Intervention de Vincent Peillon

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 12 novembre 2013 : 1ère réunion
Projet de loi de finances pour 2014 — Audition de M. Vincent Peillon ministre de l'éducation nationale

Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale :

J'essaierai de regrouper mes réponses de la façon la plus synthétique possible.

Les ÉSPÉ doivent être capables, partout sur le territoire, de former les futurs enseignants. Il est vrai, cependant, que le nouveau modèle que nous promouvons se met en place de façon disparate. C'est l'héritage de l'autonomie des universités, avec ses avantages mais aussi ses inconvénients. Une chose demeure certaine : les ÉSPÉ ne sont pas les IUFM. Elles constituent un tout autre modèle de formation même si elles ne pouvaient pas laisser de côté les anciens personnels des IUFM. Les modules de pré professionnalisation s'installent progressivement. C'est un point très positif car il ne faut pas cacher qu'il a été très difficile pour les services des ressources humaines des rectorats de trouver des berceaux de stages adéquats. Grâce à leur professionnalisme, des étudiants en L2 ou en L3 commencent déjà à avoir un premier contact avec le métier d'enseignant.

Il nous faut être très vigilants dans la mise en place des parcours de formation afin d'assurer la consistance et la pérennité des modules communs à l'ensemble des corps d'enseignants. L'habitude que nous avons prise de séparer les différents corps d'enseignants est malheureusement très enracinée. Il est dans toutes les académies difficile de réunir tous les publics, mais c'est un point crucial pour constituer une culture commune et développer les échanges de pratiques entre professionnels. De même l'intégration des mouvements d'éducation populaire se fait plus ou moins bien selon les académies, selon les traditions locales.

Je veux revenir sur la réforme des rythmes scolaires. On m'a demandé pourquoi cette réforme était contestée et faisait l'objet de divers mouvements sociaux. Je crois tout simplement que l'intérêt général ne se construit pas en additionnant des intérêts particuliers. Chacun a son point de vue, que ce soit les collectivités territoriales, les animateurs, les enseignants ou les parents. Mon travail est d'ouvrir le dialogue afin de réunir les différents points de vue au service des enfants. Contrairement à ce qu'on croit généralement, je n'ai pas l'impression que tout le monde cherche le bien de nos enfants. Sinon comment expliquerions-nous la persistance de tant d'échecs scolaires et tant d'inégalités accumulés depuis des années ? Ce n'est pas la diminution des heures de cours qui fatigue les enfants. Lorsque les enfants sont laissés à l'école de 7 heures 30 à 19 heures, où est la responsabilité de l'éducation nationale ? Nous avons un problème collectif que nous devons résoudre grâce à un effort collectif. Je veux couper le cou à la rumeur. Il n'y aura aucun report supplémentaire. Ceux qui ont demandé l'année passée un peu plus de temps l'ont obtenu. Malheureusement, tous ne l'ont pas utilisé pour travailler leur projet éducatif. C'est maintenant le moment d'être volontaire et de ne pas satisfaire les demandes reconventionnelles. La réforme se mettra en place dans les délais fixés. Un comité de suivi est en place : il aidera à rappeler certains principes de bon sens pour l'organisation du temps scolaire et des activités périscolaires, notamment à l'école maternelle. La question du financement de la réforme est réglée par le prolongement des règles d'amorçage. Le Gouvernement ne reculera pas.

La CDIsation des AVS a constitué une première étape qui peut être suivie d'autres actions. Je suis disposé à entendre toutes les propositions qui vont dans le sens du progrès social et humain.

Toutes les études montrent que les Français en général pensent qu'il vaut mieux séparer les niveaux, les âges, les catégories... Au contraire, je pense qu'il faut décloisonner l'éducation, c'est ainsi qu'on améliorera les performances. La mixité des publics, notamment au lycée professionnel, est essentielle. J'y suis totalement favorable.

L'exception pédagogique a donné lieu à de grands débats théoriques et il est certain que nous devons tenir compte de principes fondamentaux tels que celui des droits d'auteur. À cet égard, le portail EDUTECH a permis une avancée en donnant aux enseignants le libre accès à de vastes ressources numériques.

Aux interrogations de M. Pierre Martin, je répondrais que les programmes de 2008 vont bien évidemment être réformés en concertation avec les enseignants. Comme lui, nous évitons de caractériser uniquement les élèves selon leur milieu favorisé ou défavorisé, mais nous gardons à l'esprit que le système éducatif continue de reproduire les inégalités sociales d'une génération à l'autre.

Nous faisons, bien sûr, grand cas des préconisations de la Cour des comptes qui évoque les aspects qualitatifs de la politique conduite par l'éducation nationale, tout autant que les moyens mobilisés et leur répartition.

Dans la mesure où elle ne consiste aucunement dans la désignation de boucs émissaires, la charte de la laïcité a été bien accueillie, aussi bien par les élèves que par les enseignants, qui trouvent en elle un point d'appui. Dans la continuité de cette charte, un enseignement moral et civique sera mis en oeuvre, favorisant la diffusion d'une morale laïque.

Pour conclure, je dirais que la politique de l'éducation nationale se décline selon trois axes :

- l'instruction, qui passe par les apprentissages fondamentaux ;

- l'éducation, pour la transmission des valeurs nécessaires à la vie en société ;

- la formation, dont l'objet est de favoriser l'insertion professionnelle.

Nous disposons pour cela d'un bon budget que nous nous efforcerons d'utiliser au mieux.

J'ai besoin pour cela de l'aide des sénatrices et des sénateurs, dont les contributions m'ont été précieuses lors de l'adoption de la loi sur la refondation de l'école de la République.

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