Par cet amendement, il s’agit de protéger une pratique ancestrale que le texte sur la lutte contre la contrefaçon pourrait, aux yeux de certains, remettre en cause : le droit pour les agriculteurs de ressemer leur récolte.
La semence à la ferme concerne encore aujourd’hui 300 000 agriculteurs et 50 % des surfaces céréalières en France. Beaucoup d’exploitations sont fragiles, et cette possibilité de reproduire les semences est indispensable à leur équilibre.
Or, en harmonisant les procédures civiles existantes en matière de contrefaçon, le texte ouvre la possibilité de contester la légalité de la semence à la ferme. Les agriculteurs pourront voir leurs sélections saisies par les services des douanes.
Sans méconnaître la nécessité d’endiguer la contrefaçon, nous estimons que cette lutte ne doit pas conduire à assimiler les agriculteurs à des fraudeurs : ils ne font que leur métier, un métier, on le sait, difficile, et qui n’a surtout pas besoin d’être entravé par une législation retirant un droit millénaire à ceux qui l’exercent.
Le droit de resemer figure d’ailleurs à l’article 14 du règlement européen n° 2100/94, qui dispose que les agriculteurs « sont autorisés à utiliser, à des fins de multiplication en plein air dans leur propre exploitation, le produit de la récolte ».
Au-delà de la nécessité de conserver ce droit aux agriculteurs, je rappellerai également que le principe de sécurité alimentaire, auquel je suis particulièrement attaché, invite à ne pas laisser des firmes accaparer la chaîne du vivant.
Il ne m’a pas échappé, cher Richard Yung, que le texte ne porte pas directement sur cette problématique, mais, comme plusieurs de mes collègues, je souhaitais défendre un amendement d’appel. Il me semble impératif que des mesures conservatoires soient prévues – pourquoi pas dans un prochain texte sur l’agriculture ? – pour faire cohabiter les détenteurs de certificats d’obtention végétale et les agriculteurs producteurs et utilisateurs de semences.
Sur cette question, j’attends, madame la ministre, vos arguments et votre réponse, qui détermineront la suite que je donnerai à cet amendement.