Dans ce domaine, les choses sont en train de changer. On peut espérer que, avec du matériel moderne, propre et confortable, il soit possible de proposer une solution de remplacement crédible aux usagers devant faire face à des fermetures de lignes ferroviaires. La rationalisation du transport ferroviaire par ces temps de vaches très maigres et de deniers publics de moins en moins abondants s’impose donc.
Je rappelle que l’ensemble des contributions publiques, de la part de l’État et des collectivités locales, représentait plus de 12, 5 milliards d’euros en 2011, c’est-à-dire plus de la moitié du coût total du système. Ce chiffre nous interpelle, d’autant que des pays très développés sont dotés d’un système ferroviaire de qualité fonctionnant sans aucune aide publique. La comparaison avec eux ne peut nous laisser indifférents.
Pis encore, la dette de Réseau ferré de France, RFF, devrait atteindre 33, 8 milliards d’euros à la fin de 2103, alors qu’elle n’était que de 31, 5 milliards d’euros à la fin de 2012, soit il y a un an.
D’un côté, des investissements importants ; de l’autre, des recettes en baisse de 30 millions d’euros en 2013 : tout cela empêche de dégager les moyens suffisants pour financer la rénovation du réseau. Or cette dernière est nécessaire, comme chacun s’accorde à le reconnaître.
Structurellement, il manque environ 1, 5 milliard d’euros pour financer les 2, 5 milliards d’euros d’investissements de rénovation. Ce besoin de financement accroît chaque année la dette de RFF, qui par ailleurs enregistre une diminution continue du volume de circulation. D’où une trajectoire potentiellement explosive de la dette du système ferroviaire, estimée aux environs de 55 milliards d’euros en 2020. Or il est impossible de répercuter sur le voyageur le financement de cette situation : cela reviendrait à faire exploser les tarifs !
On pourrait conclure de la lecture de ces chiffres qu’il s’agit du prix à payer pour un service qui soit de qualité et, surtout, qui corresponde à la demande de nos concitoyens. Malheureusement, tel n’est pas le cas. Les usagers, au-delà des grèves à répétition, se heurtent à des dysfonctionnements majeurs, dus, notamment, à l’obsolescence des infrastructures, au vieillissement du matériel, à la saturation de certaines lignes, voire à une information des passagers indigne d’un XXIe siècle où règnent désormais les technologies de l’information et de la communication.
Bien que l’opérateur historique ne rencontre aucune concurrence dans son domaine, l’accident de Brétigny-sur-Orge comme la dégradation du service au quotidien pour les usagers ne peuvent que confirmer la nécessité de réaliser des investissements majeurs dans ce domaine.
Il est temps de s’interroger sur le financement de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF. Nous savons que le budget de cette agence est en grande partie utilisé hors de sa vocation initiale, puisque 60 % de ses ressources actuelles sont consacrées aux dépenses de gros entretien et de régénération des réseaux, aux travaux de modernisation visant à adapter sans création de nouvelles fonctionnalités les performances des réseaux existants et au renouvellement du matériel roulant.
Monsieur le ministre, ce matin – bonne nouvelle ! – le conseil d’administration de l’AFITF a décidé de sanctuariser un budget de 110 millions d’euros pour assurer le renouvellement des trains d’équilibre du territoire, les TET. Cette décision est la bouffée d’oxygène qu’attendait l’industrie ferroviaire. Nous ne pouvons que nous en féliciter !
Concrètement, il ne reste que 800 millions d’euros à l’AFITF pour réaliser les dépenses liées aux grands projets engagés ou en études. Or cette somme, pour le moins insuffisante, ne sera plus garantie, car nous devions assister au remplacement des subventions versées par l’État – 940 millions d’euros en 2012 – par les recettes de la fameuse taxe poids lourds, dont le montant net était estimé à environ 870 millions d’euros en année pleine. La suppression ou suspension de cette taxe remet donc directement en cause les 500 millions d’euros de travaux prévus dès cette année !
Cette situation pose un vrai problème. La suspension de l’application de la taxe poids lourds due, pour reprendre les termes d’un Normand célèbre, à « l’émotion » d’une région française aura un impact direct sur les vingt et une autres régions que compte notre pays.