommes efforcés de réaliser le diagnostic le plus précis possible, dans sa réalité concrète. Il me semble déceler parmi nos intervenants une forme de consensus sur la nécessité de définir un horizon de moyen terme, car il y a des enjeux économiques et humains derrière toutes ces problématiques ! J'ai cru comprendre, à travers les propos de Mme Franceschini, que la réforme proposée par le Gouvernement s'inscrit dans cette perspective de moyen terme. De ce point de vue, je voudrais saluer la création de la commission de la distribution, car les enjeux sont particulièrement lourds en ce domaine (structures, chaîne de transport). Nous devons donc tracer un schéma d'action à moyen terme. Celui-ci doit à mon avis passer par la transparence, une contrepartie nécessaire en termes de résultat. C'est aussi le début de la pédagogie.
Deuxièmement, ce schéma implique une simplification du système des aides, notamment des aides à la distribution, les éditeurs ayant eux-mêmes du mal à appréhender les tenants et les aboutissants de l'aide au transport postal, comme l'a souligné M. Bouchez.
S'agissant du soutien ou non à la presse spécialisée (donc non IPG), les règles ont été fixées par la loi. Il appartient à la commission paritaire des publications et des agences de presse (CPPAP) de définir quelles publications relèvent de la catégorie IPG et peuvent donc prétendre aux aides directes.
En ce qui concerne le fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP), nous proposons que les aides soient fléchées principalement à destination des titres IPG, mais pas seulement. La presse non IPG pourrait donc en bénéficier aussi, notamment en cas de projets de mutualisation d'investissement dans les plateformes numériques.
Le troisième principe qui doit nous guider est, à mon sens, celui de la neutralité de l'Etat. De ce point de vue, il faut garder à l'esprit la problématique des conflits d'intérêts potentiels.
Le quatrième principe doit être celui de la prévisibilité et de la capacité d'anticipation des acteurs, dès lors que la trajectoire à moyen terme est fixée. Il reste un gros travail à faire sur le portage, à travers le développement d'opérateurs viables. Cela pose la question de la mutualisation et de ses conditions, et du dialogue entre la PQR et la PQN. L'enjeu est de favoriser la structuration d'acteurs pour réduire la charge budgétaire directe liée à l'aide au transport postal.
De surcroît, une réflexion m'apparaît également indispensable sur le modèle économique technologique et numérique. Si la presse quotidienne nationale a su relever le défi de l'accès aux nouveaux supports, il faut maintenant garantir la viabilité de ce nouveau modèle économique, ce qui passe par la collecte de recettes. De ce point de vue, il conviendrait de mener des réflexions approfondies en s'inspirant des plateformes de vidéo à la demande et des plateformes de vidéo à la demande par abonnement. Ces outils ont des impacts dans le domaine de la presse écrite (éditorialisation, moteurs de recherche, tarification intelligente susceptible d'attirer le lectorat jeune...). On pourrait s'inspirer à cet égard des modèles étrangers (le Guardian par exemple).
Au-delà, il faut bien sûr mettre l'accent sur les indicateurs, qui demeurent encore trop centrés sur les moyens et les résultats, et garder en tête la contrainte budgétaire forte, qui doit être intégrée dans le schéma à moyen terme.
Enfin, je tiens à souligner le rôle de l'Agence France Presse, essentiel dans ses trois compartiments stratégiques : bureaux à l'étranger, information de première main, là où il n'y a pas forcément de correspondant pour les grands titres de la presse nationale, mais aussi la vidéo et la photo, avec la problématique soulignée en début d'audition par Mme Laborde sur le statut des journalistes photographes.
S'agissant des niches fiscales, je note qu'il ne semble pas y avoir d'a priori négatif à la suppression de certaines d'entre elles...