Intervention de Anne-Marie Escoffier

Délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation — Réunion du 12 novembre 2013 : 1ère réunion
Audition de Mme Anne-Marie Escoffier ministre déléguée chargée de la décentralisation

Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée chargée de la Décentralisation :

Madame la présidente, Messieurs les sénateurs, je tiens tout d'abord à dire le plaisir que j'ai de me retrouver parmi vous. Afin de répondre à l'inquiétude croissante des collectivités territoriales, et notamment des départements de France, je vais faire en sorte que mon propos soit le plus clair possible.

Le projet de finances pour 2014 a été construit par le gouvernement autour d'un double objectif. D'une part, il s'agit d'équilibrer les dispositions qui, ces dernières années, ont pénalisé les collectivités territoriales. Je pense notamment au remplacement de la taxe professionnelle par la CVAE et la CFE. Ces mesures ont fait l'objet de nombreuses analyses, notamment de la part du Parlement, et le constat est clair : les collectivités territoriales qui accueillaient physiquement des industries ont été désavantagées. Je pense également aux ressources des collectivités territoriales, notamment à celles des régions. Elles doivent bénéficier de ressources dynamiques et pas seulement de dotations. D'autre part, un travail est mené avec les départements pour faire en sorte que l'effet de la hausse des charges due aux allocations de solidarité puisse trouver une compensation de financement pérenne et suffisante, c'est-à-dire qui perdure et soit suffisante pour couvrir l'effet ciseau résultant de la stabilisation des recettes provenant de l'Etat alors que les dépenses des collectivités ne cessent d'augmenter. Le groupe de travail qui a travaillé sur ce sujet, présidé par M. Vincent Léna, a montré que la projection de ces dépenses sociales en 2014, 2015 et 2016 annonçait une hausse de 16% de celles-ci. Il y a donc absolue nécessité de travailler sur ce sujet.

Le projet de loi de finances pour 2014, à partir de la situation financière actuelle, tend à imposer un effort aux collectivités territoriales, tout comme il en impose un à l'État. D'ailleurs, la loi sur la modernisation de l'action publique prend aussi bien en compte l'État que les collectivités territoriales. L'effort dont on parle, l'État l'a consenti pour sa part et les collectivités territoriales l'ont accepté au cours du débat. Cela a conduit à la signature du pacte de confiance et de responsabilité, le 16 juillet 2013, par le Premier ministre et l'ensemble des représentants des collectivités territoriales. Pour éviter toute ambigüité, je souhaite revenir sur l'effort demandé aux collectivités territoriales. On entend souvent que l'effort demandé sera de 1,5 milliard d'euros en 2014 et de 1,5 milliard d'euros en 2015, soit un total de 3 milliards d'euros. Mais, ce calcul est erroné, car il s'agit d'un « effort soclé ». L'effort de 1,5 milliard d'euros en 2014 sera repris en 2015 et augmenté de 1,5 milliard d'euros, soit 3 milliards d'euros sur deux ans auxquels s'ajoute 1,5 milliard d'euros, ce qui représente au total 4,5 milliards d'euros. Cet effort a été consenti par les collectivités, sous réserve de trouver les moyens de l'adapter à chacun des niveaux de collectivités territoriales. Cela a demandé un travail de réflexion sur la façon de fixer une répartition égalitaire entre les trois niveaux de collectivités, à proportion de leurs recettes réelles de financement. Concrètement, la région dispose de recettes réelles de fonctionnement à hauteur de 16%. Il lui sera demandé un effort de 184 millions d'euros sur les 1,5 milliard demandés. Pour le département, l'effort sera de 476 millions d'euros, soit 32% des recettes réelles de fonctionnement, et pour la commune il sera 846 millions d'euros, soit 56% des recettes réelles de fonctionnement. Cette répartition est mathématique et égalitaire, je le dis avec force. Cet effort consenti n'est pas neutre. Il représente 0,69% de la masse des recettes réelles de fonctionnement des collectivités ; ce n'est pas rien, mais ce n'est pas non plus insurmontable.

De son côté, le gouvernement va garantir un certain nombre d'avantages aux collectivités territoriales. Il va veiller à ce que la péréquation puisse être maintenue et continuer de fonctionner comme il s'y était engagé l'année dernière. Il y a deux types de péréquation : la péréquation verticale et la péréquation horizontale au niveau du bloc communal. La péréquation verticale passe par plusieurs dotations particulières, en particulier la dotation de solidarité urbaine (DSU) et la dotation de solidarité rurale (DSR). La DSU augmente de 60 millions d'euros par rapport à 2012, soit 4%. La DSR augmente également de 4%, soit 39 millions d'euros. La dotation nationale de péréquation augmente (DNP) de 10 millions d'euros. Il en est de même pour la dotation de péréquation départementale. On reste ainsi sur les bases décidées l'année dernière et donc dans le prolongement de l'engagement qui avait été pris alors. La péréquation horizontale passe par le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC), qui s'adresse au bloc communal. Elle a été réclamée dans tous les travaux menés avec les parlementaires - nous avons notamment travaillé avec les commissions des Finances, ainsi qu'avec le Comité des finances locales. Il fallait continuer à augmenter les montants consacrés au FPIC. Il passera de 360 à 570 millions d'euros en 2014. Le Fonds de solidarité des communes de la région Ile-de-France (FSRIF) passera, pour sa part, de 230 à 250 millions d'euros en 2014.

Par ailleurs, le gouvernement a été très vigilant sur la capacité d'investir des collectivités territoriales. Lorsque l'on regarde les rapports rédigés sur ce sujet, on constate certes un freinage de l'investissement des régions et des départements en 2013, mais le bloc communal a maintenu son effort. Les collectivités territoriales continuent à représenter 70% de l'investissement public. Il n'est pas question de les contraindre à réduire leur investissement local. C'est pourquoi la compensation du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) est maintenue.

Les critères de prélèvement et de reversement au titre du FPIC et du FSRIF méritent d'être revus et aménagés. Nous n'agirons que sur la base de simulations.

Nous avons choisi en ce qui concerne le FPIC de conforter le critère du revenu par habitant, qui passera de 20 à 25 %. Le plafond de ressources sera relevé de 11 à 13 % et le critère de l'effort fiscal passera - c'est la proposition du gouvernement - de 0, 75 à 0,85%. Lors de la discussion par l'Assemblée nationale de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », les députés ont porté ce chiffre à 0,9%, et ont mentionné l'objectif de le voir rapidement passer à 1 %. Le gouvernement ne s'est pas opposé à ce vote, mais a fait valoir que les simulations avaient été jusqu'à présent réalisées sur la base de 0,85 %.

Par ailleurs, le gouvernement a pris des engagements sur :

- une révision des bases locatives de la taxe d'habitation, aujourd'hui établies sur des éléments remontant à 1970. Un groupe de travail va être constitué sur ce sujet, avec l'objectif de définir de nouvelles bases, de mener une expérimentation à partir d'elles, et de généraliser leur application après 2018 ;

- une révision des modalités de calcul de la dotation globale de fonctionnement (DGF), dont une stratification de mécanismes de péréquation a rendu la compréhension difficile. Il s'agit d'un gros travail, qui sera mené en concertation avec le Parlement et avec le Comité des finances locales. Il commencera début 2014 pour s'achever durant l'année 2015.

Je voudrais enfin revenir sur question de l'évolution de la DGF en 2016 et 2017. J'ai dit dans la presse qu'il ne serait pas raisonnable de se prononcer aujourd'hui sur ce point. En effet, tout dépendra de l'impact des efforts consentis aujourd'hui pour le redressement de nos comptes.

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