Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, disons-le sans détour : comment ne pas souscrire à l’objectif de cette proposition de loi de notre collègue Gérard Le Cam et des membres du groupe CRC, qui vise à garantir un « traitement équilibré des territoires » et à corriger les inégalités qui touchent nos territoires ruraux ? Si un sénateur ne souscrit pas à cet objectif, qu’il lève le doigt !
Au sein du groupe du RDSE, c’est une cause que nous partageons de façon unanime et que nous défendons avec la plus grande détermination. Pour mémoire, je rappellerai l’adoption, ici même, sur notre initiative, le 13 décembre 2012, à l’unanimité et avec un avis favorable du Gouvernement, d’une proposition de résolution relative au développement par l’État d’une politique d’égalité des territoires. Aussi sommes-nous convaincus que les territoires ruraux sont les premières victimes de la fracture territoriale, qui, loin de se résorber, s’est aggravée ces dernières années ; je le constate chaque jour dans mon département rural du Tarn-et-Garonne.
Paradoxalement, malgré la volonté affichée par les gouvernements successifs de renforcer le processus de décentralisation, certaines réformes, comme la suppression de la taxe professionnelle, ont accru les inégalités entre les territoires et réduit l’autonomie financière des collectivités territoriales. Celles-ci ont été rendues de plus en plus dépendantes des dotations de l’État, dont le projet de loi de finances pour 2014 prévoit qu’elles baisseront de 1, 5 milliard d’euros.
Actuellement, aussi bien la dotation de base de la DGF que les mécanismes de péréquation prennent très imparfaitement en compte les inégalités territoriales et les difficultés auxquelles les territoires ruraux sont confrontés. Certes, comme notre collègue Jean Germain le souligne dans son excellent rapport, « ″l’appellation″ de territoire rural recouvre une grande diversité de situations ». De fait, on ne saurait se contenter d’opposer le rural à l’urbain : comme toujours, la complexité des situations ne se laisse pas réduire à une simple opposition binaire. Il en va de nos territoires comme de notre vie politique !
Il y a la ruralité, mais aussi l’« hyper-ruralité » chère à notre collègue Alain Bertrand, maire de Mende et sénateur de la Lozère. Par ailleurs, tous les territoires ruraux ne sont pas nécessairement en difficulté, même si c’est le cas d’une très grande majorité d’entre eux.
Les représentants de ces territoires, dont je suis, le savent : les communes rurales doivent faire face à des charges importantes, avec des ressources généralement très faibles. C’est ainsi que les communes de moins de 2 000 habitants représentent à elles seules plus des deux tiers de la voirie communale. Sans compter que le budget consacré à l’éducation est quelque peu mis à mal par la réforme des rythmes scolaires.
Dans ces conditions, les inégalités entre les communes les moins peuplées et les communes les plus peuplées en ce qui concerne le montant de la dotation de base de la DGF sont indiscutablement injustes.
S’agissant de la péréquation, censée rétablir une certaine équité et tenir compte des difficultés particulières des communes rurales, elle était très attendue, et de nombreux espoirs avaient été placés en elle ; mais force est de constater qu’elle ne produit pas tous les effets escomptés, de sorte qu’il paraît nécessaire de rechercher un meilleur équilibre.
Pour prendre l’exemple de la dotation de solidarité rurale, M. le rapporteur a tout à fait raison de signaler qu’elle « voit son efficacité atténuée en raison de son saupoudrage ».
Quant à la péréquation horizontale, le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales monte en puissance, mais il est encore très insuffisant pour assurer une véritable solidarité et un réel équilibre entre les territoires aisés et les territoires plus défavorisés.
Ainsi, nous partageons à la fois le constat dressé par nos collègues du groupe CRC et leur objectif ; comme eux, nous souhaitons trouver une solution aux difficultés des territoires ruraux, afin de pouvoir répondre aux attentes et aux besoins légitimes des populations qui y vivent. Toutefois, la suppression progressive des écarts de dotation de base liés au nombre d’habitants, prévue à l’article 1er de la proposition de loi, ne répond qu’imparfaitement, à notre avis, à l’objectif recherché. Nous pensons qu’une réforme plus approfondie non seulement de la DGF, mais aussi du système de péréquation est indispensable pour assurer une réelle solidarité entre les territoires et garantir ainsi la justice et l’équité. Selon nous, cette réforme devra répondre à deux exigences : la simplicité et l’efficacité.
Madame la ministre, vous qui êtes issue d’un département rural, je suis sûr que vous ne manquerez pas de nous faire connaître les intentions du Gouvernement en la matière et peut-être même le calendrier qu’il envisage. Je sais que vous avez travaillé sur cette question, et nous avons bien entendu les engagements que vous avez pris il y a quelques instants ; nous vous connaissons bien, et nous savons que nous pouvons vous faire confiance, ce qui ne nous empêchera pas de rester très vigilants. En tout cas, nous sommes prêts à travailler avec vous sur la refonte nécessaire.
En ce qui concerne la proposition de nos collègues du groupe CRC de financer cette réforme par une augmentation substantielle de l’impôt sur les sociétés, …