Intervention de Pierre Hérisson

Réunion du 3 décembre 2004 à 9h30
Loi de finances pour 2005 — Industrie

Photo de Pierre HérissonPierre Hérisson, rapporteur pour avis :

Monsieur le ministre, il m'apparaît indispensable de relever le prix du timbre. Cela faciliterait la modernisation de La Poste pendant le peu de temps qui nous sépare de l'ouverture à la concurrence.

Nous sommes toujours en décalage avec la poste allemande, principale poste européenne. Outre-Rhin, le prix du timbre est de 54 centimes. Dans ce domaine-là, malgré l'effort de redressement et de réajustement que nous avons opéré - de 46 centimes, ce prix est passé à 50 centimes - nous avons encore beaucoup à faire. Nous serions bien avisés d'avoir un tarif unique dans le cadre d'un accord ou, tout du moins, d'un alignement franco-allemand.

A mon sens, le contrat de performances et de convergences 2003-2007, signé le 13 janvier 2004, peut faire de La Poste une entreprise performante sur le plan commercial et capable d'assurer ses missions de service public.

Je me félicite déjà que trois chantiers soient engagés.

Grâce à 3, 4 milliards d'euros d'investissement autorisés dans le cadre du contrat de plan, la chaîne de traitement du courrier est en cours de modernisation, afin que neuf lettres sur dix - et non pas sept comme en 2003 - soient distribuées le lendemain.

L''accord de juillet dernier a abouti à la mise en place d'une relation contractuelle exigeante entre la presse et La Poste, laquelle assumera une charge diminuée de 40 millions d'euros.

Enfin, je salue la modernisation du dialogue social, même si j'avoue m'interroger sur l'impact financier de l'accord majoritaire signé le 3 novembre 2004 dans le secteur du courrier, secteur difficile à gérer dans la mesure où la concurrence se fera, au-delà du critère financier, avec le courrier électronique et les nouvelles technologies.

Malgré ces avancées, La Poste doit encore lever de lourdes hypothèques pour atteindre ses ambitions.

D'abord, créer un établissement de crédit postal : j'invite le Gouvernement à en accélérer les prémices législatives.

Ensuite, poursuivre le travail de désamorçage de la bombe à retardement que représentent les retraites. De toute façon, il y a matière à discussion. La Poste doit savoir, de manière transparente, ce qui restera à sa charge et ce qui sera assumé par la collectivité ou par d'autres. Sur les 300 000 agents de La Poste, 200 000 sont des fonctionnaires. Ce sujet doit être traité avec beaucoup de sérieux.

Enfin, assurer l'indispensable évolution du réseau sans diminuer le nombre de point de contacts. Sur ce point qui nous tient à coeur, je poserai deux exigences.

D'une part, il faut cesser de mettre les maires devant le fait accompli et travailler ensemble à l'organisation de la grande entreprise postale dont j'ai parlé tout à l'heure.

D'autre part, il faut construire un financement pour compenser la mission d'aménagement du territoire de La Poste. Cette mission doit être examinée indépendamment de l'organisation et du fonctionnement de l'entreprise. Comment La Poste est-elle aidée, y compris sur le plan financier, pour remplir cette mission en regard de ses obligations de service universel ?

La loi prévoit, certes, une exonération de 80 % de la taxe professionnelle à cet effet. Mais est-ce une situation durable compte tenu des exigences bruxelloises dans ce domaine ?

Venons-en au secteur des télécommunications. Le haut débit a explosé et comptera 6 millions d'abonnés à la fin de l'année 2004, plaçant la France au deuxième rang en Europe. Les services se sont enrichis, les offres « triple play » - téléphone, Internet et télévision - sont apparues. Et tout cela à la faveur du dégroupage de la boucle locale.

Cet effort doit être poursuivi et les dispositions doivent être transparentes entre l'opérateur historique et les opérateurs alternatifs.

La diffusion territoriale du haut débit est aussi en bonne voie grâce à la course de vitesse engagée par France Télécom, qui promet une couverture de 96 % de la population fin 2005, avec ses concurrents privés, voire publics. Les collectivités territoriales peuvent maintenant, grâce au fameux article L. 1425-du code des collectivités territoriales, devenir des opérateurs. J'ai eu l'occasion de rappeler qu'il fallait utiliser cet outil avec les précautions d'usage, compte tenu de la rapidité avec laquelle les technologies évoluent. Ne nous retrouvons pas avec un deuxième « plan câble » ! Nous n'avons pas besoin de cela.

La téléphonie mobile s'est encore diffusée. Elle compte 42, 9 millions de clients, soit un taux de pénétration moyen de 71, 1 %. L'UMTS, enfin lancé, devrait couvrir 58 % de la population fin 2005. La couverture en GSM devrait, pour sa part, être parachevée fin 2007. Sa finalisation sera à la charge des seuls opérateurs mobiles grâce aux conditions que le Gouvernement leur a imposées lors du renouvellement de leurs licences.

Je regrette toutefois la trop grande lenteur du déploiement. Il faudra absolument l'accélérer et bien surveiller que les opérateurs ayant bénéficié des licences respectent leurs engagements, particulièrement en termes de calendrier.

Je dirai un mot maintenant sur l'opérateur historique. Il a su dégager en 2003 un résultat net positif de 3, 2 milliards d'euros et ramener sa dette à 48 milliards d'euros. Ce montant reste considérable, même s'il est moins important que les 77 milliards d'euros que nous avons connus.

France Télécom a suivi en 2004 une judicieuse stratégie d'intégration en rachetant Orange et Wanadoo. L'entreprise a été privatisée le 2 septembre dernier. Parallèlement à cette privatisation, la fourniture du service universel a été juridiquement et financièrement assurée. Monsieur le ministre, je crois que nous vous devons beaucoup sur ce point.

Je conclurai en évoquant l'action du régulateur. Je souhaite qu'elle se concentre sur trois sujets : la téléphonie mobile via les opérateurs virtuels et la portabilité des numéros, le prix des terminaisons d'appel fixe vers mobiles - je me félicite de sa baisse progressive bien qu'il y ait là encore beaucoup à faire - et le marché de détail du haut débit. Il doit être, comme le dit la loi de 1996, à un prix « abordable », et nous n'y sommes pas tout à fait.

L'objectif essentiel de la régulation est d'assurer, au bénéfice du consommateur, la pérennité de la concurrence, donc son émergence, mais aussi la qualité du service et une couverture fiable du territoire.

Au terme de ces remarques, je vous indique que la commission des affaires économiques a donné un avis favorable sur le budget pour 2005 des postes et télécommunications.

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