du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire. Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je vous prie tout d’abord de bien vouloir me pardonner d’avoir pris un peu de liberté avec le déroulement habituel de nos discussions législatives qui veut que les rapporteurs pour avis s’expriment en début de discussion générale. Je vous remercie de votre indulgence.
La commission du développement durable s’est saisie pour avis du projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier et à sécuriser la vie des entreprises.
L’objectif de ce texte, comme l’ont rappelé la plupart des orateurs, est d’alléger les charges administratives pesant sur les entreprises afin de renforcer leur compétitivité et de faciliter la vie de nos entrepreneurs. Plusieurs dispositions concernent directement la modernisation du droit de l’environnement et des procédures d’autorisation environnementale : nous nous en sommes donc saisis. Deux sujets complémentaires intéressent notre commission : le Grand Paris et la signalétique apposée sur les produits recyclables.
Avant d’entrer dans l’analyse du dispositif, je ferai une remarque sur la méthode : si le Gouvernement a choisi de recourir aux ordonnances de l’article 38 de la Constitution, c’est pour gagner plusieurs mois en pratique. Cette volonté n’est pas anecdotique au regard de l’objectif du texte, qui est de simplifier sans tarder notre droit, sans pour autant sacrifier, c’est du moins la position de la commission du développement durable, les exigences environnementales.
Au-delà de la méthode, peu critiquable en l’espèce, l’enjeu réside dans l’amélioration du suivi de l’habilitation par le Parlement. C’est pourquoi je me félicite que le Gouvernement, comme il s’y était engagé, et comme il l’avait d’ailleurs déjà fait à l’occasion de l’examen du projet de loi l’habilitant à légiférer par ordonnances sur la participation du public aux décisions ayant une incidence environnementale, ait effectivement transmis à notre commission, en fin de semaine dernière, les projets d’ordonnance préparés en application des articles 13, 14 et des articles additionnels après l’article 14. C’est de bonne pratique !
La transmission des projets d’ordonnance aux commissions parlementaires compétentes devrait être de nature à dissiper une grande partie des inquiétudes de ceux de nos collègues qui s’interrogent sur la place du Parlement dans une telle procédure.
Notre commission a reçu de la commission des lois une délégation au fond pour l’examen de l’article 8 sur le Grand Paris et de l’article 16 sur la signalétique des produits recyclables. Nous nous sommes par ailleurs saisis pour avis de l’article 9 sur les obligations de reporting social et environnemental des mutuelles et des articles 13 et 14 relatifs à l’expérimentation d’un permis environnemental unique pour les entreprises.
Je commencerai donc par la présentation des articles qui nous ont été délégués au fond.
L’article 8 tend à autoriser le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance plusieurs mesures relatives au Grand Paris, qui apparaissent comme la conséquence logique du discours du Premier ministre du 6 mars dernier.
Cet article vise à permettre à la Société du Grand Paris de financer ou d’exercer la maîtrise d’ouvrage de projets d’infrastructure destinés à offrir des correspondances avec le réseau de transport public du Grand Paris et à étendre au Syndicat des transports d’Île-de-France la possibilité de lui confier toute mission d’intérêt général en lien avec ses compétences. Le Gouvernement est enfin habilité à déterminer la procédure de modification du schéma d’ensemble du réseau de transport public du Grand Paris.
Notre commission a estimé que la détermination de la procédure de révision du schéma d’ensemble constituait un enjeu tel que le Parlement ne pouvait être dessaisi de son élaboration et n’a donc pas adopté l’article 8, ce que je regrette, car il s’agissait simplement de combler un vide juridique. En effet, la loi relative au Grand Paris ne prévoit pas de procédure de révision du schéma. Or il est apparu en début d’année que des ajustements pouvaient se révéler nécessaires. Le Conseil d’État avait d’ailleurs lui-même recommandé de prévoir clairement une telle procédure.
L’article 16, sur lequel la commission du développement durable était également saisie au fond, est un article non pas d’habilitation, mais bien de législation directe. Il vise à reporter du 1er janvier 2012 au 1er janvier 2015 l’obligation de mettre en place une signalétique commune, à savoir le fameux logo « Triman », sur les produits recyclables soumis à un dispositif de tri. Il n’aura échappé à personne que le 1er janvier 2012 est déjà derrière nous et que nous devons donc donner au Gouvernement un délai supplémentaire pour l’élaboration d’un décret qui aurait déjà dû être pris depuis près de deux ans.
L’objectif de cette disposition, issue du Grenelle 2, est d’harmoniser les marques de recyclage des produits mis sur le marché afin de simplifier le geste de tri. Les quantités de produits recyclés doivent en être accrues, pour un plus grand bénéfice environnemental, et les erreurs de tri réduites, pour un plus grand bénéfice économique des collectivités.
La commission du développement durable a adopté trois amendements identiques qui aboutissent tous à supprimer purement et simplement le dispositif « Triman » tel qu’il était organisé dans la loi Grenelle 2. Cette solution consistant en la suppression d’une partie de cette loi m’a semblé un peu radicale et je crains que d’autres parlementaires n’en aient été aussi frustrés, puisque de nombreux amendements avaient été déposés pour aménager ce fameux article. Nous n’avons malheureusement pas pu les examiner, car ils sont tous tombés en raison de l’adoption des amendements les plus radicaux.
C’est pour cette raison que j’ai choisi de cosigner un amendement rétablissant le dispositif, tout en prévoyant une exemption pour le verre. On peut en effet estimer que la recyclabilité du verre est bien connue des citoyens, le recyclage des bouteilles et autres pots et bocaux de confiture étant aujourd’hui assez performant, même s’il peut toujours être amélioré. En revanche, l’usager, devant ses poubelles, a parfois quelques interrogations sur la destination de l’emballage qu’il doit jeter : il cherche alors des indications qu’il ne trouve pas, puisqu’il n’y a pas, à l’heure actuelle, d’harmonisation de la signalétique ; perplexe, il choisit l’une ou l’autre des poubelles, mais se trompe souvent, au point que le coût des erreurs de tri est évalué à 241 millions d’euros par an pour les collectivités territoriales.
Néanmoins, s’il est un produit sur lequel l’usager ne se trompe pas, c’est le verre, tout le monde sachant où le jeter. Il m’a donc semblé utile de vous proposer de rétablir le dispositif « Triman » en en excluant le verre.
J’en arrive aux articles dont notre commission s’est saisie pour avis.
L’article 9 vise à assouplir les obligations des mutuelles et des établissements de crédit en matière de reporting social et environnemental. Depuis la loi de 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, le code de commerce prévoit que les sociétés cotées doivent inclure des informations sur la manière dont elles prennent en compte les conséquences sociales et environnementales de leur activité dans leur rapport annuel.
La loi Grenelle 2 a étendu, en 2010, cette obligation aux sociétés non cotées, aux coopératives, aux sociétés d’assurance, ainsi qu’aux mutuelles dont le total de bilan ou le chiffre d’affaires et le nombre de salariés excèdent certains seuils. Initialement, donc, seules les mutuelles dépassant ces seuils étaient tenues d’inclure des informations à caractère social et environnemental dans leur rapport de gestion. Cependant, la loi de régulation bancaire de 2010 a supprimé – manifestement par erreur, le législateur s’étant peut-être égaré, dans un accès de radicalisme ou d’insouciance – le renvoi aux conditions de seuils. En l’état du droit, les mutuelles et les établissements de crédit sont donc soumis à des obligations plus strictes que les sociétés non cotées, ce qui paraît tout à fait anormal.
L’article 9 vise donc à rétablir le dispositif initial en introduisant de nouveau la référence aux seuils pour l’application de l’obligation de reporting social et environnemental aux mutuelles, conformément au droit commun. Notre commission a émis un avis favorable sur l’adoption de cet article.
Les articles 13 et 14 du projet de loi visent à mettre en place, à titre expérimental et dans certaines régions, deux procédures simplifiées innovantes destinées à faciliter la réalisation de projets d’activité économique sans diminuer les exigences environnementales.
Ces deux dispositifs découlent de propositions formulées lors des états généraux de la modernisation du droit de l’environnement ; elles vont dans le sens de l’instauration d’un permis environnemental unique, qui permettra, à terme, de mieux articuler les procédures des autorisations environnementales et des autorisations d’urbanisme, et ainsi de simplifier les démarches administratives des porteurs de projets.
Plus précisément, l’article 13 prévoit que les porteurs d’un projet d’activité économique soumis à certaines autorisations administratives régies par les dispositions du code de l’environnement, du code forestier ou du code de l’urbanisme se verront délivrer un certificat de projet.
Ce document comportera un engagement de l’État sur la liste des autorisations nécessaires pour réaliser le projet, notamment celles qui résultent des trois codes que je viens d’énumérer. Il mentionnera également si le projet doit être soumis à une étude d’impact et, dans l’affirmative, quel est le degré de précision des informations qui devront figurer dans cette étude. Enfin, le certificat de projet pourrait valoir engagement de l’administration en ce qui concerne le délai d’instruction des autorisations sollicitées, afin de garantir aux porteurs de projets un délai de traitement raisonnable.
En outre, dans l’une au moins des régions sélectionnées pour l’expérimentation, le certificat de projet pourra valoir certificat d’urbanisme.
Ce document pourra aussi comporter une garantie du maintien en vigueur, pendant une durée déterminée, des dispositions législatives et réglementaires relatives aux autorisations sollicitées. De cette manière, les entreprises concernées pourront bénéficier d’une forme de cristallisation, ou de sanctuarisation, de la réglementation.
La rédaction initiale de l’article 13 ne mentionnait pas les conditions dans lesquelles des recours pourraient être formés contre les certificats de projet ; un amendement du Gouvernement, adopté par la commission des lois, a permis de combler cette lacune.
De fait, il faut éviter que la création de ce document, inspirée par la volonté de simplifier, ne conduise à une multiplication des contentieux. C’est pourquoi les dispositions adoptées sur l’initiative du Gouvernement déterminent les conditions dans lesquelles des recours pourront être introduits, afin de maîtriser les contentieux.
La commission du développement durable a émis un avis favorable sur l’adoption de l’article 13 ainsi complété.
Quant à l’article 14, il prévoit une expérimentation similaire pour les installations classées pour la protection de l’environnement, les ICPE, soumises à autorisation.
Aujourd’hui, les porteurs d’un projet relatif à une ICPE doivent parfois déposer jusqu’à cinq demandes différentes : une demande d’autorisation en application de la réglementation des ICPE, une demande de dérogation au titre des règles relatives à la faune et à la flore protégées, une demande de permis de construire au titre du code de l’urbanisme, une demande d’autorisation de défrichement en application du code forestier et une autorisation d’exploiter au titre du code de l’énergie. Vous me concéderez, mes chers collègues, qu’il faut une grande énergie pour suivre l’ensemble de ces procédures !
De surcroît, ces demandes, instruites par des services de l’État différents, aboutissent plus fréquemment qu’il ne faudrait à des décisions divergentes. Aussi l’article 14 prévoit-il, en particulier pour les installations de production d’énergie renouvelable, l’expérimentation d’une procédure unique conçue autour de la procédure d’autorisation relative aux ICPE, laquelle intégrera l’ensemble des autorisations requises au titre des codes que je viens de mentionner. L’objectif est d’accélérer et de rationaliser des procédures multiples, longues et parfois redondantes. Notre commission a émis un avis favorable sur cet article.
J’ajoute qu’il faudra sans doute compléter l’expérimentation de cette procédure par une réflexion sur le délai de caducité des autorisations relatives aux ICPE. En effet, pour une installation éolienne, le délai de raccordement au réseau peut atteindre aujourd’hui huit ans, alors que l’autorisation devient caduque au bout de trois ans si des travaux significatifs n’ont pas été entrepris. Ce frein juridique retarde le développement de la filière.
Si la jurisprudence du Conseil constitutionnel n’encadrait pas aussi sévèrement notre droit d’amendement en ce qui concerne les projets de loi d’habilitation, j’aurais volontiers déposé un amendement visant à lever les obstacles liés à la caducité, lorsque le porteur de projet n’est pas en cause.
Dans l’ensemble, mes chers collègues, ces mesures de simplification vont dans le bon sens. Reste qu’il y a encore beaucoup à faire pour moderniser le droit de l’environnement.
La feuille de route issue des états généraux de la modernisation du droit de l’environnement comportait trois objectifs : mieux choisir et élaborer les règles du droit de l’environnement, accélérer et faciliter la réalisation des projets respectueux de l’environnement et mieux réparer et sanctionner les atteintes à l’environnement.
Le deuxième objectif est largement mis en œuvre par les articles 13 et 14 du projet de loi, ainsi que par les articles additionnels introduits dans le texte de la commission sur l’initiative du Gouvernement.
En revanche, il est urgent de procéder, au niveau national, à une évaluation du droit existant et de ses incidences. Une réflexion devrait aussi être lancée sur les règles du droit de l’Union européenne, afin d’identifier les textes européens qui nécessiteraient une simplification. Notre collègue Alain Richard m’écoute avec attention, …