Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, le collectif de fin d’année, pour lequel nous nous retrouvons dans le cadre de cette nouvelle lecture, est un exercice classique.
Pour le Gouvernement, qui s’est engagé sur ce point, ce texte traduit le strict respect en exécution budgétaire des dépenses initialement autorisées par le Parlement.
C’est un objectif central de notre politique budgétaire : nous avons la volonté de faire en sorte que le redressement des comptes soit une réalité, et pour cela nous nous attachons inlassablement à maîtriser la dépense publique. C’est ce qui nous permet de réduire de manière significative et régulière le déficit public depuis notre prise de fonctions. Semaine après semaine, nous accomplissons ce travail, contrairement à ce que certains avaient prédit.
Je souhaite ainsi, en introduction à nos débats, souligner deux points : le respect strict de l’autorisation de dépense votée par le Parlement et, plus généralement, la maîtrise de la dépense, avec son corollaire, la réduction continue des déficits.
Le volet budgétaire montre que la dépense est tenue. Ce projet de loi de finances rectificative permet de confirmer et de documenter le strict respect de la dépense de l’État. L’ensemble des mouvements de crédits que nous vous présentons à travers le projet de loi de finances rectificative et le décret d’avance permettent un strict respect de la norme de dépense.
Les bons résultats en matière de réduction des déficits publics qu’il m’appartient de vous présenter aujourd’hui sont permis par une stricte maîtrise des dépenses publiques, comme nous l’avions déjà indiqué au moment de la présentation du projet de loi de finances pour 2014.
Tel est bien l’objet de ce projet de loi de finances rectificative : opérer les mouvements de crédits nécessaires pour financer les besoins impératifs, tout en veillant au strict respect du total des dépenses autorisées par le Parlement.
Les ouvertures de crédits n’affectent en rien l’équilibre budgétaire, car elles sont entièrement compensées, au sein de l’enveloppe « zéro valeur », par des annulations équivalentes portant à hauteur de 90 % sur des crédits mis en réserve.
Le Gouvernement réalise 3, 2 milliards d’euros d’annulations de crédits pour couvrir les ouvertures de crédits auxquelles il procède : les surcoûts liés au prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne à hauteur de 1, 1 milliard d’euros ; le surcoût des OPEX, les opérations extérieures, à hauteur de 0, 6 milliard d’euros ; les priorités que constituent pour nous l’emploi et la lutte contre la pauvreté, avec l’hébergement d’urgence, pour un total de 0, 3 milliard d’euros ; plusieurs dépassements à hauteur de 0, 8 milliard d’euros – une moitié sur la masse salariale et l’autre sur les aides personnelles au logement, compte tenu d’une conjoncture moins bonne que prévu ; enfin, l’aide médicale d’État.
Ces annulations conduisent à revoir à la baisse les dépenses des ministères de 1, 1 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale de 2013.
Pour faire face à ces dépassements – au surcoût du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne, mais également aux annonces nouvelles en matière de lutte contre la pauvreté de janvier 2013 –, nous avions pris, dès le début de l’année, des mesures de précaution.
Nous avons mis en place un surgel de crédits de 2 milliards d’euros, portant ainsi la réserve initiale hors masse salariale de près de 6 milliards d’euros à près de 8 milliards d’euros.
À la différence des années passées, mais comme l’année dernière à compter du mois de mai, aucun « dégel » de crédits n’a été autorisé durant l’année avant que nous n’ayons stabilisé notre fin de gestion : c’est là une gestion exemplaire qui a été mise en place. Seuls les crédits strictement nécessaires et urgents ont été dégelés. Ainsi, au 31 octobre dernier, la réserve s’élevait à 7, 4 milliards d’euros, en baisse de 0, 5 milliard d’euros uniquement par rapport à la réserve initiale.
La mise en place de cette réserve supplémentaire et l’absence de dégel sur la réserve initiale ont été un signal déterminant auprès de tous les gestionnaires, afin d’assurer un pilotage exemplaire de leurs crédits, permettant de programmer ab initio leurs dépenses sur la seule enveloppe dont ils étaient certains de disposer, tout en réservant les crédits permettant le financement en gestion des aléas et des priorités sur leur programme budgétaire et, le cas échéant, au-delà.
C’est ainsi, mesdames, messieurs les sénateurs, grâce à une gestion exemplaire que nous sommes en mesure de vous présenter un projet de loi de finances rectificative qui permet le respect de la norme de dépense.
Sur le reste de la dépense que nous pilotons, les résultats sont, là aussi, au rendez-vous. En effet, nous avions revu à la baisse, de 0, 5 milliard d’euros, au moment du dépôt du projet de loi de financement de la sécurité sociale, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM 2013. Au fil des débats, nous avons durci cet objectif de 0, 15 milliard d’euros : c’est, au total, près de 0, 7 milliard d’euros de moins que l’objectif initialement voté.
Il est vrai que nous allons aussi vers une réduction continue des déficits. Cette maîtrise stricte et rigoureuse de la dépense participe de la réduction des déficits.
Le projet de loi de finances rectificative pour 2013 confirme en effet les prévisions déjà présentées dans le cadre de la nouvelle prévision pour 2013 associée au projet de loi de finances pour 2014 : une croissance de 0, 1 % et un déficit public pour 2013 de 4, 1 % du produit intérieur brut, en réduction de 0, 7 point de PIB par rapport à 2012.
J’ajoute que le Haut Conseil des finances publiques, saisi sur le projet de loi de finances rectificative, a de nouveau indiqué que la prévision de croissance retenue pour 2013 était réaliste et la prévision de déficit public, plausible.
Je tiens à rappeler que, n’en déplaise à l’opposition, il n’y a pas de dégradation des déficits publics, mais, au contraire, une réduction continue de ces derniers depuis que le Gouvernement est en place. Je rappelle la progression, dates à l’appui : 5, 3 % de déficit public en 2011, 4, 8 % en 2012, lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités ; 4, 1 % en 2013. Et le budget que nous vous avons présenté pour 2014 doit nous permettre d’atteindre un objectif de déficit nominal de 3, 6 %.
S’agissant de 2013, la réduction du déficit nominal à hauteur de 0, 7 point de PIB est le résultat d’un effort structurel historique – 1, 7 point de PIB –, alors que l’activité économique, encore peu dynamique, affecte le déficit à hauteur de 1 point de PIB.
La prévision de croissance pour 2013 étant très inférieure au potentiel de croissance de notre économie, le solde conjoncturel se dégrade mécaniquement de 0, 6 point en 2013 par rapport à 2012.
En outre, les élasticités très inférieures à l’unité affectent le rendement des recettes publiques de 0, 4 point de PIB supplémentaire, soit une dégradation totale d’un point de PIB liée à la conjoncture.
Je pourrais évoquer aussi le déficit structurel : en 2011, il était de 5, 1 % ; il sera en 2013 de 2, 6 % et de 1, 7 % en 2014.
La prévision de solde budgétaire de 2013 est également maintenue au niveau prévu pour 2013 dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, à moins 71, 9 milliards d’euros, soit une amélioration de plus de 15 milliards par rapport à l’exécution 2012, compte tenu de l’important ajustement opéré en 2013.
Face à la dégradation de l’activité économique en Europe, nous avons pris le parti, et nous l’assumons, de ne pas présenter de collectif budgétaire anticipé, comme l’opposition nous l’exhortait à le faire, de durcir le rythme des efforts – c’est incontestable – et d’accomplir un ajustement à marche forcée, avec des effets récessifs majeurs.
La position adoptée par l’opposition n’était d’ailleurs ni très réaliste ni compatible avec les discours que l’on peut entendre çà et là...
Permettez-moi de m’arrêter un instant sur les prévisions de recettes. Je souhaite insister sur un point : les recettes fiscales sont globalement stables par rapport aux chiffres qui vous ont été présentés en septembre dernier.
Si des mouvements de très faible ampleur ont été opérés, ils sont sans impact sur le niveau total des recettes. Celles-ci sont donc, comme indiqué lors du projet de loi de finances pour 2014, en baisse de 11 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale de 2013.
Certains représentants de l’opposition cherchent à susciter l’inquiétude sur ce résultat, mais celui-ci n’est rien d’autre que le corollaire d’une croissance moins élevée que prévu au moment de la loi de finances initiale de 2013 : nous avions prévu une croissance de 0, 8 %, elle s’élèvera à 0, 1 % ; c’est mécanique, voilà tout. Et il n’y a pas lieu de revoir davantage les recettes, comme l’ont suggéré certains membres de l’opposition.
La commission des finances, par la voix de son président, a saisi le Gouvernement d’une demande de transmission d’un rapport concernant l’exit tax. Vous connaissez la conception que se fait le ministre du budget des rapports entre le Gouvernement et le Parlement : la transparence sur l’action de l’exécutif, l’évolution des départs à l’étranger et les retours en France des contribuables français doit être totale.
C’est la raison pour laquelle le ministre du budget, qui est retenu en ce moment même devant vos collègues députés et que je remplace, a adressé hier, à destination des présidents et rapporteurs généraux des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat, un rapport sur l’évolution des départs pour l’étranger, des retours en France des contribuables, et sur celle du nombre de résidents fiscaux, qui fait la synthèse des travaux conduits par les services fiscaux de l’État.
L’étude de ce rapport, notamment des données fiscales et non fiscales, qui ont fait l’objet d’une attention méticuleuse, ne permet absolument pas d’accréditer la thèse d’un exil fiscal massif. À titre d’exemple, le nombre de nos compatriotes inscrits au registre mondial des Français établis hors de France a augmenté de 1, 1 % en 2012, soit une augmentation bien inférieure à celle de 2011, qui s’élevait à 6 %, et à l’accroissement naturel de la communauté française à l’étranger, qui a été de 4 %. Voyageant souvent hors de notre pays, je puis en attester.
Inversement, l’évolution du nombre de résidents et de non-résidents fiscaux en France, connue jusqu’en 2011, permet de vérifier que le nombre de non-résidents est stable depuis 2007 et représente environ 0, 5 % de la population totale des redevables de l’impôt sur le revenu.
En matière fiscale, le rapport dresse le bilan des départs pour l’étranger et des retours en France des redevables de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, qui ont eu lieu en 2011.
Ce bilan confirme la stabilité du nombre de départs entre 2007 et 2011, de l’ordre de 500 par an, durant toute la période, sur le périmètre comparable des redevables dont le patrimoine est supérieur à 1, 3 milliard d’euros. Les retours de contribuables, essentiellement en provenance du Royaume-Uni, des États-Unis, de Belgique et de Suisse, concernent 109 redevables, un chiffre comparable à celui de 2010, qui était de 129.
Naturellement, ces données doivent être observées avec discernement : aucune statistique ne fonde une politique. Toutefois, force est de constater qu’elles portent tout de même un coup sérieux, sinon fatal, aux discours alarmistes, outranciers et pour tout dire idéologiques que l’on entend sur cette question. Et ils ne sont pas tenus d’un seul côté de l’hémicycle ! Il n’y a donc pas lieu de s’émouvoir des chiffres que je viens d’énoncer et qui permettent de mieux comprendre cette question.
Pour ce qui concerne le financement de l’économie, outre la clôture de l’exercice budgétaire de 2013, ce projet de loi de finances rectificative poursuit les réformes qui consistent à moderniser les outils de financement de l’économie et à rendre notre État plus véloce dans la mondialisation – il en a besoin !
Je pense, notamment, à la réforme de l’assurance vie, qui repose sur deux piliers. Il s’agit, tout d’abord, de la création d’un nouveau produit « euro-croissance ».
Ces « fonds euro-croissance » permettront à un assuré de bénéficier d’une garantie du capital s’il reste investi au moins huit ans, et pourront être souscrits dans des contrats multi-supports offrant beaucoup de souplesse. Ils constitueront, à moyen terme, un outil puissant de réallocation des actifs de l’assurance vie vers les investissements les plus utiles à notre économie.
Le second pilier est une réforme du régime fiscal de la transmission des contrats d’assurance vie, pour inciter les plus gros patrimoines à contribuer davantage au financement de certains pans de l’économie. La fiscalité applicable à la transmission des plus gros patrimoines sera augmentée, et le taux du barème applicable aux grosses successions revu à la hausse, passant de 25 % à 31, 25 % pour la tranche supérieure à 700 000 euros par bénéficiaire. Néanmoins, dans le même temps, les contrats respectant certains critères d’investissement bénéficieront d’un abattement d’assiette permettant de compenser cette hausse. Il s’agit donc bien d’une incitation à modifier les comportements.
Les investissements visés sont le placement dans des actions de PME et d’entreprises intermédiaires, lesquelles sont, je le rappelle en tant que ministre du commerce extérieur, très territorialisées et productrices d’emploi ; en outre, ces PME développent des compétences à l’international à une hauteur de plus de 70 %. Ces investissements concernent également le logement social et intermédiaire, ainsi que les entreprises de l’économie sociale et solidaire, qui est pour nous, vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, une priorité.
Ce projet de loi de finances rectificative contribue pleinement à l’effort de simplification, qui mobilise l’ensemble de l’appareil d’État et des ministres et qui, à cet effet, a toute sa place dans les textes financiers. L’enjeu est connu : il s’agit de simplifier les règles, et surtout les relations avec l’administration, pour les entreprises comme pour les particuliers.
Il est ainsi prévu de simplifier les obligations déclaratives à l’impôt sur le revenu en généralisant les cas de dispense de justificatifs, d’étendre le recours obligatoire au télépaiement de la taxe sur les salaires ou de légaliser le principe de gratuité des prélèvements opérés sur l’initiative de l’administration fiscale pour le paiement des impôts.
Cette simplification des relations entre l’administration et les administrés contribuables et la création d’une relation de confiance entre l’administration et les entreprises sont décisives pour l’attractivité du pays et font partie des priorités du ministre de l’économie et des finances, Pierre Moscovici, avec lequel, pour ma part, je travaille avec la casquette « attractivité du territoire ». À ce titre, du reste, je remercie le Sénat d’avoir simplifié les procédures diverses et variées prévues par le droit des douanes en adoptant la proposition de loi présentée par M. Richard Yung.
Enfin, ce projet de loi de finances rectificative poursuit la réforme de nos financements à l’exportation, à laquelle je tiens et qui avait été commencée dans la loi de finances rectificative pour 2012. C’était un engagement du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi présenté, pris par le Premier ministre en novembre de l’année dernière.
Ainsi, nous poursuivons la diminution du coût des crédits exports en améliorant la garantie de refinancement octroyée par la Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur, la COFACE. Un dispositif d’intervention publique est également créé pour pallier les carences des marchés de la part des assureurs privés pour les exportations de court terme. Cette mesure sera au bénéfice du commerce courant, donc de nos PME et de nos entreprises intermédiaires. Comme vous l’avez souhaité, monsieur le rapporteur général, le Parlement sera destinataire de l’évaluation annuelle de ce dispositif.
Par ailleurs, et c’est très important, nous renforçons notre accompagnement du secteur naval, et pas seulement à l’ouest de la France.