Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au cours de la dernière décennie, l'insertion de la France dans les échanges internationaux s'est caractérisée par un solde commercial excédentaire et en forte hausse. Mais, en 2003, le solde commercial français a accusé un net recul : il s'est réduit de 4 milliards d'euros. Et, sur les neuf premiers mois de 2004, la France a même enregistré un déficit de 3, 3 milliards d'euros.
On invoquera l'atonie de la demande mondiale, bien sûr, la faible croissance européenne, ainsi que l'appréciation de l'euro face au dollar, qui a effectivement fait perdre à nos exportateurs une partie des gains de compétitivité acquis dans la seconde moitié des années quatre-vingt-dix.
Face à cette perte de compétitivité, et pour soutenir les exportations, quelle action le Gouvernement a-t-il entrepris ?
Depuis deux ans, monsieur le ministre, vous avez redynamisé la politique de soutien public à l'export.
Tout d'abord, vous avez pris soin d'orienter notre dispositif dans une visée stratégique : nous échangeons insuffisamment avec les zones en forte croissance et, si rien n'était fait, la part de marché de la France dans le commerce mondial serait ramenée de 5, 1 % en 2003 à 4, 6 % en 2012. Comment la France pourrait-elle continuer à exporter autant en Autriche qu'en Chine, et seulement deux fois plus en Inde qu'à Malte ?
Vingt-cinq pays ont donc été identifiés comme cibles, en fonction de la taille de leur marché, de leur dynamisme et de l'insuffisante présence française, et ce, sans occulter nos priorités diplomatiques ; je pense au Maghreb. Pour chacun de ces pays, un plan d'action commerciale a été finalisé.
Au niveau sectoriel, la France n'est pas si mal placée, mais elle reste trop absente sur les secteurs les plus dynamiques. C'est pourquoi vous avez entrepris d'élaborer des plans d'action sectoriels pour développer nos exportations de produits de haute technologie et à fort contenu en innovation.
En complément, le Gouvernement entend donner un nouveau souffle au dispositif de soutien à nos entreprises exportatrices. Il s'agit de conforter les 110 000 PME exportatrices - dont la moitié sont occasionnelles -, mais aussi d'amener à l'export, d'ici à cinq ans, 50 000 nouvelles PME, ce qui rapprocherait la performance de la France de celle de ses voisins allemands et italiens.
Monsieur le ministre, vous avez déjà fait beaucoup : l'Agence UbiFrance est devenue le guichet national unique d'information et de promotion, le nombre de salons professionnels à l'étranger a déjà doublé et celui des volontaires internationaux en entreprise, les VIE, s'accroît sensiblement.
Vous avez dynamisé divers partenariats, notamment avec les conseillers du commerce extérieur, ou avec des réseaux bancaires, pour diffuser auprès des PME les produits publics d'accompagnement à l'export.
Enfin, à la suite du rapport de M. Paul-Henry Ravier, le Gouvernement compte mieux adapter aux besoins des entreprises, notamment petites, les garanties financières que l'Etat propose pour maîtriser les risques liés à l'internationalisation.
Surtout, avec l'appui du Président de la République, vous nous proposez deux mesures importantes pour soutenir l'emploi tourné vers l'export.
La première concerne un crédit d'impôt associé à tout recrutement de salarié pour la fonction export, dont le Sénat a opportunément porté le montant à 40 000 euros par entreprise et à 80 000 euros pour un groupement d'entreprises.
La seconde consiste en la création d'un nouveau contrat-export afin d'inciter les entreprises à recruter des cadres à l'exportation pour des durées limitées inconnues à l'avance. Nous l'examinerons attentivement.
Je conclurai en évoquant deux pistes prometteuses : d'une part, les expérimentations à venir en région qu'autorise la loi de décentralisation d'août dernier, qui offrent l'occasion de faire converger nos actions de soutien à l'export et de les rendre plus lisibles pour les entreprises ; d'autre part, l'éventuelle refonte du financement de la protection sociale, assis aujourd'hui sur les cotisations sociales et demain, peut-être, sur une TVA de compétitivité, comme l'a suggéré notre commission dans son récent rapport sur les délocalisations.
La TVA de compétitivité frapperait aussi bien les biens importés que les biens nationaux, qui gagneraient ainsi en compétitivité relative. En outre, les biens que nos entreprises exportent n'auraient pas à supporter cette taxe et se trouveraient donc plus compétitifs sur les marchés mondiaux. Je me réjouis que sa mise à l'étude ait été annoncée par Nicolas Sarkozy, voilà quelques jours.
Le projet de budget qui nous est soumis, à hauteur de 423, 44 millions d'euros, permettra de servir l'ambitieuse politique que vous menez, monsieur le ministre. J'insiste sur la juste contrepartie de cet effort : le réseau de la direction des relations économiques extérieures, la DREE, ne doit pas subir de régulation budgétaire.
Je dirai un mot, enfin, de la présentation du prochain budget : son éclatement en cinq missions différentes n'est pas sans m'inquiéter s'agissant de la visibilité de votre action, mais je regrette surtout qu'aucun indicateur ne soit envisagé pour mesurer l'efficacité économique de l'action menée. Pourquoi ne pas continuer à mesurer, par exemple, l'effet de levier économique de l'assurance prospection en rapportant les exportations aux indemnités ? Cela permettrait de visualiser l'efficacité d'un tel outil pour l'accroissement des exportations des PME.
Car tel est bien pour moi, monsieur le ministre, l'enjeu de ce budget, sur lequel la commission des affaires économiques et du Plan a donné un avis favorable.