Il est intéressant qu'une institution aussi noble que le Sénat prête attention à de dangereux réfractaires... L'objet de l'association Robin des Toits est d'identifier et de faire connaître les conséquences sur la population de l'action d'un groupe technologique, celui de la téléphonie mobile. Au sein de cette association, je suis chargé de l'information scientifique.
Les opérateurs se considèrent comme au-dessus des textes règlementaires ou légaux du pays où ils exercent leur activité. Leur désinvolture intégrale est encouragée par l'absence totale de sanction face à leurs comportements illégaux. Les riverains ont l'impression d'être en face d'un secteur intouchable.
Mon premier souhait pour apporter un réconfort à la population serait que les gouvernants prennent deux décisions de principe. Il existe un accord, plusieurs fois modifié, entre l'Association des maires de France et les représentants des opérateurs. Ce texte d'intention n'a pas de caractère contraignant. Pour autant il conviendrait de rendre pleinement obligatoire l'une des dispositions de cet accord : l'organisation d'une réunion d'information de la population avant l'installation ou la modification d'installation d'émetteurs électromagnétiques. En cas de manquement à cette obligation, l'installation devrait être mise hors service ou démontée. Pour qu'une telle réunion soit efficace, elle ne doit pas se limiter aux notables ; son accès doit être ouvert à l'ensemble de la population et les riverains doivent pouvoir y être assistés par des personnes compétentes. Elle devra en outre être annoncée publiquement suffisamment à l'avance et préparée matériellement (taille de la salle, micros...).
Une telle décision modifierait considérablement l'ambiance générale. Aujourd'hui, l'image publique des opérateurs est de plus en plus négative, voire catastrophique : la grande majorité de la population les considèrent comme des hors-la-loi qui bénéficient de la protection de la plupart des organismes de l'Etat.
D'un point de vue technique, les opérateurs, qui se sentent mal venus à peu près partout à peu près tout le temps, augmentent les modalités de clandestinité de leur activité. Il est très difficile d'obtenir des résultats et des précisions. Or les informations qui définissent les principales caractéristiques techniques des émetteurs permettent à la population de mesurer les intensités des émissions techniques auxquelles elle est soumise.
Les émissions de ce groupe technologique ont une unité générale de structure physique. Grâce à celle-ci, on peut évaluer les risques des émissions pour la santé, car leur toxicité est pratiquement avérée. Trois formes d'informations définissent la teneur de ces risques. Il s'agit d'abord d'identifier le nombre d'émetteurs, qu'ils s'agissent d'antennes-relais ou autres, et leur bande de fréquence, c'est-à-dire le nombre de vibrations par seconde, exprimée en hertz. Les bandes de fréquence ont en effet un niveau d'effet variable sur les organismes vivants. Certaines antennes-relais n'ont qu'une seule fréquence d'émission, d'autres deux ou trois. Il est nécessaire d'avoir une information réelle et complète sur les fréquences.
Le deuxième type d'information concerne la puissance des émetteurs. Elle est parfois donnée sous une forme incompréhensible. Elle doit être fournie en watts, de façon complète et pas seulement normative. En effet, si leurs chevaux réels correspondaient à leur puissance fiscale, les automobiles n'iraient ni très vite, ni très loin : les chiffres normatifs ne définissent pas une puissance réelle. Dans la téléphonie mobile, lorsque les émetteurs fonctionnent avec gains, c'est-à-dire au maximum de leurs possibilités, leur puissance varie de 30 à 40 watts si l'on en croit les opérateurs qui parlent en puissance normative, soit l'équivalent de 1 600 à 1 800 watts en puissance réelle.
Nous demandons enfin que les opérateurs communiquent le rayon de cellule, c'est-à-dire la zone couverte par chaque antenne relais. Ces trois informations cruciales suffisent à déterminer quelle est la situation technique et quelles sont les protections que peut demander la population.
Ces propositions rétabliraient une confiance entre les décideurs et la population, dont les craintes sont désormais fondées sur des documents officiels. Pas moins de 3 000 travaux scientifiques internationaux ont étudié les effets sur la santé de ces émissions. Ils établissent un lien avec certaines pathologies et certaines perturbations. Le Gouvernement n'en tient pas compte. Un rapport de synthèse du groupe Bioinitiative, composé de douze experts internationaux indépendants a synthétisé ces différentes études en classant les effets sanitaires des champs électromagnétiques en fonction des pathologies provoquées. Leur travail est reconnu. Ceux qui contestent la toxicité de ces champs sont souvent en situation de conflit d'intérêts et leur parcours professionnel fait planer un doute sur leur indépendance.
Ces risques commencent à faire l'objet d'une certaine reconnaissance officielle, même si ce n'est pas encore le cas en France. Dans sa résolution 1815, votée à la quasi-unanimité, le Conseil de l'Europe, s'appuyant sur le rapport Bioinitiative, reconnaît les risques pour la santé et demande aux gouvernements européens de modifier leur réglementation pour fixer la valeur limite d'exposition (VLE) à 0,6 volt par mètre. L'Organisation mondiale de la santé a classé la téléphonie mobile dans le groupe 2B, qui comprend les activités potentiellement cancérigènes pour l'homme. En Italie, enfin, la Cour Suprême a jugé sans ambiguïté que la téléphonie mobile était source de cancer.
Lors d'une émission de télévision, le responsable d'un opérateur de téléphonie mobile belge a invité les jeunes consommateurs à la prudence. Les journalistes ont ensuite découvert que le patron de cette compagnie utilisait exclusivement depuis trois ans un téléphone filaire et que tout réseau wifi avait été supprimé au siège de cet opérateur.
Les effets biologiques de la téléphonie mobile ne sont plus de l'ordre de la rumeur, ils sont confirmés par des sources de plus en plus nombreuses. Les citoyens ont raison de demander des informations précises avant les installations. Les plus importantes doivent être totalement publiques.