Intervention de André Vallini

Réunion du 10 décembre 2013 à 15h00
Programmation militaire pour les années 2014 à 2019 — Adoption définitive en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de André ValliniAndré Vallini :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre environnement stratégique est de plus en plus incertain et, si les conflits changent de visage, ils n’autorisent aucun relâchement dans notre politique de sécurité et de défense.

C’est pourquoi la France n’a jamais cessé d’être vigilante et qu’elle prend ses responsabilités chaque fois que cela s’avère nécessaire. Elle le montre au Mali depuis bientôt un an et elle le prouve en République centrafricaine depuis la semaine dernière.

Lors d’un déplacement à l’ONU de la commission des affaires étrangères, en octobre dernier, nous avons pu mesurer avec Christian Cambon, Leila Aïchi et Jean-Marie Bockel à quel point, dans les milieux internationaux, on fait souvent la différence entre la pusillanimité de Barack Obama sur la Syrie et la réactivité de François Hollande sur le Mali.

J’ajoute que, si les Français savaient mieux ce qu’est l’image de la France sur la scène internationale, ils seraient beaucoup plus fiers de leur pays.

Alors, pour que la France reste digne de son histoire et lucide face à son avenir, le projet de loi de programmation militaire que nous discutons ce soir doit lui garantir les capacités militaires nécessaires à sa sécurité comme à ses responsabilités internationales.

C’est un texte d’équilibre, qui vise à moderniser notre modèle de défense en l’adaptant aux nouvelles donnes stratégiques et qui doit permettre à la France de respecter ses engagements internationaux tout en assumant ses trois missions fondamentales : la protection du territoire, la dissuasion et la capacité d’intervention extérieure.

Mais si tout cela est possible, c’est évidemment au prix d’un effort budgétaire très important pour la France.

Monsieur le ministre, nous débattrons demain dans cet hémicycle de l’Europe de la défense, et nous aurons l’occasion de vous dire que, pendant que le monde est en train de réarmer – je pense à la Chine, à l’Inde, au Brésil, à la Russie –, l’Europe, elle, ne doit pas désarmer. Le sommet européen de la semaine prochaine doit donc être l’occasion de relancer l’Europe de la défense en adoptant une « feuille de route » dans les domaines opérationnel, capacitaire, industriel et même institutionnel.

Il faut des mesures pragmatiques, bien sûr, mais il faut aussi une vision et une ambition. Pour que l’Europe ne se résume pas à un grand marché, elle doit avoir une défense autonome si elle souhaite devenir, enfin, une grande puissance à l’échelle du monde.

Mais en attendant l’Europe de la défense, la France ne peut continuer à faire autant d’efforts sans que ces efforts soient reconnus par ses partenaires européens, y compris sur le plan budgétaire.

C’est en effet au nom de nos valeurs communes que nous allons combattre au Mali ou en Centrafrique. Et c’est dans l’intérêt de l’Europe tout entière que nous sommes intervenus en Libye ou que nous pourrions, demain, agir en Syrie.

Cet effort, notamment dans ses implications financières, n’est pas reconnu comme il convient par l’Europe, d’autres l’ont dit avant moi cet après-midi : le président Carrère, François Rebsamen, Jean-Pierre Chevènement. Nous devons donc agir pour que Bruxelles desserre l’étau de nos finances publiques en déduisant les dépenses militaires du calcul du déficit autorisé.

Cette déduction pourrait être partielle, bien sûr, et elle devrait être définie en fonction de critères à préciser. Le pourcentage de PIB consacré à la défense, par exemple, pourrait être pris en compte. D’autres solutions existent. Je sais que c’est difficile, vous l’avez dit tout à l’heure, monsieur le ministre, en réponse à François Rebsamen, mais il faut absolument aller dans cette direction. Il est en effet plus facile, pour un pays, d’être exemplaire sur le plan budgétaire, compétitif sur le plan industriel et excédentaire sur le plan commercial quand on est passif, pour ne pas dire inexistant, sur la scène internationale.

Monsieur le ministre, la France assume trop souvent seule le rôle qu’on serait en droit d’attendre de l’Europe.

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