Intervention de Marie-Noëlle Lienemann

Réunion du 9 janvier 2014 à 10h00
Débat sur les négociations commerciales transatlantiques

Photo de Marie-Noëlle LienemannMarie-Noëlle Lienemann :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je veux d'abord remercier le groupe socialiste d’avoir pris l’initiative de demander un débat sur ce grand sujet qu’est le projet de traité transatlantique.

Je dois à la franchise de dire d’emblée que je suis personnellement très hostile à la conclusion d’un tel partenariat dans les conditions actuelles et au regard des évolutions passées en matière de libre-échange.

Pour autant, dès lors que la négociation est engagée, je vous interrogerai, madame la ministre, sur des éléments clés de cet accord. Notre collègue Bernadette Bourzai a évoqué des points de vigilance ; pour ma part, je parlerai plutôt de verrous, que la France doit être capable soit de lever, soit de fermer.

Si je ne suis pas favorable à ce traité, c’est parce que, comme on dit dans mon village, « chat échaudé craint l’eau froide ».

Pour être engagée depuis longtemps dans les débats portant sur ces questions, en particulier à l’échelon européen, j’ai l’habitude des promesses mirifiques sur les bénéfices devant résulter de la généralisation du libre-échange, censée régler nos problèmes de chômage, créer de la prospérité partagée entre les nations et permettre d’améliorer notre standard social. Force est de constater que cette mondialisation heureuse n’a pas eu lieu, parce qu’il s’agit en fait d’instaurer le libre-échange sans limites, sans règles, sans contraintes, où les firmes multinationales disposent d’une autonomie de décision et d’un pouvoir que les États ou les groupements d’États ne sont guère en mesure de réguler.

On nous promet que la signature du traité transatlantique permettra 0, 5 % de croissance supplémentaire. Ces grandes promesses m’inspirent les quelques observations suivantes.

D'abord, les modèles économétriques qui les fondent sont très contestés par toute une série d’économistes. Surtout, ils sont invalidés par les enseignements du passé. Je vous renvoie à cet égard à l’Acte unique européen, dont la mise en œuvre devait déboucher sur la création de 20 millions d’emplois et le plein emploi à l’horizon 2015 : c’était du bidon ! De même, pour ce qui concerne l’ALENA, on avait annoncé des créations d’emplois aux travailleurs américains, mais les travaux de chercheurs et de l’AFL-CIO, instance qui regroupe les organisations syndicales américaines, font apparaître qu’il y a eu, au contraire, des destructions d’emplois et, surtout, un dumping social conduisant à un affaiblissement des normes sociales et du niveau des salaires dans les pays concernés.

Je ne vois pas par quel miracle il en irait autrement aujourd'hui, car toutes les évolutions actuelles vont dans le même sens ! Par parenthèse, on nous annonce un hypothétique gain de croissance de 0, 5 % pour l’Europe : si l’on mettait en œuvre, plutôt qu’une nouvelle étape d’une dérégulation globale, une politique concertée de relance européenne par la consommation intérieure et l’engagement de grands travaux, il est clair que le surcroît de croissance serait nettement supérieur !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion