Intervention de Véronique Nahoum-Grappe

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 5 décembre 2013 : 1ère réunion
Violences à l'égard des femmes dans les territoires en conflit — Table ronde des historiens et de l'anthropologue

Véronique Nahoum-Grappe, ingénieure de recherche en anthropologie à l'EHESS et au CNRS :

La solitude et la souffrance des victimes de viol sont aussi graves en temps de paix qu'en temps de guerre.

Le silence qui entoure les viols est d'autant plus flagrant que, depuis une vingtaine d'années, un changement s'est produit dans les séries télévisées et les livres : le méchant est désormais un criminel violeur qui apparaît d'entrée de jeu. Ce n'était pas le cas dans Maigret, Chandler ou Peter Cheyney. Il y a une surreprésentation de la violence sexuelle.

Quatre plaintes de femmes tutsies ont été déposées contre l'armée française et suivent leur cours. L'avocate de ces femmes m'a dit quel était leur isolement et leur dénuement. Il faut les aider !

Enfin, pour définir le viol, il faut revenir au terme de torture. Toute torture est un viol, tout viol est une torture. Le viol est également un crime continu : le violeur laisse la vie sauve à la victime, mais son acte continue de produire de la souffrance : risque de grossesse, honte, contamination par le sida. Par un effet pervers, cette douleur peut augmenter avec le temps, comme en Afrique, dans la région des Grands lacs, où les bourreaux bénéficient de la trithérapie - ce qui, d'ailleurs, est à l'honneur de l'ONU - alors que les victimes sont chassées de leurs villages.

Mme Raphaëlle Branche, historienne, maîtresse de conférences au Centre d'histoire sociale du XXème siècle de l'Université de Paris-1-Panthéon-Sorbonne. - En temps de guerre, les femmes sont violées parce qu'elles appartiennent à un groupe. En temps de paix, elles sont isolées. Au Bangladesh, il est arrivé que des femmes violées soient célébrées comme héroïnes de la nation : une forme d'apaisement est tirée de ce discours collectif et public. Il n'existe rien de tel pour les femmes violées en temps de paix.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion