Intervention de Jacques Gautier

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 8 octobre 2013 : 1ère réunion
Loi de programmation militaire 2014-2019 — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Jacques GautierJacques Gautier, rapporteur délégué (équipements conventionnels) :

Ne boudons pas notre plaisir : optiquement au moins, la priorité semble bien donnée aux équipements, dans une loi qui a toujours été une loi d'équipements, et sous réserve que les dérapages de la masse salariale n'amputent pas les crédits des programmes, comme cela avait été le cas dans la précédente LPM. Ces nouvelles marges de manoeuvre n'ont pu être dégagées dans une enveloppe qui stagne en valeur qu'au prix de la diminution du format, de l'étalement des programmes et de la réduction des cibles.

La diminution du format, particulièrement rude dans l'armée de terre et dans l'aviation de chasse, touche aussi bien les équipements que les effectifs. Or, en matière militaire, la qualité de l'équipement est déterminante, mais la quantité compte aussi. Une arme est un système complexe composé d'une plate-forme et de la munition, dans un tel système, c'est la munition qui est la véritable arme. Or la loi de programmation va trop loin dans la réduction des cibles des programmes de missiles et de bombes. La cible du scalp naval, déjà ramenée à 200 unités, passe à 150. C'est trop peu, quand on sait que 170 missiles de croisières ont été envoyés sur la Libye aux premiers jours de l'intervention. C'est vrai également du missile Aster et des kits de guidage des bombes AASM qui permettent d'engager des cibles à haute valeur ajoutée hors zone. Il faut corriger cela, sinon notre armée n'aura d'autre utilité que de faire tourner les chaînes de production de nos industriels et de défiler sur les Champs-Élysées.

La réduction des cibles et l'étalement dans le temps sont les deux pires choses qui puissent arriver à un programme d'armement. Toute réduction des cibles se traduit mécaniquement par une augmentation, voire une explosion des coûts unitaires. Nous aurons au final commandé onze FREMM sur les dix-sept contractualisées, mais nous en aurons payé quatorze, et j'attends de faire le décompte pour le Rafale. En outre, cela rend obsolètes des équipements neufs, et conduit l'État à de coûteuses mises à jour. Quand il s'écoule cinquante ans entre la conception d'un programme et l'arrivée dans les forces du dernier exemplaire, c'est un peu comme si nos soldats s'écriaient : « Magnifique ! Les nouvelles Simca mille sont arrivées ! ».

Quand les gouvernements essaient de dégager des marges de trésorerie, l'État a intérêt à respecter sa parole et à avoir des programmes courts. Il serait ainsi préférable d'élargir les séries non pas dans le temps, mais dans l'espace par la coopération, comme dans le cas de l'avion A400M - ce magnifique appareil, désormais arrivé dans les forces, nous donnera une authentique autonomie stratégique, tactique et industrielle.

Je voudrais terminer sur une note positive ; la programmation va se traduire par l'entrée dans les forces d'équipements, pour la plupart d'entre eux conçus et commandés sous les précédents gouvernements. C'est dire comment la solidarité de ce que nous faisons en cette matière transcende la durée des gouvernements en place et doit être considérée du seul point de vue des intérêts de l'État.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion