… régulièrement rappelé dans les différentes assemblées générales de la FNACA auxquelles nous avons participé. Nous avons, les uns et les autres, été régulièrement interpellés sur cette promesse qui ne s’est jamais traduite en actes. Si le débat budgétaire nous permet d’y parvenir, nous ne pourrons que nous en féliciter.
J’estime qu’il y a manifestement sur cette question, au travers de la proposition de loi qui nous est présentée, une volonté sous-jacente de réécrire l’histoire. En effet, le texte prévoit que la carte pourra être attribuée à ceux qui ont été présents en Algérie au moins quatre mois entre le 1er juillet 1962 et le 1er juillet 1964, avec certains critères d’attribution qui se fondent sur la notion de « participation à des opérations en zone d’insécurité comportant un risque d’ordre militaire ». Or il faut également prendre en compte le contexte « historico-politique » et les conditions dans lesquelles se sont déroulées, ou non, des opérations militaires comportant « un risque d’ordre militaire ».
Dans le cas de l’Algérie, le cessez-le-feu entre l’armée française et les troupes du FNL, qui deviendra l’ALN, l’Armée de libération nationale, est intervenu le 19 mars 1962. Nous avons voté au Sénat une proposition de loi visant à reconnaître officiellement cette date.
Après cette date, conformément aux accords d’Évian, il ne pouvait y avoir, et il n’y eut pas, d’engagement de nos troupes contre celles de l’ALN. En outre, nous commencions à rapatrier nos troupes, en priorité celles qui comprenaient une majorité d’appelés du contingent.
Bien que la situation d’insécurité fût avérée, il n’y eut pas d’opérations militaires après le 19 mars 1962, donc, par définition, pas de « risque d’ordre militaire » proprement dit. En revanche, de nombreuses représailles furent commises par la population civile algérienne, comme le massacre des harkis et de leurs familles, ou les exactions contre les Européens à Oran le 5 juillet 1962, qui firent plus de 500 victimes. C’est d’ailleurs à cet événement que la proposition de loi fait explicitement référence dans l’exposé des motifs, avec, me semble-t-il, l’intention, consciente ou non, de reprendre les arguments de ceux qui ont reproché à nos troupes leur non-intervention pour y mettre fin.
Pour ce qui est des anciens combattants ayant participé à des OPEX – c’est la deuxième partie de la proposition de loi –, il est considéré, à juste titre, que les critères d’attribution de la carte ne correspondent plus à la réalité de ces engagements et que les conditions pour l’obtenir sont trop complexes et restrictives.
Telle qu’elle est rédigée, la proposition de loi impliquerait de reconnaître le statut d’anciens combattants aux militaires engagés à l’étranger avant 1991, c’est-à-dire essentiellement les casques bleus de la FINUL. Or ceux-ci avaient un statut particulier puisqu’ils participaient à une opération dépendant directement de l’ONU, à la différence des opérations menées en Afghanistan, au Rwanda, en Libye, au Mali ou bien encore contre la piraterie maritime au large de la corne de l’Afrique, qui ont toutes reçu la qualification « d’opérations extérieures ».
Cela nécessiterait en outre que soient traitées rétroactivement les situations des unités envoyées à l’étranger dans un cadre bilatéral, ou sous mandat de l’ONU, et de vérifier le statut de ces militaires eu égard à leur qualité d’anciens combattants. Il faudrait aussi modifier les critères généraux prévus par le code de la défense, en retenant par exemple ceux appliqués pour l’Afrique du Nord, soit quatre mois de présence.
Monsieur le ministre, les engagements que vous avez pris sur ce sujet lors du débat budgétaire à l’Assemblée nationale et rappelés devant la commission des affaires sociales du Sénat seront de nature à régler équitablement cette question.
Au final, le groupe communiste, républicain et citoyen votera contre cette proposition de loi, en raison des implications qu’elle entraîne concernant la période de la guerre d’Algérie. Notre position ne s’explique pas par des raisons budgétaires puisque l’attribution de la carte du combattant ouvre des droits en vertu des dispositions du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre. Nous ne voterons pas ce texte parce que le droit à réparation pour la carte « à cheval » nous semble quasiment satisfait, sous la réserve d’un vote, et parce qu’il soulève une question de principe et sous-entend une certaine vision de l’histoire.