Nous veillons à assurer une certaine liquidité des titres dans les rachats que nous effectuons.
Nous nous efforçons d'être innovants tout en garantissant la sécurité des émissions. Des émissions à 5 ou 10 ans sont parfaitement normales pour la France, et l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne procèdent d'ailleurs à des émissions de même maturité. Mais en fonction de la demande nous n'hésitons pas à émettre des titres de maturité plus longue. En 2013, nous avons émis 4,5 milliards d'euros d'obligations à échéance 2045, et en janvier dernier, 1,8 milliard d'euros d'obligations à maturité 2060. La durée de vie moyenne de la dette négociable française, qui s'élève à 7 ans, est relativement élevée en Europe. Cette durée n'est réellement plus longue qu'au Royaume-Uni, du fait de son système de fonds de pension qui investissent à très long terme.
S'agissant des scénarios de taux d'intérêt, nous établissons des prévisions une fois par an en même temps que nous préparons le projet de loi de finances initiale. Ces données sont annexées aux projets annuels de performances publiés fin septembre. Selon les années, des mises à jour sont possibles, notamment dans le cadre des lois de finances rectificatives. Pour 2014, le scénario retenu envisage une hausse progressive des taux à long terme, soit un taux moyen à 10 ans de 3,3 %. Le taux d'intérêt annuel moyen à 3 mois s'élèverait, pour sa part, à 0,34 %. Nous tenons également compte des hypothèses d'inflation, lesquelles sont évaluées à 1,3 % pour la France et 1,6 % en Europe dans la loi de finances pour 2014.
Vous m'avez interrogé sur les raisons pour lesquelles la charge de la dette en 2013 avait été inférieure aux prévisions d'environ 1,9 milliard d'euros. D'une part, la charge de la dette sur les titres indexés a été moindre que prévu à hauteur de 1,3 milliard d'euros. D'autre part, la baisse à deux reprises des taux d'intérêt à court terme par la BCE a entraîné une plus faible charge de la dette de 700 millions d'euros.
Peut-on aujourd'hui estimer que le niveau des taux d'intérêt permettra de réaliser des économies par rapport au montant de la charge de la dette de 46,7 milliards d'euros inscrit dans la loi de finances pour 2014 ? Je ne suis pas en capacité de le dire aujourd'hui. L'an dernier les déclarations du président de la Fed ont suffi à entraîner une forte volatilité des taux à 10 ans. La prévision de la loi de finances pour 2014 est prudente, mais il est trop tôt pour savoir si les dépenses effectives seront inférieures aux estimations initiales.
La charge de la dette augmente entre 2013 et 2014, puisqu'elle passe de 44,9 à 46,7 milliards d'euros, soit une hausse d'environ 1,8 milliard d'euros. Plusieurs facteurs jouent en sens contraire. Il y a d'abord un effet « volume » : l'encours augmente, ce qui génère une augmentation d'environ 1 milliard d'euros. Par ailleurs, la prévision de remontée de l'inflation joue également dans le sens d'un alourdissement de la charge de la dette, d'environ 1 milliard d'euros également. En sens inverse, cependant, dans la mesure où la dette s'amortit au bout de sept ans environ, les opérations de refinancement de coupons anciens, émis il y a environ six ou sept ans à des taux plus élevés - autour de 4,5 %, qui est le taux moyen sur la période comprise entre 1997 et 2007 - permettent une réduction de la charge budgétaire, puisque nous les remplaçons par des coupons à des taux plus avantageux, autour de 2 %. Ainsi, il y a des mouvements à la hausse, qui sont en partie amortis par des évolutions à la baisse.
S'agissant des émissions de dette indexée sur l'inflation, le stock est stable entre 10 % et 11 % ; nous émettons chaque année environ 10 % de dette sous cette forme. Les raisons qui ont conduit le Gouvernement français à lancer cette forme de dette sont de deux ordres. Il s'agit tout d'abord d'optimiser la charge de la dette par rapport au cycle économique. D'après nos modèles économiques, l'émission de 10 % de dette indexée sur l'inflation donne le meilleur rapport possible pour prendre en compte les évolutions du cycle économique. Par exemple, en 2013, la moindre inflation associée à la faible croissance économique permet de réduire la charge de la dette. Il s'agit, par ailleurs, de diversifier la détention des titres en attirant des investisseurs qui cherchent précisément à se protéger contre l'inflation.
Pour ces émissions, il existe deux types de coupons, qui représentent chacun environ la moitié de nos émissions indexées : le premier est indexé sur l'inflation française et le second, dont le volume est légèrement plus important aujourd'hui, est indexé sur l'inflation dans la zone euro. Sans surprise, le premier type est plutôt détenu par des investisseurs français et le second type, plutôt par des investisseurs étrangers.
La plupart des grands émetteurs souverains ont le même type de stratégie : c'est le cas des États-Unis (autour de 10 % des émissions), de l'Italie (entre 8 et 10 % des émissions) ou encore de l'Allemagne, qui est entrée plus récemment sur ce marché et pour qui ces bons ne représentent qu'entre 5 et 8 % des émissions. Le Royaume-Uni est très présent sur ce segment, avec environ 20 % de ses émissions.
S'agissant du profil des détenteurs de la dette française, nous avons connu historiquement deux grandes vagues de diversification. Avant l'euro, la dette française était détenue à 85 % par des investisseurs français, notamment des assureurs. À la fin des années 1990, avec l'introduction de l'euro, nous n'étions plus le seul émetteur souverain dans la monnaie en question, ce qui a conduit à une première diversification des investisseurs en provenance d'autres pays de la zone euro ; les investisseurs européens ont mutuellement diversifié leur portefeuille de dette. Ensuite, dans les années 2000, le développement des économies émergentes a entraîné, dans ces pays, la constitution d'importantes réserves de change qu'ils ont voulu investir dans les titres les plus sûrs, dont ceux du Trésor français.
Ainsi, depuis 2008, la dette est détenue à environ 64 % par des investisseurs étrangers.
S'agissant des obligations assimilables du Trésor (OAT), dont la maturité est plus longue, les investisseurs français en détiennent 43 % ; au sein de ces 43 %, 22 % est détenue par des assureurs et 13 % par les établissements de crédit.
Au total, il y a donc une importante diversification, ce qui est pour nous un objectif important.