Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je vous renvoie à la lecture de mon rapport écrit pour une analyse détaillée des crédits affectés en 2005 au Plan. Je centrerai en effet mon propos sur deux observations principales.
Ma première observation porte sur l'évaluation. En effet, dans le projet de budget qui nous est soumis, l'ambiguïté relative aux crédits d'évaluation n'est pas totalement levée.
Il est vrai que le Plan se recentre, conformément aux orientations définies l'année dernière par le Premier ministre, sur une mission de prospective, la « prospective de l'Etat stratège ». Cela se traduit notamment par un déplacement de son centre de gravité de l'économique vers le politique et par un abandon de la mission d'évaluation des politiques publiques.
La réorganisation des services du Commissariat général du Plan témoigne de cette évolution. Ainsi sont mis en place des groupes de projets - j'en décris le fonctionnement dans mon rapport écrit -, qui sont régulièrement évalués afin de ne pas constituer des structures pérennes si la qualité de leurs travaux est insuffisante ou ne correspond pas aux nouvelles missions du Plan.
De même, le détachement de trois organismes, auparavant subventionnés par le Plan, explique une large part de la diminution des crédits affectés en 2005 et traduit l'évolution du rôle assigné à cette institution.
Toutefois, le présent projet de budget ne rend pas totalement compte des nouvelles orientations du Plan. En effet, des crédits sont maintenus, à hauteur de 300 000 euros, ce qui représente une baisse de 50 % par rapport à 2004.
Quelle est la vocation de ces crédits ? Ils constitueraient une espèce de « réserve », qui pourrait, le cas échéant, être utile à la future structure en charge de l'évaluation des politiques publiques.
On le voit, ce troisième projet de budget ne porte pas la marque d'un choix clair du Gouvernement.
Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous préciser la conception du Gouvernement en matière d'évaluation des politiques publiques ? Envisagez-vous de regrouper les crédits d'évaluation au profit d'une structure unique ? Si oui, laquelle ?
S'agissant des crédits en faveur de l'évaluation des contrats de plan Etat-région qui ont la particularité d'être confiés au Plan, l'examen de ce projet de budget à l'Assemblée nationale a permis d'apporter des précisions. Ainsi, les crédits dévolus à cette mission, soit 800 000 euros, ont été transférés au budget du ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
Pour autant, cette solution est-elle satisfaisante ? La commission des affaires économiques - le rapporteur pour avis, M. Jean-Paul Alduy, le confirmera dans un instant - ne le pense pas. Elle a raison ! En effet, le Gouvernement, au moment où il dispose des rapports sur l'avenir des contrats de plan Etat-région à la fois de la délégation pour la planification du Sénat et de la délégation parlementaire pour la planification de l'Assemblée nationale, est en mesure d'orienter sa position sur l'avenir des contrats de plan Etat-région. Il semble plus naturel que la délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale, la DATAR, en soit le réceptacle.
Ma seconde observation porte sur la mise en oeuvre de la LOLF, qui suscite, dans la nouvelle maquette, certaines interrogations sur le rôle du Plan et, par voie de conséquence, sur celui de l'ensemble des organismes affectés à cette fonction stratégique de l'Etat.
Ainsi, on peut s'interroger sur le choix opéré de ne pas placer, au sein de la même action « Prospective », les crédits du Commissariat général du Plan, du Conseil d'orientation des retraites, le COR, et du Conseil d'analyse économique, le CAE, contrairement à ce qui était envisagé dans la première maquette présentée en janvier 2004. Les trois instances effectuant des travaux de prospective, la proposition initiale paraissait en effet pertinente.
Le commissaire au Plan, M. Alain Etchegoyen, que j'ai interrogé à ce sujet, m'a précisé que, dans les sujets d'études qu'il choisissait, il évitait que le travail de ces trois instances ne se chevauche. En outre, ces trois organismes ne figurent plus au sein du même programme : le CAE et le COR sont rattachés au programme « Coordination du travail gouvernemental », tandis que l'action « Prospective » est rattachée au programme « Fonction publique, réforme de l'Etat et prospective ».
Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous donner les raisons qui ont conduit le Gouvernement à opérer ce choix, alors qu'il ne correspond apparemment pas à une demande du Plan et que, surtout, il apporte une confusion supplémentaire ?
Dans cette optique, on peut comprendre - M. le président de la commission des finances y a fait allusion dans le débat précédent - le mouvement d'humeur des députés qui, à l'unanimité, ont voulu supprimer les crédits du nouveau Conseil d'analyse de la société, créé récemment par le Premier ministre.
En outre, à ce stade, aucun indicateur de performance de l'action « Prospective n'est envisagé. Si cela peut témoigner d'une réelle difficulté d'appréciation des résultats de la prospective, il me paraît toutefois essentiel qu'un indicateur de performance soit défini à l'avenir. Sur ce sujet encore, monsieur le secrétaire d'Etat, j'attends votre réaction.
M. Alain Etchegoyen m'a indiqué que le Plan, dont le passé a été prestigieux, avait été un « vivier », un « tremplin » pour nombre de ses membres, l'ambition du nouveau commissaire au Plan étant d'ailleurs de rendre au Plan cette qualité, cette force d'attraction et de « propulsion ». Si la mutation est désormais bien engagée, il est encore trop tôt pour en dresser un bilan positif et dire si cette ambition sera atteinte.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances vous propose d'adopter les crédits affectés au Plan pour 2005.