Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 9 décembre 2013 à 16h00
Simplification et sécurisation de la vie des entreprises — Article 12, amendement 5

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Monsieur le président, cette intervention vaudra défense de l’amendement n° 5 rectifié, ce qui nous permettra de gagner un peu de temps !

Avec l’article 12, le Gouvernement nous demande de donner compétence à la Banque centrale européenne, d’une part, pour assurer le bon fonctionnement du secteur financier en Europe – et, bien sûr, en France particulièrement – en veillant à ce que nos banques respectent les normes prudentielles contenues dans les fameux accords de Bâle III, et, de l’autre, pour garantir la liquidité des marchés.

Dans les faits, il s’agit d’achever l’union bancaire, dont certains sont convaincus qu’elle est la seule à même d’éviter à notre pays de connaître de nouveau les affres qu’il a subies en 2008.

Mes chers collègues, un problème ne s’en pose pas moins : il y a de fortes chances pour que l’union bancaire conduise à structurer encore un peu plus un secteur déjà largement marqué par les alliances et les regroupements, comme l’a montré, par exemple, la campagne de privatisations des banques dans notre pays.

Nombre des établissements qui se sont vu appliquer les lois de 1986 et 1993 ont disparu. Faut-il rappeler ici le cas du Crédit lyonnais, qui a depuis été rebaptisé « LCL » et qui, comme d’autres banques, a été rétrogradé en sous-réseau de réseaux plus importants ? Souvenez-vous également de Dexia, ancienne Caisse d’équipement des collectivités locales, ex-Crédit local de France, dont la privatisation a été des plus désastreuses. Il est d’ailleurs probable que le coût final de cette opération se révélera au total plus élevé que le montant constaté pour l’opération de défaisance du Lyonnais, que nous allons prochainement solder.

Toutefois, l’union bancaire par ordonnance, que l’on nous propose en quelque sorte via le présent texte, ne résout pas l’essentiel du problème. Les établissements de crédit en Europe n’ont pas tous les mêmes finalités, la même culture et la même influence systémique. Pour l’heure, ce que l’on nous propose, c’est une forme de modélisation qui risque, une fois de plus, de favoriser les visées et les orientations purement financières au détriment de l’intermédiation utile à l’économie.

Quand on voit, en particulier, ce que les banques françaises ont pu faire des ressources que la BCE leur a accordées au titre de leur refinancement, on se dit qu’il aurait fallu, à tout le moins, débattre concurremment de l’union bancaire et de la place réelle des banques dans l’économie, en accordant la même importance à chacun de ces deux enjeux.

La simple lecture du rapport de la commission d’enquête sur le rôle des banques dans les circuits de la fraude et de l’évasion fiscales montre assez que, derrière les belles intentions affichées à l’article 12, demeurent bien des zones d’ombre et des interrogations en suspens. Et pouvons-nous continuer à déplorer que de nouvelles entreprises fassent chaque jour faillite, faute d’avoir pu accéder à des crédits bancaires au moment où elles en avaient besoin ?

Pour toutes ces raisons, et compte tenu du nécessaire débat que notre pays doit consacrer à la finance et à la banque, nous ne pouvons que vous inviter, mes chers collègues, à supprimer cet article.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion