Intervention de Michel Berson

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 20 novembre 2013 : 2ème réunion
Loi de finances pour 2014 — Mission « recherche et enseignement supérieur » - examen du rapport

Photo de Michel BersonMichel Berson, rapporteur spécial :

Si les crédits de paiement de la mission « Recherche et enseignement supérieur » progressent de 113,3 millions d'euros, les moyens fléchés exclusivement sur la recherche diminuent de 88 millions en autorisations d'engagement et de 76,8 millions en crédits de paiement, soit une baisse de l'ordre de 0,5 % par rapport à 2013, mais une augmentation de 0,6 % par rapport à 2012. Alors que la contrainte est très forte, le budget de la recherche est sanctuarisé : elle demeure l'une des priorités de l'action gouvernementale.

La diminution de l'enveloppe résulte essentiellement de la réduction des moyens de l'Agence nationale de la recherche (ANR), à hauteur de 81,5 millions d'euros. Cette baisse continue constitue désormais une menace pour la viabilité du système de financement de la recherche sur projets. Un décret d'avance, transmis avant-hier à la commission des finances, ampute les crédits de l'ANR de quelque 155 millions d'euros. Cela risque d'affecter le taux de succès moyen aux appels à projets, qui était déjà tombé à 17 % en 2013 - pour une moyenne européenne de 24 %.

La diminution de la dotation avait pu, par le passé, être justifiée par le transfert de crédits vers les grands organismes de recherche. Or ceux-ci vont voir leurs ressources récurrentes reculer. Le moment est venu de redéfinir le rôle et la place de l'agence dans notre système de financement de la recherche. Nous devrons être attentifs à l'évolution de ses crédits. Le contrat pluriannuel avec l'Etat, prévu par la loi de 2005, n'a toujours pas été signé ni même ébauché ! La situation budgétaire des organismes de recherche est de plus en plus tendue, et nombre de leurs programmes sont reportés ; si les emplois restent stables, beaucoup ne sont pas pourvus.

Les actions de recherche portées par la présente mission bénéficient, en 2014, du nouveau programme d'investissements d'avenir (PIA 2). 3,8 milliards d'euros s'ajouteront aux 9 milliards d'euros du PIA 1 fléchés vers la recherche. L'attribution des crédits rattachés serait assurée par l'ANR, le CNES, le CEA et le Centre français de recherche aérospatiale (ONERA).

En 2014 va s'engager « Horizon 2020 », nouveau programme-cadre pour la recherche et le développement technologique de l'Union européenne (PCRD), doté de 79 milliards d'euros destinés à des projets de recherche. Il est déterminant de se doter d'une stratégie en la matière. La contribution de la France à l'enveloppe du PCRD a été de 16,4 % sur la période 2007-2013, alors que la proportion des financements obtenus par des participants français est tombée à 11,4 %. Avec le repli des crédits de l'ANR, il convient que nos chercheurs puissent tirer parti de cette manne. L'objectif est de tendre vers un niveau au moins égal à la contribution française.

En outre, 2014 sera la première année de pleine application de la loi du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche, qui concrétisera la notion de transfert, maillon faible de notre système. Il est nécessaire de passer de l'invention - le laboratoire - à l'innovation - le marché - de manière à ce que la recherche serve la création de richesse et d'emplois.

La faiblesse de la France dans ce domaine est connue. Les dépenses consacrées au développement expérimental ne représentent que 34 % des budgets de recherche et développement (R & D) contre 63 % aux États-Unis ou au Japon. Par conséquent, je souhaite que les crédits budgétaires et les dépenses fiscales soient pleinement mobilisés en faveur du transfert. La création du crédit d'impôt en faveur de l'innovation (CII), extension du crédit d'impôt recherche (CIR), s'inscrit bien dans cette problématique, également prise en compte dans le PIA 2.

L'article 71 prolonge le statut de jeune entreprise innovante (JEI) aux entreprises créées jusqu'au 31 décembre 2016. Il étend également l'exonération de cotisations à la charge de l'employeur aux personnels affectés à des activités d'innovation ; à ce jour, seules les personnes impliquées dans un projet de recherche étaient concernées. Enfin, il supprime la dégressivité de l'exonération de cotisations sociales instituée en 2011. Grâce à ce très utile dispositif, les entreprises passeront plus rapidement et dans de meilleures conditions à une phase d'industrialisation, ce qui maximisera l'impact économique de la recherche.

Le coût du CIR devrait atteindre 5,8 milliards d'euros en 2014 - voire 6 milliards d'euros s'il est tenu compte du CII. Ce montant, significatif, dépasse ainsi la dotation des trois principaux organismes de recherche (CNRS, CEA et CNES). Depuis la réforme de 2008, cette charge a triplé ! Selon les projections de la Cour des comptes, son montant va continuer à croître. Je présente un amendement destiné à maîtriser cette évolution. Je suis attaché au maintien du CIR, mais il serait bon de l'améliorer avant de le cristalliser.

Sous le bénéfice de ces observations, je vous propose d'adopter les crédits des programmes relatifs à la recherche de la mission « Recherche et enseignement supérieur » ainsi que l'article 71 du présent projet de loi de finances.

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