Cependant, la commission ne s’est pas prononcée en faveur d’un tel dispositif ce matin.
La troisième divergence porte sur l’utilisation d’informations d’origine illicite. Les membres du Sénat se sont accordés sur la nécessité de permettre aux différents services d’utiliser des informations dont l’obtention n’est pas toujours légale dans la mesure où il s’agit d’une arme essentielle. Toutefois, et c’est en cela que notre position diverge de celle de l’Assemblée nationale, nous considérons que ces informations doivent avoir été transmises via l’autorité judiciaire ou, à tout le moins, obtenues dans le cadre d’une coopération internationale.
La quatrième divergence a trait à l’extension de la définition du délit de blanchiment. Là encore, il y a un consensus au Sénat, et nous divergeons de l’Assemblée nationale. Le principe de la présomption d’innocence, énoncé à l’article IX de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, doit être nécessairement respecté. Or le renversement de la charge de la preuve y porte atteinte. C’est la raison pour laquelle nous sommes défavorables à une telle extension.
Je dois le dire, l’Assemblée nationale a étudié nos propositions avec beaucoup d’attention et a fait évoluer sa définition, en déclarant que le renversement de la preuve de caractère était surtout interprétatif, c’est-à-dire beaucoup plus encadré qu’en première lecture. Je crois néanmoins que nous devons rester sur notre position et refuser cette perspective.
La cinquième divergence concerne la prescription pour fraude fiscale. L’Assemblée nationale nous propose de doubler le délai de prescription en le faisant passer, de trois ans à six ans. Nous y sommes défavorables, pas seulement en vertu de la culture que la commission des lois a acquise depuis des années et des années, mais aussi parce qu’un tel choix ne nous semble pas cohérent : le délai de prescription en matière de fraude fiscale serait porté à six ans et resterait de trois ans pour le blanchiment et les délits connexes. Là encore, nous choisissons de rester sur notre position face à nos collègues députés.
La sixième divergence concerne le rapport, demandé par l’Assemblée nationale, que doit remettre au Parlement le ministère du budget sur le traitement des informations données par la Chancellerie. Nous souhaitons, de manière symétrique, que l’administration fiscale nous rende également compte de toutes les dénonciations émises au titre de l’article 40 du code de procédure pénale par la Chancellerie. Que deviennent-elles par la suite au sein du ministère du budget ? Nous souhaiterions disposer aussi de telles informations.
La septième et dernière divergence vise l’étendue de la protection des lanceurs d’alerte. Nous restons prudents sur ce point. Nous comprenons ce que sont les lanceurs d’alerte et quelle est leur utilité, mais nous voyons aussi tous les dévoiements qui pourraient se produire. Selon la formulation de l’Assemblée nationale, le lanceur d’alerte est protégé non seulement s’il informe l’autorité judiciaire ou l’autorité administrative, ce que nous approuvons, mais aussi l’entreprise concurrente ou les médias en étant « de bonne foi » ; c’est heureux ! Mais l’on peut aussi dénoncer de bonne foi des faits qui ne reposent sur rien. Je pense que nous devons faire preuve de beaucoup plus de prudence. Cette dénonciation tous azimuts nous semble tout à fait inacceptable et dangereuse. Nous en resterons – en tout cas, c’est ce que le rapporteur vous propose – à la formulation retenue par le Sénat en première lecture.
Certes, nous débattrons des amendements. Mais, au-delà des considérations techniques, je crois qu’il faut toujours rappeler que nous sommes surtout là pour donner du sens. En l’espèce, il s’agit de donner du sens à un combat qui représente peut-être 80 milliards d’euros. C’est la raison pour laquelle nous devons donner à ceux qui le mènent les moyens de le remporter. §