Intervention de Marie-Anne Montchamp

Réunion du 27 janvier 2005 à 15h00
Droits des personnes handicapées — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixe paritaire

Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, notre pays avait besoin d'un débat de société sur le handicap. Ce débat a eu lieu ! Il a permis d'étayer chacune des avancées que les lectures successives ont apportées, en revoyant, en discutant, finalement en confortant les fondements des droits qui doivent être reconnus à nos concitoyens handicapés, afin qu'ils puissent participer à la vie sociale et vivre une pleine citoyenneté.

Je veux dire à M. le rapporteur toute l'estime, tout le respect que j'ai pour son engagement en faveur des personnes handicapées. Son rapport a largement retracé les orientations du texte que vous allez adopter aujourd'hui. A partir de ce rapport et du projet de loi présenté par le Gouvernement, un dialogue fructueux a pu s'établir entre les assemblées, avec les associations, mais aussi avec l'ensemble du corps social.

Je l'ai dit, chaque lecture a été l'occasion de nouvelles avancées. Elles sont extrêmement nombreuses et je crois qu'il est important de les rappeler brièvement.

C'est, tout d'abord, la création effective du droit à compensation, tant attendu. Avec la prestation de compensation, un nouveau type de prestation apparaît dans notre paysage social : les prestations ascendantes, qui partent de la personne, de ses besoins, de son projet de vie.

C'est, ensuite, l'amélioration des ressources des personnes, distinguée de la compensation, l'amélioration du cumul avec un revenu d'activité, mais aussi la création d'une garantie de ressources pour les personnes handicapées qui ne peuvent pas travailler.

C'est encore l'accès renforcé, affirmé, assumé à l'éducation et, en priorité, à l'éducation ordinaire - les parents ne pourront plus être tenus à l'écart des décisions qui concernent leur enfant, ce qui constitue une avancée considérable - et une meilleure articulation avec le secteur médico-social pour répondre aux projets personnalisés des enfants.

C'est aussi le principe de non-discrimination à l'emploi, qui trouve une base législative et, avec lui, le principe d'aménagement approprié des postes de travail, avec, en corollaire, la suppression de la liste des emplois exclus, l'affirmation de la règle d'un pour un qui proclame l'égalité des travailleurs handicapés avec les travailleurs dits ordinaires.

C'est également l'alignement des obligations de la fonction publique sur celles du secteur privé, avec la création d'un fonds « fonction publique ». L'Etat et les employeurs publics doivent être exemplaires.

C'est encore une meilleure articulation avec le milieu protégé, l'organisation de systèmes de passerelles qui permettront aux travailleurs handicapés d'évoluer en sécurité, le renforcement des droits des ces travailleurs en centres d'aide par le travail, les CAT.

Ce projet de loi, c'est aussi l'affirmation solennelle du principe d'accessibilité généralisée et l'organisation de son application effective par des procédures adaptées, par des sanctions fortes et porteuses de sens, par des objectifs très précis tels que le délai de dix ans, indispensable pour mettre notre société en mouvement ; l'accessibilité des transports d'ici à dix ans également ; l'accès aux sites Internet d'ici à trois ans ; l'accès aux procédures judiciaires, pour les personnes sourdes et malentendantes, par un accompagnement adapté ; l'accessibilité de l'audiovisuel aux personnes sourdes ; enfin, le lancement d'une réflexion importante sur l'audiodescription, afin que cette technologie soit mieux appréhendée.

Par ce projet de loi, la langue des signes est reconnue comme une langue à part entière alors que le choix est offert entre une éducation bilingue et une éducation en langue française uniquement.

Ce projet de loi organise aussi la simplification de l'accès aux droits avec la création de guichets uniques de proximité, les maisons départementales des personnes handicapées, que les départements piloteront.

C'est aussi, autour de la création de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, l'amorce de la création d'une cinquième branche de protection sociale.

C'est, enfin, la participation des associations et des personnes aux dispositifs qui les concernent.

Ce projet de loi n'est pas seulement marquant par les avancées qu'il contient, il l'est aussi pour les prises de position fortes et pleines de sens qu'il a permises.

Vous avez su dire non, avec le Gouvernement, à un certain nombre de points qui troublaient le sens de notre texte.

En effet, vous avez dit non à la restriction de l'accès à l'école des enfants handicapés ; vous avez dit non au principe de stricte parité entre associations d'usagers et associations gestionnaires ; vous avez dit non à des mesures qui minoraient l'effort d'accessibilité ou qui, parce qu'elles étaient irréalistes, faisaient écran à l'esprit même de la loi ; vous avez dit non à une AAH qui, alignée sur le SMIC, renvoyait définitivement pour leurs ressources les personnes handicapées au revenu de l'exclusion et vous avez préféré la création d'une compensation.

Ainsi, le véritable changement de paradigme nécessaire pour cette politique du handicap est enfin porté par ce texte. Il se traduit par deux dimensions importantes : d'abord, le projet de loi pour l'égalité des droits et des chances s'adresse à tous nos concitoyens, à nos concitoyens « ordinaires », si je puis dire, autant qu'aux personnes handicapées elles-mêmes ; ensuite, vous avez placé la personne handicapée au coeur même de cette politique, ainsi le handicap ne cache plus la personne.

C'est grâce au courage des parlementaires et à la volonté du Gouvernement que le choix a été fait d'une définition offensive du handicap, d'une définition énumérative, loin du politiquement correct, mais qui dit à l'ensemble de nos concitoyens qu'aujourd'hui, dans notre pays, le handicap c'est le handicap physique, c'est le handicap mental, c'est le handicap sensoriel, mais c'est aussi le handicap cognitif et le handicap psychique.

Il était indispensable, pour que notre regard change, pour que notre société avance, forte de ses différences, d'opérer ce changement-là ; vous l'avez fait. Ce texte nous permettra les avancées tant attendues pour les personnes handicapées.

Je conclurai, monsieur le rapporteur, en répondant très clairement à votre invitation à poursuivre le travail : je peux d'ores et déjà vous dire, mesdames, messieurs les sénateurs, que j'entends vous associer, méthodiquement, à la rédaction des textes d'application afin que ce travail se poursuive à bonne vitesse pour tenir les engagements pris par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin sur la politique en faveur des personnes handicapées.

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