Intervention de Bariza Khiari

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 18 décembre 2013 : 1ère réunion
Encadrement des conditions de la vente à distance des livres — Examen du rapport et du texte de la commission, amendement 1

Photo de Bariza KhiariBariza Khiari, rapporteure :

Le rapport insiste sur la modernisation que les libraires doivent réaliser.

Mme Primas s'interrogeait sur la « cannibalisation » du marché du livre par Amazon : en effet, les librairies réalisaient 30 % des ventes de livres en 2003 et seulement 24 % en 2011. Dans le même temps, le nombre de livres vendus et le nombre de lecteurs n'ont pas augmenté. Amazon gagne donc des parts de marché aux dépens des librairies physiques. En revanche, Amazon n'est pas particulièrement facteur de vulgarisation de la lecture : on constate que le site est très utilisé à Paris, où la densité de librairies est la plus forte, par des catégories socio-professionnelles aisées et déjà lectrices. Sa performance économique est aussi liée aux avantages fiscaux dont elle bénéficie. Je partage vos critiques sur les conditions de travail des salariés d'Amazon. Je mentionne dans mon rapport un ouvrage intitulé En Amazonie : infiltré dans « le meilleur des mondes », écrit par un journaliste qui s'est fait embaucher comme intérimaire dans un entrepôt. Il y témoigne des cadences infernales et du climat social détestable dans l'entreprise. Les emplois amazoniens sont bien différents des emplois en librairies, qui sont dix-huit fois plus nombreux.

La remise en cause des acquis législatifs est constante. Nous avons bien résisté pour l'instant aux attaques contre le prix unique. Le principe en a été à plusieurs reprises conforté par les autorités européennes. D'autres pays ont d'ailleurs adopté un dispositif similaire. Il reste le fil conducteur de notre politique depuis 1981. Nous discuterons plus largement du financement des industries culturelles face aux géants d'Internet au moment de l'examen du projet de loi sur la création, qui devrait être adopté par le Conseil des ministres en février prochain.

La présente proposition de loi représente l'effort maximum que nous pouvons consentir en faveur des libraires en agissant sur la loi de 1981. En effet, Amazon achète du cubage, ce qui lui permet de négocier de faibles coûts de livraison auprès des logisticiens. Pour ce site de vente en ligne, le livre est un produit d'appel, qui présente de nombreux avantages : pas de tailles ou coloris différents, un emballage facile, des retours inexistants. Pour le prix des frais de port qu'elle offre, l'entreprise constitue un fichier de clients qui lui coûterait bien plus cher si elle devait l'acheter. Les clients sont « profilés ». J'en ai fait l'expérience : j'ai acheté un livre sur le site, depuis lors, je reçois sans cesse des propositions culturelles.

Il nous faudra agir sur la fiscalité. Notre apport ici est limité, je le répète, mais psychologiquement puissant. Madame Mélot, pour la commande en librairie, la loi de 1981 laisse au libraire la possibilité de choisir de facturer ou non la livraison.

Je vous remercie de votre soutien à l'amendement et au texte. Nous partageons tous la volonté de sauver les librairies.

L'amendement n° COM-1 est adopté.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

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