Intervention de Jean-Marie Bockel

Réunion du 6 décembre 2005 à 9h45
Loi de finances pour 2006 — Sécurité

Photo de Jean-Marie BockelJean-Marie Bockel :

Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, il paraît que je suis un « sécuritaire de gauche » ! En réalité, comme beaucoup de maires, je veux simplement que ça fonctionne, et le plus rapidement possible.

Je suis partisan depuis longtemps, à la fois dans le discours et dans les actes, d'un nécessaire équilibre entre la prévention et la sécurité. Je suis d'ailleurs un défenseur convaincu du renforcement du rôle du maire dans les politiques d'animation des contrats locaux de sécurité. Nous avons d'ailleurs pu constater sur le terrain, ces derniers temps, et nombreux sont ceux qui l'ont souligné, combien ce rôle était important.

Par ailleurs, les liens noués sur le terrain entre les acteurs locaux, notamment les communes, et l'État ont certainement contribué à créer ce climat de confiance bien utile dans les périodes de crise.

S'agissant des contrats locaux de sécurité, nous avons encore des progrès à faire en matière de diagnostic partagé. Certains outils, que nous connaissons bien, ont déjà été évoqués. Il faudrait les utiliser davantage et faire en sorte que nous parlions tous de la même chose. De même, il serait utile de connaître le bilan au plan national de ces contrats.

Je fais aussi partie de ces maires qui, toutes sensibilités confondues, ont préféré innover sur le terrain en renforçant les moyens municipaux, et notamment humains, de police et de prévention, plutôt que pleurnicher.

Dans ma ville, par exemple, nous avons mis en place des coordinations territoriales autour des collèges, afin de traiter en temps réel tous les faits commis. De même, nous avons ouvert, il y a quelque temps, une Maison des parents, que je considère comme une bonne alternative à la mise sous tutelle ou à la suspension des allocations familiales, auxquelles je ne suis pas hostile sur le principe mais qui constituent, selon moi, une véritable « arme nucléaire ». Tout ce qui peut concrètement éviter d'en arriver là me paraît utile.

Dans le même esprit, j'ai mis en place sans état d'âme la vidéosurveillance dans les transports publics, dont j'ai pu constater l'efficacité, mais aussi dans l'espace public. Un centre de surveillance fonctionne ainsi vingt-quatre heures sur vingt-quatre à Mulhouse, pas uniquement comme instrument de prévention des graves problèmes de risques terroristes qui ont été évoqués, mais comme élément de dissuasion au quotidien. Il s'agit d'un levier parmi d'autres.

Par ailleurs, s'agissant du soutien aux victimes, les propos de Charles Gautier m'ont paru très pertinents.

Madame le ministre, monsieur le ministre délégué, nous souhaitons vous parler de notre expérience et de notre action concrète sur le terrain. À cet égard, j'évoquerai quelques-unes de nos priorités et de nos attentes fortes.

Tout d'abord, et c'est la première priorité, au vu des événements que nous venons de vivre, nous devons renforcer davantage et fortement la lutte, tous moyens confondus, contre l'économie parallèle, notamment le commerce de la drogue, ce qui passe aussi par le renforcement des GIR, qui ont fait la preuve de leur efficacité.

Cette économie parallèle constitue aujourd'hui, au-delà même de la dimension sociale, que nous n'avons pas le temps d'évoquer - on ne peut pas tout dire en quelques minutes -, un frein puissant à l'insertion par l'emploi et par l'économie, qui sont nos priorités sur le terrain, mais aussi à l'égalité des territoires.

Ensuite, et c'est la deuxième priorité, la loi relative à la prévention, sur laquelle on a beaucoup communiqué depuis deux ans et dont on parle à nouveau en ce moment, n'a pas fait l'objet d'une concertation suffisante. Or, sur le terrain, on l'attend, on y croit et on est prêt à jouer le jeu. Sa philosophie générale, sous bénéfice d'inventaire, nous intéresse à bien des égards. Mais ce texte ne pourra pas aboutir concrètement sans l'implication des maires.

Cette loi doit pouvoir s'appliquer rapidement. Pour cela, monsieur le ministre délégué - et je compte sur vous pour transmettre ce voeu à M. Sarkozy -, vous devez nous écouter et mettre en place une concertation, et ce même dans la dernière ligne droite : en effet, je sais que ce texte existe déjà. Nous avons des choses à vous dire pour que ce dispositif fonctionne !

La troisième et dernière priorité, qui a déjà été maintes fois évoquée, concerne la police de proximité.

Inventez une vraie police de proximité, et peu importe qu'elle soit constituée de gardiens de la paix, de CRS ou de gendarmes. Cette police doit être à la fois territoriale, selon la bonne idée du gouvernement qui l'avait mise en place à l'époque, et respectée, car disposant des soutiens, y compris logistiques et techniques, ainsi que des moyens pour agir.

Pour conclure, et puisqu'il est bon de partir de cas concrets, j'évoquerai l'exemple de ma ville, Mulhouse, qui illustre le décalage entre les discours et les actes. Comme de nombreuses autres villes, représentées ici par leurs élus nationaux, elle connaît une situation difficile, tous critères confondus, en matière de sécurité.

Or, ayant mis à jour mes chiffres, j'ai constaté que nous avons connu de 2002 à 2005, bon an mal an, une baisse constante des effectifs de police nationale - compte tenu des départs à la retraite, des compensations, etc. -, qui sont passés de 375 à 338 fonctionnaires. Cette baisse a également des répercussions sur la brigade des stupéfiants, la brigade des mineurs, la brigade motocycliste, ainsi que sur la police de proximité, qui est devenue une simple police de bureau, et cela ça ne va pas.

Par ailleurs, madame le ministre, je souhaite vous poser une question sur un point précis. À Mulhouse, un engagement a été pris de reconstruire les locaux du groupement de gendarmerie sur l'emplacement d'une ancienne caserne, site qui appartient à l'armée. J'ai ici une lettre de M. Steinmetz m'indiquant que ces travaux étaient retardés mais qu'ils auraient lieu en 2007. Pouvez-vous m'apporter quelques précisions à cet égard ?

Madame le ministre, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, je crois avoir évité les arguments de circonstance, la polémique et l'angélisme. En effet, en tant que maire et comme beaucoup d'entre nous ici, je « coproduis » de la sécurité. J'espère donc obtenir, sur ces quelques questions concrètes, une réponse formulée sur le même ton.

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