Cette constitution fédérale va donc naître de l'agrégat de nos Etats, par le biais d'un traité international. De grands professeurs de droit l'ont qualifiée de monstre juridique. Comme dans un célèbre magasin parisien, ainsi que l'a précédemment dit M. Haenel, on y trouve et on y trouvera toujours de tout : les droits de l'homme et les droits de pêche, la politique monétaire, la protection des coccinelles, la coopération judiciaire et la définition des graisses animales ; mais encore quatre cent quarante-huit articles, deux préambules pour le texte principal, trente-six protocoles additionnels, deux annexes supplémentaires, sans compter deux déclarations jointes comprenant cinquante articles, le tout étant explicitement proclamé de valeur constitutionnelle.
Je me bornerai à amorcer les réponses à deux questions : où est « l'Europe rempart » de la globalisation ? Où est l'Europe indépendante ?
D'abord, où est « l'Europe rempart » ?
Tous les gouvernements ont juré que leur méthode pour « faire l'Europe » apporterait aux Européens la prospérité. Or, depuis trente ans, nous sommes collectivement impuissants à résoudre notre principal problème économique : le chômage de masse. Depuis plus d'une génération, le nombre de chômeurs oscille en France entre deux millions et demi et trois millions. En Allemagne, il a franchi la barre des cinq millions. Cette même méthode a échoué pour le volet économique de la réunification allemande. Elle laisse les nouveaux à la traîne. Et ces gouvernements prétendent intégrer, avec des méthodes similaires, les autres pays de l'ancien bloc communiste.
La vérité est que le fossé s'accroît avec les Etats-Unis, tant pour la croissance que pour la recherche et l'investissement. En 1990, le niveau de vie moyen des Européens atteignait 80 % de celui des Américains. Aujourd'hui, il arrive péniblement à 60 %. Et je n'évoquerai pas les pays d'Asie !
L'appauvrissement de la France s'accélère avec une désindustrialisation généralisée, en dépit des efforts louables du gouvernement Raffarin pour freiner l'hémorragie. Les délocalisations nous font perdre la substance vive de notre économie.
Mais comment pourrait-il en être autrement quand, en quatre ans, l'euro a été réévalué de 65 % par rapport au dollar ?
Tous les gains de productivité, tous les allégements de charges, tous les sacrifices demandés aux salariés, à nos petites et moyennes entreprises, sont emportés par cette stupide politique de l'euro fort. Nos produits ne sont plus compétitifs sur le marché mondial du seul fait de ces manipulations monétaires. Il est vrai que la très prétentieuse Banque centrale européenne de Francfort n'est même pas capable de se gérer elle-même. Elle est obligée de présenter des comptes en déficit !
Treize ans après la ratification, « ric-rac » dirais-je, du traité de Maastricht, osons regarder la vérité en face : c'est un échec ! Cet échec rend l'idée même d'Europe douteuse aux yeux d'un nombre croissant de nos concitoyens. Je le dis en Européen convaincu