Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi de notre collègue Gérard Le Cam cible l’atténuation des inégalités de traitement entre communes par la disparition progressive des écarts de dotation de base par habitant, qui varient de 1 à 2 selon que l’on soit en présence d’une commune rurale ou d’une de nos plus importantes métropoles.
Certes, il existe des inégalités de traitement entre les communes rurales et urbaines, d’aucuns le reconnaissent. Cependant, il convient de relativiser, car il existe des communes rurales aux habitants aisés et des communes urbaines paupérisées.
Nonobstant, cette proposition de loi vise à augmenter les ressources de dotation globale de fonctionnement « part base » de la totalité des 32 929 communes de moins de 20 000 habitants pour un coût annuel estimé par le rapporteur à 889 millions d’euros. Louable intention, mais comment trouver le système juste, capable de garantir cette réelle égalité territoriale quand on sait que les auteurs de la proposition de loi veulent financer cette augmentation de base en dehors de la dotation globale de fonctionnement et de l’enveloppe normée pour éviter que les collectivités territoriales ne financent cette mesure et quand on sait également que le financement prévu, une augmentation de l’impôt sur les sociétés, ne semble guère envisageable dans un contexte de réduction des dépenses publiques, d’autant plus qu’il est déjà demandé aux collectivités de participer à cet effort de solidarité ? Nous voilà face à une sorte de quadrature du cercle !
Si le financement des dispositions prévues par la proposition de loi semble difficile à trouver, ce texte a néanmoins le grand mérite de poser, certes pour une énième fois, la question de la nécessaire réforme de la dotation globale de fonctionnement. L’exposé des motifs est d’ailleurs très révélateur : l’objectif est de doter les collectivités de moyens financiers leur permettant « d’agir au mieux des attentes et besoins ». Il ne pourra être atteint que par une remise à plat de la dotation globale de fonctionnement, la dotation de base n’étant « que le premier niveau des sources d’inégalité de traitement entre collectivités, les autres éléments de la DGF ne [faisant] que les accroître ».
Je ne peux qu’approuver cette volonté de s’attaquer à ces inégalités de traitement et de vouloir les réduire, voire de les effacer par une « mesure de justice », pour reprendre les termes de l’exposé des motifs. Moi aussi, je réclame des mesures de justice à chaque exercice budgétaire, et ce depuis mon arrivée ici en 2008, pour les 22 communes de Guyane victimes de discrimination – le mot n’est pas trop fort – en matière de dotation globale de fonctionnement. En effet, en sus des inégalités de traitement qu’elles connaissent du fait de l’écart entre communes rurales et communes urbaines, puisque 18 d’entre elles ont moins de 2 000 habitants, elles perdent chaque année 44 millions d’euros de DGF en raison de mesures spécifiques prises uniquement à leur encontre.
D’une part, ces communes perdent 27 millions d’euros, parce que l’État, au lieu de réajuster la dotation globale de fonctionnement du conseil général, a préféré prélever ce montant sur l’octroi de mer des communes, et ce depuis 1974. Les communes de Guyane sont les seules de toutes les communes des départements d’outre-mer à subir ce prélèvement. D’autre part, elles perdent 17 millions d’euros au titre de la dotation superficiaire en raison d’un plafonnement qui ne frappe que la Guyane, alors que cette dotation est majorée pour les communes de montagne en France métropolitaine.
Est-il besoin d’indiquer que ces deux mesures pénalisent lourdement les communes de Guyane, en grand retard d’équipements face au taux de croissance démographique le plus dynamique des régions françaises, 3, 9 % ?
À toutes mes demandes de réparation de ces « injustices », on m’a jusqu’à présent opposé l’enveloppe normée, soit 44 millions d’euros à réaffecter aux communes de Guyane sur une enveloppe de concours financiers de l’État de 50, 5 milliards d’euros, soit 0, 008 %. N’est-ce pas une manière de botter en touche au regard de la modicité des sommes en jeu ?
Aussi, même si je partage l’idée d’une réforme de la dotation globale de fonctionnement, des dispositions immédiates, même partielles, devront être prises pour les communes de Guyane, si l’on veut éviter une catastrophe sociale.