C'est le présidium qui a élaboré la charte qui l'indique et qui préconisera ce qu'il faut faire.
On nous dit aussi que le traité constitutionnel introduit le principe de la démocratie participative. Il y a effectivement dans le projet une vingtaine de lignes qui y sont consacrées dans l'article I-47, et en particulier à la pétition signée par un million de citoyens. Mais quelle limite ! Cette pétition permet de soumettre une proposition à la Commission européenne, qui en fait ce qu'elle veut, et la proposition doit de plus se situer dans le cadre strict de l'application de la Constitution.
Monsieur le Premier ministre, monsieur le garde des sceaux, le poids de l'Union européenne devrait lui permettre de faire émerger d'autres règles internationales que celles qui sont imposées aujourd'hui par les Etats-Unis et leurs alliés inconditionnels. L'Union devrait s'affirmer comme un grand acteur mondial et jouer un rôle particulièrement actif vis-à-vis des pays du Sud. C'est le souhait de tous les Européens épris de paix, de solidarité et de développement humain.
Le traité constitutionnel, dans son article I-41, précise que la politique de l'Union européenne en matière de sécurité et de défense communes doit être compatible avec la politique arrêtée dans le cadre de l'OTAN et crée une agence de l'armement. Est-ce franchement la meilleure manière de faire de l'Europe une puissance politique face aux Etats-Unis ? Doit-on voir dans la réunion des ministres de la défense qui s'est tenue à Nice les 9 et 10 février dernier un gage de soutien à la logique d'affrontement et de domination de cet OTAN, sous la houlette américaine ?
Monsieur le Premier ministre, c'est au regard du contenu du traité constitutionnel qu'il faut débattre des pouvoirs des parlements nationaux, et donc du parlement de notre pays que certains ici - je citerai MM. Poncelet, Valade, Vinçon, de Raincourt, de Rohan, Larcher - défendaient en 1992. Le traité constitutionnel limite les pouvoirs des parlements nationaux au choix des conditions dans lesquelles ils prévoient de transposer la loi européenne en droit interne. S'ils estiment que la Commission a outrepassé ses pouvoirs, ces parlements peuvent lui demander de s'expliquer. Les mesures de l'article 3 du projet de révision que vous nous soumettez n'y changent rien.
Monsieur le Premier ministre, monsieur le garde des sceaux, c'est au regard du contenu du traité constitutionnel que nous devons nous prononcer ici, au Sénat, et que le peuple devra se prononcer. Si le peuple veut donner ses chances à une Europe sociale, démocratique, de coopération, il dira non.
Ceux qui annoncent le chaos en cas de rejet par notre pays du traité constitutionnel spéculent sur la peur. Si le non l'emporte en France, le projet de traité deviendra caduc et les traités actuels resteront en vigueur. Il n'y a pas de vide juridique ; vous le savez, tout le monde le sait. En revanche, dans ce cas, un débat de fond pourrait enfin se développer à l'échelle de l'Union.
Pourquoi tant de citoyens ne se reconnaissent-ils pas dans ce modèle libéral européen ? C'est une question à laquelle il faudra bien répondre.
Le débat n'est pas entre partisans et adversaires de l'Europe. Le véritable choix est entre l'Europe sociale, démocratique, solidaire et pacifique et l'Europe du capitalisme le plus débridé qu'induit et sanctuarise le traité constitutionnel.
Monsieur le Premier ministre, monsieur le garde des sceaux, à ce traité constitutionnel, il faut dire non, afin de lancer le chantier d'un nouveau traité. C'est un non progressiste, solidaire, constructif. Dire non au traité constitutionnel, c'est dire oui à l'avenir de l'Europe.