Intervention de David Assouline

Réunion du 23 novembre 2013 à 14h30
Loi de finances pour 2014 — Articles additionnels après l'article 7 quater suite

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Pour moi, cette question est vraiment un combat, car, dans ce secteur, quelque chose de fondamental est en train de se jouer.

Cette fois, l’argument invoqué n’est pas financier. Non, ici, on m’oppose la conformité au droit européen.

Or le Parlement européen a voté à la grande majorité en faveur d’une modification de la directive allant dans le sens que je souhaite ; le Sénat et, je l’espère, l’Assemblée nationale vont faire de même. Tout cela va aider le Gouvernement à négocier avec la Commission européenne. Il n’y a, dans cette démarche, aucune de ces provocations à l’égard des institutions européennes qui ont pu parfois et pourraient encore nous gêner dans les négociations.

J’ai écouté tous les arguments et j’estime que, en l’espèce, nous nous appuyons à la fois sur une position majoritaire du Parlement européen et sur une exigence absolue d’équité et de rationalité portée par le Parlement français. Dans ces conditions, le Gouvernement pourra d’autant plus aisément faire bouger les lignes.

Je souhaite que mon amendement soit adopté, car il n’y a aucune raison de le contester.

Nous avons mis en place depuis longtemps, pour la presse, un taux de TVA « super réduit » – 2, 1 %, ce n’est vraiment pas grand-chose ! C'est une exception française. Nous avons estimé qu’il fallait faire un effort, non pas avec des espèces sonnantes et trébuchantes, mais par une réduction de la TVA, pour favoriser le pluralisme de l’information et aider les titres de presse à se développer.

Aujourd’hui, la presse écrite en bénéficie. Elle aurait pu s’opposer à ce que la presse en ligne – si elle avait été sa concurrente – profite de ce taux de TVA. C’était d’ailleurs presque le cas au tout début de la révolution numérique. Aujourd’hui, c’est l’inverse. Les syndicats de presse, donc de presse écrite, soutiennent unanimement un alignement sur le taux de TVA réduit. C’est que l’équilibre de la presse écrite dépend aujourd’hui de sa mutation vers le numérique.

Aujourd’hui, les journaux – prenez l’exemple du Figaro – proposent de nombreux services en ligne, notamment les petites annonces. Or les services de la presse papier sont taxés à 2, 1 %, et ceux qui sont disponibles en ligne le sont à 19, 6 %, en attendant plus.

Je conçois que la défense de la neutralité fiscale puisse se traduire à l’inverse par l’application du taux de 19, 6 % à toute la presse. Mais personne ne le propose, et certainement pas moi !

Reste que personne n’est en mesure de m’expliquer pourquoi la presse en ligne est taxée à 19, 6 %, alors que, dans la loi accordant à la presse le taux « super réduit », le support était neutre.

Je le répète, cet alignement est une condition de la mutation du secteur. La presse est confrontée à une crise profonde, qui s’explique par la révolution technologique. Soit on accompagne la mise en place du nouveau modèle économique, soit on laisse perdurer des distorsions qui feront péricliter la presse papier sans pour autant aider la presse numérique. Nous aurons ainsi perdu sur les deux tableaux !

Monsieur le ministre, mes chers collègues, je plaide vraiment en cet instant pour que le vote de la représentation nationale, au Sénat comme à l’Assemblée nationale, conforté par le vote largement majoritaire du Parlement européen, puisse aider le Gouvernement à demander une révision de la directive. Il y va de l’avenir du modèle économique de la presse, celle d’aujourd’hui, mais aussi celle de demain, qui est déjà pour beaucoup une réalité, aux États-Unis, notamment, où la presse a déjà opéré sa transition numérique.

Pourquoi faut-il toujours qu’en France nous attendions d’avoir le couteau sous la gorge ? Nous avons trop attendu pour la musique. Idem pour le cinéma, où nous avons pris du retard et nous n’avons agi que lorsque nous ne pouvions plus faire autrement. Et, pour le livre, c’est limite !

Mais, pour la presse, nous devons aller vite, car la presse, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est la démocratie !

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