En tout cas, je l’en remercie aussi.
Je précise au passage que le pragmatisme n’est pas ennemi de l’ambition : il est au contraire une des conditions de la réalisation des projets engagés.
Du reste, un de mes premiers soucis a été de redonner de la soutenabilité aux projets, de rendre réalisable ce qui n’était encore que projeté et, lorsque ce n’était pas réalisable, de le dire en toute honnêteté. Car il fallait bien faire comprendre que, eu égard à l’évolution de la situation, nous ne pouvions nous en tenir aux promesses accumulées l’instant d’un débat sur une politique globale, que nous devions au contraire avoir une vision intermodale, nous projeter dans le temps, mobiliser les moyens nécessaires à la mise en œuvre d’une politique responsable.
Cher Louis Nègre, je vous remercie donc d’avoir bien voulu souligner que nous avions engagé une démarche de vérité. Elle était indispensable, car nous ne pouvions en rester au mythe des 245 milliards d’euros de projets, dont certains n’étaient même pas esquissés, et considérer que nous pouvions avancer ainsi, sans nous soucier de redonner un peu de crédibilité à la parole publique.
Cette crédibilité a pu progresser grâce à des recommandations, des préconisations, un travail partenarial durant lequel chacun a eu le droit à la parole, notamment dans le cadre de la commission Mobilité 21. Elle a également été favorisée par la possibilité d’expertiser et de donner régulièrement à la représentation nationale le temps de la discussion sur ces grands projets structurants.
Il est en effet nécessaire que les représentants de la Nation, c’est-à-dire les parlementaires, puissent, à chaque étape de la réalisation de ce schéma des infrastructures de transport, en analyser le rythme, la pertinence et les méthodes. Ces paramètres doivent être revisités régulièrement pour donner leur chance à des réalisations, sur des bases nouvelles et saines, en fonction d’un environnement économique et budgétaire en constante évolution.
C’est de cette responsabilité et de cette démarche partenariale que procédera la réussite de nos ambitions. Cette démarche est totalement transparente, réaliste, concrète, évolutive, mais elle permettra ce vrai partenariat entre l’État et les collectivités territoriales.
Celles-ci ne peuvent pas être sollicitées seulement à l’occasion d’une contractualisation, sans que l’on s’appuie sur une vision partagée de l’aménagement du territoire. Car l’aménagement du territoire les concerne toutes, et pas seulement les régions comme je l’entends parfois, même s’il est nécessaire, pour faire avancer la décentralisation, de savoir qui est responsable de quoi, quelle est l’autorité organisatrice, le chef de file. Les départements sont également concernés, de même que les intercommunalités, les métropoles, les communautés d’agglomération.
Bref, nous devons parvenir à la mobilisation des acteurs publics autour des enjeux du transport. Ce sont ces bases qui donneront de la solidité à la construction d’une politique pertinente.
Les orientations ont été claires. Vous les avez entendues, car elles ont été énoncées à plusieurs reprises par la Premier ministre.
Il faut bien reconnaître que, dans les années passées, la priorité n’a pas été donnée – et vous l’avez tous regretté, quelle que soit votre appartenance politique – au maintien à niveau des infrastructures existantes dans le domaine ferroviaire. C’est le constat qu’a établi par deux fois l’École polytechnique fédérale de Lausanne, en 2005 et 2012. Elle a noté que la modernisation des infrastructures était insuffisante ; le niveau d’entretien et de renouvellement des infrastructures existantes ne permettait même pas d’atteindre un seuil garantissant la sécurité et l’efficacité du transport. Cela explique la disparition du transport de marchandises sur certains parcours, l’absence de tout trafic sur certains tronçons, soit pour y effectuer des travaux, soit, surtout, pour éviter un accident. Hélas, nous avons néanmoins connu l’accident de Brétigny !
Avant même cet accident, fort du constat dressé par l’École polytechnique de Lausanne, j’avais demandé à RFF d’élaborer un grand plan de modernisation ferroviaire. Depuis, au-delà des 3, 2 milliards d’euros consacrés à l’entretien de ces réseaux, 2, 5 milliards d’euros ont été débloqués.
Voilà pourquoi la première des orientations est la priorité donnée à l’amélioration durable des infrastructures existantes, ferroviaires mais aussi routières.
Cela a été rappelé : aujourd’hui, 20 % de notre réseau routier est dans un état dégradé. Nous ne saurions laisser la détérioration se poursuivre.
Souvenez-vous des politiques menées naguère : elles excluaient de la contractualisation les fameux PDMI, les programmes de modernisation des itinéraires routiers.
Qu’il s’agisse des réseaux routiers, ferroviaires ou fluviaux, l’entretien des infrastructures existantes est nécessaire. L’époque est révolue où, en matière ferroviaire par exemple, la France n’entretenait que 500 kilomètres de voies quand il aurait fallu en rénover plus du double. Cette politique de rénovation sera clairement affichée dans le cadre de la contractualisation entre l’État et les collectivités territoriales, notamment les régions.
Les réseaux structurants doivent faire l’objet d’une mobilisation, ils doivent bénéficier de financements. Tous les territoires sollicitent des cofinancements pour réaliser tel équipement ou tel tronçon de voie. Gardons cependant cette réalité à l’esprit : les réseaux structurants doivent être remis à niveau. Nous commencerons par ce chantier. C’est, pour l’État, une obligation morale qu’il convient de traduire en réalités financières et matérielles.
Par ailleurs, le Premier ministre s’est engagé à assurer le renouvellement des trains Corail. Ces derniers sont fort anciens – ils ont plus de trente ans, voire trente-cinq dans certains cas. §Sur les lignes pour lesquelles l’État est autorité organisatrice des transports, aucune modernisation du matériel roulant n’a été assurée pendant des décennies !
Jean-Marc Ayrault a souhaité mettre un terme à cette situation. D’ici à 2025, tous les trains d’équilibre du territoire, les TET, seront renouvelés. Une enveloppe de 510 millions d’euros permettra de passer une première commande. L’appel d’offres est d’ores et déjà lancé. Le matériel roulant sera remplacé de manière progressive, en fonction des lignes, de leur fréquentation et des attentes des usagers, qui ont fait l’objet d’enquêtes spécifiques.
Ce soutien aux transports du quotidien est élaboré en dialogue avec les collectivités, notamment via les contrats de projets État-région pour 2014-2020. Il s’agit là d’une démarche partenariale. Jamais les collectivités n’auront été à ce point associées à cette mobilisation ! De fait, j’ai tenu à ce que tout type de mobilité fasse l’objet d’un débat dans le cadre du volet « mobilité multimodale » de la contractualisation : le fluvial, le routier, le ferroviaire et les transports urbains. Quant aux nœuds intermodaux, ils seront étudiés dans toute leur diversité.
Lors de la réunion organisée il y a deux jours sous l’autorité du Premier ministre, j’ai rappelé aux préfets les priorités opérationnelles, au nombre desquelles figure le désenclavement. Je regrette que M. Mézard, qui avait un train à prendre, justement, …