Pour ce qui concerne TV5 Monde, en portant sa participation au capital à 49%, France Télévisions est devenue son principal actionnaire en lieu et place de l'AEF. En conséquence, son président s'est substitué à celui de l'AEF à la tête de TV5 Monde. M. Yves Bigot a succédé comme directeur général à Mme Marie-Christine Saragosse, nommée présidente de France Média Monde.
La chaîne francophone demeure le principal outil télévisuel de rayonnement mondial de la France, disponible dans plus de 243 millions de foyers TV répartis dans 198 pays, soit une progression de 3,5% par rapport à 2012.
Un nouveau plan stratégique de la chaîne pour la période 2014-2016 a été soumis à la conférence des ministres de TV5 à Québec le week-end dernier.
Sept grands chantiers ont été définis :
1. la recherche des pistes de synergie avec FMM en évitant les effets d'éviction par des redondances de programmes ;
2. le développement des synergies avec France Télévisions, actionnaire de référence : association aux appels d'offres du groupe, alimentations en programme, rapprochement avec la régie publicitaire pour optimiser la commercialisation des antennes et des offres numériques ;
3. le développement des productions propres,
4. dont une grande émission évènementielle mensuelle ;
5. le recentrage des productions autour de la culture et des valeurs de TV5 Monde et pas seulement sur l'information, de manière à présenter une offre généraliste unique ;
6. le lancement d'une chaîne enfant en Afrique afin d'accroître l'attractivité du français et de conforter l'avenir de la francophonie ;
7. la perspective d'un partenariat plus équilibré et une collaboration plus étroite avec les chaines et les Etats africains.
La dotation de TV5 Monde progresse légèrement à 76,2 millions d'euros (soit 1,2 million de plus qu'en 2013). Cela permet un rééquilibrage de la contribution française (70% des ressources) mais limitera nécessairement les ambitions de la chaîne.
Le compte de résultats prévisionnels se fonde donc sur cette progression, sur une amélioration attendue des ressources propres et sur une politique volontariste de réduction des dépenses qui doivent permettre l'autofinancement de la hausse inéluctable de certaines charges et d'une partie des nouveaux développements (1,6 M€).
Ceci nous amène, avec André Vallini, à formuler quelques remarques :
Première remarque, de 2011 à 2013, la subvention française est restée stable à 73,5 M€, alors que les partenaires francophones ont augmenté leurs contributions de près de 65% entre 2008 et 2013. Pour 2014, la France prévoit une augmentation de sa contribution afin de corriger un déséquilibre en sens inverse.
Deuxième remarque : les perspectives de croissance du marché publicitaire de référence pour TV5 Monde sont faibles pour plusieurs raisons. Le chiffre d'affaires publicitaire de TV5 Monde est réalisé pour moitié sur la France, or celui-ci a été particulièrement impacté par le passage à la TNT et la création de nouvelles chaînes gratuites qui ont entraîné une hausse de la concurrence. Les bonnes performances en Afrique (34 % du chiffre d'affaires publicitaire total en 2012) seront difficiles à réitérer du fait de la concurrence accrue des chaînes, nationales en langue locale, panafricaines ou internationales. J'attire d'ailleurs votre attention sur la stratégie très efficace de la Chine en ce domaine qui finance les infrastructures de diffusion, contrôle ainsi les opérateurs ce qui lui permet de diffuser des programmes et sur le lancement prochain d'Al Jazeera, de Sky et de BBCWorld en langue française sur ce continent. Enfin le climat atone du marché publicitaire international engendre un déplacement des budgets vers les marques « leaders », les chaînes d'information et les chaînes anglophones.
Troisième remarque : TV5 Monde s'est dotée en 2013 d'un nouvel outil de production, postproduction et diffusion en norme HD - un investissement de 17 millions d'euros - financé par une opération de cessions-bails d'une durée de 5 ans avec rachat des matériels à l'euro symbolique en fin de contrat. Les émissions comme les signaux seront produits en haute définition.
Cette migration va toutefois obliger TV5 Monde à orchestrer une stratégie complexe de diffusion, dont on mesure encore mal l'impact en termes d'audience. Les signaux sortant de la régie de diffusion en HD devront être reconvertis, dans un premier temps, pour être acheminés et livrés aux opérateurs de diffusion. En effet, la chaîne n'est pas en mesure, pour le moment, d'acquérir les capacités supplémentaires nécessaires, en termes de liaisons et de flotte satellitaire, pour transporter de la HD, qui nécessite des débits beaucoup plus importants.
De plus, il conviendrait, pour répondre aux attentes et besoins de ses distributeurs, de disposer d'une flotte mixte, susceptible d'acheminer les programmes à la fois en SD et HD, les deux normes pouvant être exigées sur un même signal, voire dans un même pays, selon le degré de maturité des marchés et l'organisation des plans de service de chacun des distributeurs.
La chaîne devra donc se livrer à des arbitrages permanents qui feront intervenir les coûts techniques, la nécessité de conserver les gros bassins d'audience et de limiter les pertes de recettes commerciales, mais aussi des considérations en lien direct avec sa mission de promotion de la francophonie, sans compter les considérations diplomatiques qui ne manqueront pas d'interférer dans ces choix.
Nous nous demandons avec André Vallini, si un effort temporaire ne pourrait pas être assumé par les partenaires pour permettre à TV5 Monde de sécuriser sa diffusion au cours de cette période. J'ajoute que France 24 se trouvera soumise au même aléa lorsqu'elle aura effectué sa migration.
Quatrième remarque : les effectifs comme la masse salariale qui représente 30 % des dépenses totales de l'entreprise sont maîtrisés. Cette politique se poursuivra en 2014 avec une perspective de baisse des effectifs.
Cinquième remarque : pour faire face aux glissements annuels inéluctables des dépenses, TV5 Monde a dû mettre en place une série de mesures d'économies. Engagées dans le budget 2013, elles ont touché toutes les activités de la société et de manière plus pérennes sa politique de distribution (abandon du sous-titrage en polonais et la réduction de la distribution en Allemagne), et les frais techniques. L'année 2013 a également été l'occasion de rationaliser certaines opérations de sous-titrage, jusqu'ici sous-traitées auprès de TV5 Québec Canada, à des tarifs supérieurs à ceux du marché.
Le retour de France Télévisions, comme actionnaire de référence, permet à TV5 Monde de bénéficier de la puissance du groupe en s'associant à ses appels d'offres.
Enfin, sixième et dernière remarque : en 2013, le réajustement à la hausse des ressources publicitaires et le décalage de certains investissements ont permis de redonner des marges de manoeuvre en matière de programmes.
Pour 2014, le montant affecté au financement de la grille des programmes hors coûts techniques devrait progresser de 2,1 millions d'euros (+ 3,74%).
En conclusion, TV5 Monde devrait ainsi pouvoir aborder l'année 2014 de manière plus sereine qu'en 2013 pour poursuivre son activité et commencer à mettre en oeuvre les principaux objectifs de son plan stratégique. Reste à savoir si elle pourra dégager les marges de manoeuvre suffisantes pour les mener tous à bien. Le besoin de financement de ce plan (hors chaîne enfant) est évalué 1,3 million d'euros en 2015 et 4,55 millions en 2016.