Intervention de Gérard Larcher

Réunion du 10 décembre 2013 à 15h00
Programmation militaire pour les années 2014 à 2019 — Adoption définitive en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Gérard LarcherGérard Larcher :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous venons d’avoir un débat sur la situation en République centrafricaine et l’intervention de nos soldats dans ce pays. C’est la démonstration, s’il en était besoin, que notre défense nationale est bien le bras armé de notre diplomatie. C’est l’ultime preuve, s’il en fallait une, que notre armée est la première garantie de notre crédibilité et, à ce titre, le gage de notre siège de membre permanent au Conseil de sécurité des Nations unies.

Hasard du calendrier, la résolution 2127 a été votée la veille du sommet de l’Élysée pour la paix et la sécurité en Afrique.

En 1994, sur l’initiative du président Mitterrand, se tenait à Biarritz un sommet franco-africain où il était déjà question de forces d’intervention rapide en Afrique.

Qu’en est-il aujourd’hui, près de vingt ans plus tard et quelques heures avant le vote d’une loi de programmation militaire qui nous apparaît d’ailleurs sous-dotée au regard de nos ambitions concrètes sur la scène diplomatique ?

Comme l’ont fait les orateurs précédents, je veux ici saluer le courage et le comportement exemplaires de nos soldats sur différents théâtres d’opérations. Bien sûr, nous partageons tous l’hommage que le président du Sénat a rendu aux deux militaires tombés pour la paix à Bangui.

En tout cas, alors que nous allons avoir à nous prononcer sur ce projet de loi de programmation militaire, la réalité géopolitique nous rattrape et c’est elle qui doit nous guider dans notre vote. La France, par ses valeurs et par son attachement à la paix dans le monde, ne veut et ne peut déroger à ses obligations morales et humanitaires. Or, pour assumer notre rôle sur la scène internationale, il faut que nous ayons les moyens financiers, humains et industriels correspondants. C’est bien à cette équation aux inconnues multiples que doit répondre une loi de programmation militaire.

Certes, vendredi, le Président de la République a déclaré que l’Afrique devait assurer elle-même sa sécurité, mais force est de constater que les premiers, encore et toujours, à être sur place pour protéger les populations civiles, ce sont les soldats français, aux côtés de ceux de l’Union africaine.

Quels qu’aient été les discours prononcés vendredi dernier à l’Élysée – j’y étais – par les présidents Barroso et Van Rompuy, on ne peut que constater l’absence, sur le terrain, de nos alliés européens, qui laissent la France seule en Centrafrique, à quelques jours d’un Conseil européen consacré à la défense.

Une fois de plus, comme lors de l’opération Serval, nos alliés n’engagent pas leurs forces sur cette terre africaine qui ne leur est pourtant pas étrangère, comme le rappelait Jacques Legendre, puisque beaucoup de ces pays ont avec elle des liens historiques et culturels, des liens qui remontent bien plus loin que le passé récent ! §Pourtant, nul parmi eux ne remet en cause la légitimité de cette opération pour prévenir crimes de guerre et crimes contre l’humanité.

Je ne reviendrai ni sur la quantité ni sur la qualité des travaux réalisés au sein de notre commission depuis plus d’un an ; elles sont incontestables, et je voudrais à cet égard remercier le président et nos collègues de toute sensibilité, nombreux à être présents cet après-midi, qui se sont engagés sur le dossier. J’observe cependant, pour le regretter, que cette nouvelle loi de programmation militaire ne bénéficiera qu’assez peu de ces travaux, en dépit de nos efforts de concertation qui ont permis au projet de loi amendé d’arriver à l’Assemblée nationale.

Il me semble que ce projet de loi de programmation militaire est de fait, avant même son adoption, déjà dépassé au regard des objectifs visés.

Monsieur le ministre, je sais que, ces derniers jours, vous parcourez les garnisons et les quartiers militaires, vous préoccupant de la vie quotidienne de nos militaires, ce qui est indispensable et urgent eu égard à l’ambiance actuelle ; le compte rendu du Conseil supérieur de la fonction militaire du mois de juin dernier en témoigne.

Pourtant, dans le même temps, le Gouvernement décide de priver le ministère de la défense de plus de 820 millions d’euros sur la fin de gestion de son budget pour 2013, prétendument sanctuarisé. Cette ponction s’impute en quasi-totalité sur les crédits d’équipement, représentant 10 % de ces derniers hors dissuasion, celle-ci étant heureusement sanctuarisée.

Vous nous avez déclaré pouvoir obtenir, si besoin était, des ressources exceptionnelles en 2014 pour compenser ce prélèvement. Mais d’où viendront-elles et comment pourront-elles être utilisées puisque les contraintes d’emploi de telles ressources sont écrasantes ?

Cette loi de programmation militaire n’est-elle donc pas déjà caduque, victime des différents projets de loi de finances initiale et rectificative qui se succèdent ?

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