Intervention de Jean-Philippe Vachia

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 20 novembre 2013 : 3ème réunion
Mutualisation des moyens départementaux de la sécurité civile — Audition pour suite à donner à l'enquête de la cour des comptes

Jean-Philippe Vachia, président de la quatrième chambre de la Cour des comptes :

Je suis très heureux de revenir devant votre commission quelques semaines après lui avoir présenté notre rapport public thématique sur les finances publiques locales. Gageons que cette enquête ne suscitera pas autant d'émotion.

Notre rapport a été déposé dans le délai imparti, le 20 septembre. Notre travail s'inscrit dans la continuité du rapport public thématique des juridictions financières sur les SDIS publié en novembre 2011 et du rapport de Dominique de Legge sur les investissements de sécurité civile d'octobre 2012. Notre apport spécifique est de montrer que la mutualisation peut contribuer à l'amélioration de la couverture des risques opérationnels.

Premier message, la mutualisation des achats reste insuffisamment pratiquée par les SDIS. Moins de 10 % des achats sont réalisés par le biais de l'union des groupements d'achats publics (UGAP). Moins de 45 % des SDIS réalisent des achats en commun avec les départements. La part des groupements de commandes représente moins de 10 % du volume des achats de matériel. Les achats individuels restent majoritaires pour de nombreux matériels, notamment les engins d'extinction. Ni les SDIS ni les constructeurs n'y gagnent : les SDIS ont moins de marge de négociation sur les prix, les constructeurs opèrent sur de toutes petites séries, jusqu'à deux véhicules ! Cette logique perdant-perdant les fragilise.

Deuxième message, la mutualisation du traitement de l'alerte progresse faiblement. Inexistante entre les SDIS, elle reste minoritaire entre les SDIS et le SAMU alors qu'elle est essentielle pour décider des interventions les mieux adaptées et pour éviter l'utilisation redondante des moyens. La mutualisation présenterait un réel avantage pour les petits SDIS eu égard aux effectifs mobilisés dans les centres d'appels.

Troisième message, la formation reste une fonction peu mutualisée : 95 % des heures sont dispensées par les SDIS d'affectation. Or la formation est coûteuse, aussi bien en installations (2 millions d'euros pour une maison à feu) qu'en heures de travail : la formation à l'adaptation à l'emploi des seuls sapeurs-pompiers professionnels représente plus de 140 000 jours de formation annuelle.

Quatrième message, les équipes spécialisées des SDIS (équipes de sauvetage déblaiement, équipes de radiologie, équipes de nageurs-sauveteurs) sont souvent mal utilisées. Leur regroupement dégagerait des économies et contribuerait à une meilleure réponse au risque.

Cinquième message, la rationalisation de l'emploi des moyens nécessite un renforcement du rôle de coordination de l'Etat à un niveau supra-départemental. Les préfets des zones de défense et de sécurité pourraient animer la coopération en matière d'installations lourdes, de formation ou d'équipes spécialisées.

Nos recommandations se déclinent ainsi : rendre obligatoire l'unification des centres de traitement des appels dans tous les départements ; expérimenter au sein d'une zone de défense et de sécurité la mutualisation des équipes spécialisées des SDIS et l'élaboration d'un schéma zonal d'implantation et de coordination de ces équipes ; rationaliser l'emploi et le développement des équipements de formation, notamment en rendant obligatoire, avant toute création d'une installation lourde de formation, une étude sur les installations existantes et les possibilités de mutualisation offertes par l'installation envisagée ; inviter les SDIS à recourir davantage aux groupements de commandes ou aux centrales d'achat et à poursuivre la convergence technique des engins de lutte contre l'incendie.

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