Intervention de Vincent Monadé

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 3 décembre 2013 : 1ère réunion
Audition de M. Vincent Monadé président du centre national du livre cnl

Vincent Monadé :

S'agissant du réseau Chapitre, nous avons finalisé cinq dossiers sur 55 et comptons des repreneurs potentiels pour quatre à cinq librairies. Le groupe Gallimard se déclare fortement intéressé par une librairie à Nancy. Le groupe Albin Michel réfléchit à son intervention, ce qui constituerait pour lui une nouveauté. J'ai appris aujourd'hui que la Fnac pourrait détenir quelques magasins en franchise. Mais nous manquons globalement de repreneurs pour les librairies. Ce constat s'amplifiera lorsqu'il s'agira de remplacer la génération de libraires issus de la loi Lang. Nous avons donc un véritable problème et le fait de dire que ce métier va mal n'aide pas à susciter des vocations.

Sans vouloir être désagréable avec l'actionnaire américain de Chapitre, je pense que l'on nous force un peu la main en nous poussant à reprendre des magasins, sans étudier réellement les dossiers, de façon à éviter un plan social global qui lui coûterait très cher. Alors que de très grandes librairies vont entrer progressivement en cession - Sauramps à Montpellier, Ombres blanches à Toulouse, Folie d'encre à Montreuil - nous ne pouvons épuiser nos fonds à sauver l'ensemble des librairies du réseau Chapitre. Si nous étions allés au bout d'une procédure de liquidation ordinaire, les magasins auraient été repris projet par projet. Dans le cas présent, on tente de nous influencer, au nom de la défense de la librairie indépendante, argument auquel je ne peux croire. C'est, en effet, précisément parce que le groupe Chapitre a cessé de faire de ses librairies des librairies indépendantes qu'il est aujourd'hui en cessation d'activité : il a centralisé les commandes et fait exactement ce qu'il ne fallait pas faire. Ceci a déjà conduit Virgin à l'échec et y entraînera demain tous ceux qui fonctionnent ainsi.

Une librairie n'est viable que si le libraire affiche une sélection claire, prend des risques, des positions littéraires, quelles qu'elles soient, générant ainsi des commandes différenciées. Il n'existe pas de contre-exemple à ce fonctionnement.

Le groupe Chapitre a beau jeu de dire qu'il veut défendre la librairie, alors qu'il souhaite surtout éviter des coûts supplémentaires à l'actionnaire. Je peux certes le comprendre : France Loisirs, notamment, qui fait partie du même groupe, a déjà beaucoup soutenu les librairies Chapitre. La situation n'en n'est pas moins préoccupante : il ne faudrait pas que nous soyons poussés à soutenir des projets qui ne reculeraient que de huit mois une fermeture inéluctable.

Quant à la question du label LiR, le critère essentiel est celui du personnel, qui doit représenter 12,5 % des charges. C'est un critère vital pour les grandes librairies. Il convient de le maintenir, voire le renforcer pour celles-ci, de façon qu'elles recrutent et paient leurs salariés dans un marché très contraint. Beaucoup de vendeurs de grandes librairies possèdent des masters et ne gagnent sans doute pas ce qu'ils pourraient gagner en exerçant d'autres professions.

Pour les petites librairies, en revanche, il est évident qu'il faut assouplir ces critères. Nous avons commencé à le faire. Un libraire qui travaille seul avec un apprenti, qui ne se salarie pas toujours, n'est pas éligible, alors que son travail est parfois exceptionnel. J'ai donc l'intention de proposer une réforme du label - qui ne dépend pas que de moi - en fonction du chiffre d'affaires : si la librairie est petite, elle pourra obtenir le label, même si elle ne répond pas au critère relatif au personnel.

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