Intervention de Philippe Marini

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 6 novembre 2013 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2014 — Examen des principaux éléments de l'équilibre- tome i du rapport général

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, président :

Permettez-moi de lancer la discussion par quelques questions.

Lorsque vous évoquez un taux de croissance de + 0,1 %, n'existe-t-il pas une marge d'erreur statistique susceptible d'être appréciée de différentes façons ? Pour le dire autrement, entre - 0,1 % et + 0,1 %, sommes-nous vraiment capables, du point de vue de la méthodologie statistique, de faire la différence ? Mais, sur le plan psychologique, il est bien préférable d'annoncer + 0,1 %...

Vous indiquez que le déficit structurel est significativement supérieur à la prévision pluriannuelle. Pouvez-vous nous rappeler le jeu des dispositions issues des règles européennes au cas où le Haut Conseil des finances publiques serait amené à constater un décalage significatif par rapport à la trajectoire ? Que peut-il se passer ? Quelle serait la procédure ?

Je constate un écart entre les prévisions du Gouvernement et celle de la Commission européenne. À la fin 2014, le déficit effectif s'établit à 3,6 % selon le Gouvernement et à 3,8 % selon la Commission européenne et, pour 2015, les pourcentages sont respectivement de 2,8 % et 3,7 %.

Vous nous dites, très justement, que la Commission européenne porte son appréciation « toutes choses égales par ailleurs », donc en considérant qu'il n'y aurait pas de mesures correctrices ou, du moins, que les mesures correctrices appropriées ne sont pas annoncées. La Commission européenne a-t-elle, selon vous, raison sur le plan méthodologique ? Le Gouvernement n'a-t-il pas tout dit ? Se serait-il abstenu d'annoncer les mesures qu'il sait devoir prendre pour procéder à des économies plus importantes ou plus efficaces afin de parvenir aux soldes effectifs de 2014 et 2015 ? Quelles peuvent être ces mesures supplémentaires ?

J'aimerais également soulever un point méthodologique - et cela n'a pas de caractère critique - sur la notion de solde stabilisant, c'est-à-dire celui qu'il faut atteindre pour que le ratio dette sur PIB commence à décroître. Il est fonction de la croissance. Nous étions habitués à le fixer autour de 3 %. Je crois comprendre qu'il serait aujourd'hui sensiblement plus bas. Or, il apparaît que la dette publique diminuerait en pourcentage du PIB à partir de soldes sensiblement supérieurs. Il faudrait y voir plus clair.

Enfin, vous évoquez la norme de dépense. Deux dépenses réelles ne semblent pas comprises dans les dépenses totales de l'État. La première, pour un montant de 830 millions d'euros en 2014, représente une compensation attribuée par l'État aux départements, c'est-à-dire un transfert de l'équivalent des frais d'assiette et de recouvrement des impôts locaux. La seconde est une opération similaire au bénéfice des régions : il s'agit d'une transformation de la dotation globale de décentralisation qui, elle, figurait bien en 2013 dans la norme de dépense. En revanche, sa transformation en un panier de recettes fiscales, pour un même montant de 900 millions d'euros, transféré aux régions, ne serait pas dans la norme de dépense.

Je constate que les habitudes des administrations financières qui s'efforcent, chaque année, de faire un peu « d'habillage » ne sont pas complétement abandonnées. Ce qui peut nous rassurer puisque nous avons toujours connu ce type de pratiques...

En conclusion, les données sur le financement de l'État et de la dette me semblent pouvoir être appelées « celles du meilleur ami » puisque, finalement, le meilleur soutien de la politique budgétaire de ce Gouvernement, ce sont bien les marchés financiers. Ce monde odieux de la finance nous permet d'émettre plus de dettes pour un montant de charges financières maîtrisées, voire en légère décroissance !

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