Intervention de Éliane Assassi

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 27 novembre 2013 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2014 — Mission « sécurités » - examen du rapport pour avis

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi, rapporteur pour avis :

L'an dernier, j'avais souligné la rupture que représentait le budget par rapport aux cinq années précédentes. Le budget 2014 de la mission « Sécurité » confirme cette tendance. La mission rassemble maintenant les budgets de la police nationale, de la gendarmerie nationale, de la sécurité et de l'éducation routières, de la sécurité civile. À 17,6 milliards en autorisations d'engagement et 17,8 milliards d'euros en crédit de paiement, les crédits sont stables en euros courants.

Les effectifs augmentent progressivement : 243 postes de policiers et 162 postes de gendarmes seront créés en 2014. Les budgets de fonctionnement sont stabilisés et l'on pourra relancer quelques opérations d'investissement, pour le parc automobile notamment. Toutefois, le sous-investissement de ces dernières années pour le parc immobilier, qui se dégrade toujours plus, ne pourra être rattrapé par les moyens accordés. La gendarmerie ne bénéficiera que de 56 millions d'euros sur les 150 dont elle aurait besoin pour faire face aux travaux d'entretien et de maintenance lourde. J'ai été surprise par le ton très revendicatif du discours des syndicats de policiers, qui tranche fortement avec celui de l'année dernière. C'est que, malgré ce budget stabilisé, les fonctionnaires ressentent fortement le manque de moyens. Travailler ou vivre dans un environnement très dégradé a un effet certain sur le moral.

La technique à courte vue des gels et surgels de crédits va à l'encontre de toute gestion efficace du budget, et conduit les gestionnaires à engager rapidement et parfois à des conditions moins avantageuses leurs crédits.

Gendarmerie et police se sont engagées dans une démarche de mutualisation, renforcée depuis le rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur en 2009. J'ai visité le Service des technologies et des systèmes d'information de la sécurité intérieure créé le 1er septembre 2010. Il rassemble dans un service unique les structures de conception des systèmes d'information et de communication de la gendarmerie et de la police. Son commandant est un général de la gendarmerie mais tous les postes d'adjoints sont dédoublés entre les deux forces. Ce service développe des logiciels ; c'est ainsi qu'un logiciel de cartographie qui répondait à une demande précise des services opérationnels a été développé en interne en seulement quatre mois ! C'est beaucoup plus rapide et économique que de passer par un marché public, surtout pour faire ensuite évoluer les logiciels, dont certains sont proposés à la Sécurité civile. Le nouveau fichier « traitement des antécédents judiciaires » qui regroupera les fichiers STIC de la police et Judex de la gendarmerie m'a été également présenté.

L'expérimentation d'une mise en commun de la police technique et scientifique à l'échelle des départements est une réussite. La gendarmerie prend en charge tous les actes de police technique et scientifique, pour le compte des deux forces, sur son plateau technique. Les fonctionnaires qui effectuent les constations techniques et les opérations de recherche et de relevés sont indifféremment des policiers et des gendarmes. Les gendarmes peuvent désormais alimenter le fichier automatisé des empreintes digitales en utilisant la borne commune du commissariat central. Cette expérience sera étendue à trois autres départements, puis à dix autres l'année prochaine. Enfin, à compter du 1er janvier 2014, le Service d'achats des équipements et de la logistique centralisera les marchés, pour les deux forces et la sécurité civile.

Cette mutualisation, pragmatique, trouve parfois ses limites : il est difficile de faire travailler dans les mêmes services deux catégories d'agents aux statuts et rémunérations différents.

Les zones de sécurité prioritaires ont montré leur efficacité. Elles sont pilotées par deux instances : une cellule de coordination opérationnelle des forces de sécurité intérieure, qui se réunit une fois par mois sous l'autorité du préfet et, éventuellement, du procureur de la République, et une cellule de coordination opérationnelle de partenariat, qui conduit des actions de prévention. Comme pour les états-majors de sécurité, le copilotage par le préfet et le procureur de la République est efficace. Toutefois, la cellule opérationnelle de partenariat qui mène les actions de prévention fait parfois intervenir trop de personnes, ce qui diminue la pertinence de son action.

Ces crédits stabilisés en euros courants redonnent une marge de manoeuvre pour financer les moyens de fonctionnement des forces mais cela ne fait pas un budget à la hauteur de toutes les attentes. La question de l'immobilier aurait mérité une meilleure prise en compte, car les besoins sont très importants.

Sous le bénéfice de ces observations, je m'en remets à la sagesse de la commission pour déterminer s'il faut adopter ce budget.

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