Intervention de Jean-Marie Bockel

Réunion du 5 février 2014 à 14h30
Débat sur les violences sexuelles faites aux femmes du fait des conflits armés

Photo de Jean-Marie BockelJean-Marie Bockel :

La fin de l’impunité reste un but à atteindre et, le plus souvent, la communauté internationale se trouve incapable d’agir.

Pour conclure, j’évoquerai quatre aspects sur lesquels nous devons, selon moi, concentrer notre action.

Premièrement, il faut accroître la prévention. La société civile a joué un rôle crucial pour porter le débat au sein de la communauté internationale, tout en agissant localement dans des conditions difficiles aux côtés des victimes de violences sexuelles. Les moyens des ONG et associations devraient donc être confortés, en mettant particulièrement l’accent sur les programmes d’éducation à l’égalité entre hommes et femmes.

Deuxièmement, il faut renforcer la protection. L’ONU devrait prendre des mesures pour permettre aux missions de maintien de la paix, dans le respect de leur mandat, de protéger les femmes contre toutes formes de violence, de faciliter le travail de la justice, d’identifier et d’évacuer les victimes lorsque de tels actes surviennent. L’octroi du statut de réfugié pour des motifs humanitaires aux femmes victimes de violences pendant un conflit devrait être systématisé.

Troisièmement, il faut développer l’assistance. L’un des éléments les plus fondamentaux consiste à restaurer la dignité des femmes victimes, car elles ont souvent un sentiment de honte et de culpabilité après de telles agressions. Au-delà de l’aide d’urgence, les services de soutien devraient inclure les besoins plus complexes et à plus long terme des victimes et de leur famille : soins médicaux, soutien psycho-social, logement, assistance juridique, services liés à l’emploi, etc. La déclaration du G8 de Londres sur la prévention des violences sexuelles en 2013 s’inscrivait dans cette démarche, mais quid des mesures concrètes ?

Quatrièmement, il faut intensifier les poursuites. Afin que la victime ne porte plus le stigmate du crime qu’elle a subi, il faut en finir avec l’impunité. Les gouvernements nationaux portent la responsabilité première de poursuivre et de punir les responsables de ces crimes. Pourquoi ne pas utiliser de nouveaux outils, comme les institutions de la francophonie, pour sensibiliser les États à la nécessité de sanctionner les auteurs de ces violences, via un renforcement de leur système judiciaire ? Sur ce point, je rejoins la suggestion de notre collègue Brigitte Gonthier-Maurin.

En définitive, nous sommes face à un paradoxe. Malgré un engagement de la communauté internationale et une montée en puissance normative, les violences sexuelles perdurent dans les zones de guerre. Ce sentiment d’impuissance appelle une réponse globale, qui nécessite volonté politique, ressources adéquates et engagement concerté et durable des multiples acteurs.

Il est urgent d’agir, car, pour reprendre les mots de Ban Ki-moon, les « conséquences [de ces violences faites aux femmes] dépassent de loin ce qui est visible et immédiat ». C’est finalement un véritable enjeu de civilisation...

Le débat qui a lieu aujourd'hui doit contribuer à accélérer la prise de conscience dans notre pays. La France est présente sur les théâtres de conflits et ne reste pas égoïstement repliée sur elle-même. Sa tradition la conduit, plus que d’autres pays peut-être, à se sentir concernée par ce qui se passe sur la scène internationale. En tant que pays des droits de l’homme, c'est-à-dire aussi des droits de la femme, elle a une responsabilité particulière.

Le plaidoyer vibrant et convaincant de notre collègue qui m’a précédé à cette tribune et le travail de Mme la présidente de la délégation sont une contribution remarquable à cette démarche. Nous devons tous apporter, modestement, mais avec beaucoup de force et de conviction, notre pierre à l’édifice. Madame la ministre, je vous remercie de nous y encourager. §

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