La mission « Régimes sociaux et de retraite » et le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » sont des dossiers très techniques, résultant de décisions prises ces vingt dernières années.
Le CAS « Pensions », qui s'établit à 56,5 milliards d'euros est alimenté par les dotations de l'État à hauteur de 45,4 milliards d'euros, les 11 milliards d'euros restants provenant des cotisations des agents concernés.
La première bonne nouvelle est que les évolutions du CAS « Pensions », comme celles de la mission « Régimes sociaux et de retraite», respectent la programmation triennale 2013-2015. Nous assistons à une légère baisse des dépenses due, pour l'essentiel, à une moindre progression de l'inflation - de l'ordre de 0,8 % en 2013 et de 1,3 % en 2014 - alors que les prévisions l'estimaient à 1,75 %. Le deuxième élément qui explique cette faible progression des dépenses est le report de la revalorisation des pensions de six mois, prévue par le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.
Le programme 741 regroupe les pensions civiles et militaires des fonctionnaires de l'État, soit 93 % des crédits du CAS « Pensions ». Le programme 742 « Ouvriers des établissements industriels de l'État » n'en représente que 3 % et regroupe deux fonds gérés par la Caisse des dépôts et consignations, l'un pour les retraites des anciens ouvriers de l'État, l'autre pour les accidents du travail. Les 4 % restants regroupent les crédits destinés aux pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en provenance de la mission « Anciens combattants », dont le président Philippe Marini est rapporteur spécial.
Les pensions versées par les régimes spéciaux sont retracées dans le tableau à la page 10 du rapport. Deux tiers des subventions d'équilibre versées par l'État à ces régimes diminuent, tandis qu'un tiers augmente. Les principaux régimes sociaux et de retraite de la mission sont ceux de la SNCF et de la RATP. La subvention d'équilibre versée au régime de retraite du personnel de la RATP augmente de 3,1 %, alors que celle de la SNCF - où le rapport entre les actifs et les retraités s'améliore - diminue de 1,3 %. La RATP, dont la dotation s'élève à 634 millions d'euros, a enregistré un nombre de départs à la retraite supérieur aux prévisions.
La dotation au régime de retraite de la société d'exploitation industrielle des tabacs et des allumettes (SEITA) augmente de 1,5 %. Celle versée à la caisse autonome de sécurité sociale dans les mines enregistre une augmentation de 2,7 %, pour un montant total de 1,35 milliard d'euros. La hausse de la subvention de l'État s'explique principalement par la diminution du produit de cessions immobilières dont a bénéficié le régime des mines ces dernières années. La situation du régime est en réalité stabilisée, ses dépenses seraient même en léger retrait. L'Établissement national des invalides de la marine (ENIM), qui gère le régime de retraite et de sécurité sociale des marins, a quant à lui reçu une dotation de 825 millions d'euros, en baisse de 1,7 % par rapport à 2013.
J'en arrive au contrôle budgétaire que j'ai conduit sur le régime des marins, durant le premier semestre 2013. La réforme de l'ENIM, réalisée en 2010, a produit de bons résultats, en dépit de certaines difficultés. Le régime bénéficie désormais de l'appui de la sécurité sociale pour la gestion des prestations. La délocalisation du siège de l'établissement à La Rochelle est un élément positif. D'autres services sont situés à Saint-Malo - où je me suis rendu - et à Paimpol. L'on voit là-bas des armements importants alors que le nombre de cotisants décroît. En effet, les cotisations ne représentent plus que 10 % des recettes de l'ENIM, tandis que 90 % de ses ressources proviennent de la solidarité nationale (subvention de l'État et compensation démographique versée par d'autres régimes de retraite).
Ce régime est dans l'ensemble bien géré mais les armateurs veulent des procédures rapides, sinon ils s'adresseront aux pays qui proposent des systèmes d'assurance privés. Il faudrait réactiver les guichets dans les ports pour informer et répondre à la demande, sinon les bateaux continueront à partir de France avec des marins presque tous affiliés à des régimes étrangers. Nous avons proposé diverses solutions, sans pour autant toucher au système de retraite des marins. À l'issue de la mission de contrôle budgétaire, j'ai ainsi adressé, en application de l'article 60 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), une lettre aux ministres de tutelle de l'ENIM. Certaines des recommandations ont d'ores et déjà été suivies ; la réponse des ministres est actuellement en cours de validation.
J'en reviens maintenant au CAS « Pensions ». L'évolution de la contribution du budget général au CAS ne pose pas de problème en tant que telle, malgré un montant très important. Néanmoins, les déséquilibres s'accroissent : en 2006, le taux de contribution de l'État employeur pour les pensions des fonctionnaires civils s'établissait à environ 50 %, aujourd'hui le taux de contribution de l'État s'élève à 74 %. Pour les pensions militaires, le taux de contribution de l'État est passé de 100 % en 2006 à 126 % en 2013.
De même, la situation est très déséquilibrée dans les régimes spéciaux. Malgré toutes les réformes, la subvention de l'État à la SNCF représente 62 % du total des ressources de ce régime. Ce n'est qu'à partir de 2017 que les régimes spéciaux devront s'aligner sur les règles des régimes de la fonction publique (sauf pour les cotisations). À l'occasion de la dernière réforme des retraites, il eût été souhaitable de rééquilibrer les choses et, sans toucher aux droits acquis, de modifier le système pour les nouveaux entrants.
Je souhaiterais ajouter quelques mots à propos des relations entre l'État et la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL). Quand les agents de l'État ont été transférés aux collectivités territoriales, cette caisse en a repris la gestion. Un mécanisme de neutralisation des conséquences financières de ce transfert de personnel a été mis en place. Les flux liés à ce mécanisme sont retracés dans le CAS « Pensions ». Mais ce dispositif se traduit par une charge nette d'environ 350 millions d'euros par an pour la CNRACL depuis 2010. La caisse est également fragilisée par la compensation démographique qu'elle verse aux autres régimes de retraite, pour un montant total d'environ 1,3 milliard d'euros par an. Ainsi, en 2014, le déficit de la CNRACL atteindrait 420 millions d'euros.
En conclusion, la situation apparaît globalement maîtrisée. Les différentes réformes ont imprimé sur les comptes de ces régimes une évolution en dents de scie, mais les subventions prévues devraient permettre d'équilibrer ces régimes.
L'Assemblée nationale a adopté en première délibération, sans modification, les crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale.
Sous réserve de ces observations, étant donné que le paiement des droits à pension constitue une obligation pour l'État, je vous propose d'adopter sans modification les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d'affectation spéciale « Pensions ».