L'action de groupe et le registre national des crédits aux particuliers sont les deux dispositions phares de la partie du projet de loi que j'ai en charge. Le dispositif concernant la première avait été sensiblement ajusté en première lecture par le Sénat, à mon initiative comme à celle de Nicole Bonnefoy, rapporteure pour avis de la commission des lois. Nous avions adopté en commission dix-huit amendements, dont certains précisaient la procédure de médiation, et surtout un amendement, que je vous avais proposé, précisant et encadrant les conditions d'engagement d'une action de groupe simplifiée. En séance publique, dix amendements de la commission des lois avaient été adoptés, dont certains contre l'avis du Gouvernement. Notre Haute assemblée avait modifié la procédure d'action de groupe en matière de concurrence en autorisant l'engagement d'une action de groupe avant que la décision de l'autorité de la concurrence soit devenue définitive.
En deuxième lecture, les députés ont sensiblement ajusté le dispositif, adoptant une quinzaine d'amendements en commission ou en séance publique. Ils ont maintenu plusieurs ajouts du Sénat, notamment pour ce qui concerne la médiation ; ils ont poursuivi l'amélioration de la procédure en matière de concurrence, dans le même esprit que nous, en permettant au juge de prononcer la responsabilité du professionnel sur le fondement d'une décision d'une autorité de la concurrence non définitive si les recours ne portent pas sur l'établissement des manquements ; ils sont néanmoins revenus sur certains ajouts du Sénat. Les députés ont notamment rétabli leur rédaction du dispositif de l'action de groupe simplifiée, sans tenir compte de nos remarques formulées en première lecture. Outre deux amendements de précision, je vous proposerai de rétablir notre dispositif, sous réserve d'un ajustement prenant en compte une critique du rapporteur de l'Assemblée nationale. Ce dispositif me paraît plus précis et plus sûr juridiquement que celui adopté par les députés.
En ce qui concerne le chapitre V du projet de loi, le volet du texte consacré au rééquilibrage des forces entre les entreprises comprend les principales dispositions restant en discussion. A l'article 61, traitant du renforcement des sanctions en matière de délais de paiement, le Sénat avait supprimé le régime dérogatoire introduit par les députés en faveur des factures récapitulatives, en particulier pour l'achat de matériaux de construction. Nous avions estimé qu'une telle mesure pénaliserait les fournisseurs de matériaux de construction, au profit des promoteurs immobiliers. Or les fournisseurs sont souvent des petites et moyennes entreprises, qui devraient trouver des financements complémentaires pour faire face à des besoins accrus de trésorerie, ce qui n'est pas facile quand l'accès au crédit a été considérablement durci.
Je vous invite également à supprimer le nouveau régime dérogatoire en matière de délais de paiement. Il affranchit les entreprises de négoce spécialisées dans la grande exportation hors de l'Union européenne de la contrainte du délai maximum de règlement pour les biens achetés en franchise de TVA, sans toutefois que le délai librement fixé avec le créancier soit abusif à son égard. Une telle disposition contredit l'objectif de réduction globale des délais de paiement et de respect de la loi de modernisation de l'économie (LME). Ses effets risqueraient de se révéler dévastateurs pour un certain nombre de nos petites et moyennes entreprises. Quelques onze milliards d'euros sont dus par les grands donneurs d'ordres aux PME au titre des retards de paiement. Les dispositions prises par les députés enverraient un signal désastreux aux PME, qui sont venues nous en avertir.
En matière de régulation des relations de sous-traitance, je suggère à la commission de réintroduire, en la réaménageant, la disposition adoptée par le Sénat en première lecture, mais supprimée par un amendement de la rapporteure de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale en deuxième lecture. La nécessité d'imposer la conclusion de conventions dans les relations de sous-traitance doit être réaffirmée. L'amendement que je vous soumettrai précise le dispositif pour répondre aux objections qui ont été formulées. L'amélioration et l'encadrement des relations de sous-traitance est fondamentale pour la compétitivité de notre économie. Dans le prolongement des préconisations du rapport Gallois et de celui sur les délais de paiement que j'ai remis au Gouvernement, il me paraît essentiel de contribuer sans plus attendre à pacifier les relations de sous-traitance de production, ce qui passe par un dispositif de contrats ou de conventions-types.
S'agissant des relations entre fournisseurs et distributeurs, l'article 62 du projet traduit l'intention de préserver les principaux équilibres de la LME, qui semblent garantir les intérêts de toutes les parties. Encore fallait-il renforcer le formalisme contractuel sur lequel la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) exerce sa vigilance et tenir compte de la volatilité du prix des matières premières. Les députés ont adopté une dizaine d'amendements, par lesquels ils ont précisé la notion de convention unique ainsi que son contenu, et supprimé les dispositions introduites par le Sénat relatives aux nouveaux instruments promotionnels (NIP), avant de décider finalement de les réintroduire dans la convention unique lors du débat en séance publique. Je vous présenterai un amendement d'équilibre qui vise à sortir les NIP du champ de la convention unique, tout en donnant une définition et un cadre juridiques à cette pratique extrêmement répandue, surtout dans les grandes surfaces, mais dont aucune mention n'est faite dans notre législation commerciale. Les députés ont ensuite prévu que les renégociations de prix, en fonction de la volatilité des matières premières, s'effectuent dans le respect du secret des affaires comme des secrets de fabrication existants. Enfin, à l'initiative du président François Brottes, un amendement dit de courtoisie instaure, pour le distributeur, une obligation de répondre dans un délai de deux mois au fournisseur qui estime qu'un accord a été remis en cause. A défaut de réponse, le fournisseur a la possibilité de signaler la situation à la DGCCRF. Je défendrai un amendement de suppression de ce dispositif dont l'intention est parfaitement compréhensible, mais dont la portée juridique est insuffisante et dont la mise en oeuvre paraît difficile.
Je vous soumettrai d'autres propositions de correction au texte adopté par les députés à l'article 62. Il s'agit d'abord de préserver la possibilité d'une remise globale concernant les autres obligations auxquelles s'engage le distributeur à l'égard de son fournisseur afin de contrecarrer le retour au ligne à ligne, tout en prévoyant que cette rémunération globale ne soit pas disproportionnée par rapport à la valeur de ces services. Un second amendement introduit la notion d'abus dans la disposition qui interdit la pratique des garanties de marge. Enfin, deux autres amendements de précision suppriment des redondances.
Le dispositif adopté par le Sénat sur les jeux en ligne a été globalement maintenu, malgré l'adoption d'amendements de précision.
J'espère que, comme en première lecture, notre Haute assemblée adoptera ce texte important.