Avec cet amendement, il s’agit non pas de préparer l’été prochain, mais plutôt de faire un plongeon dans l’hiver de la Seconde Guerre mondiale.
Bien avant la Seconde Guerre mondiale, les gens du voyage, qui n’étaient pas encore dénommés ainsi à l’époque, devaient déjà détenir un titre de circulation à jour, y compris les enfants, et le présenter dans chaque commune, laquelle pouvait leur refuser le stationnement.
Vous le savez, la dégradation des valeurs républicaines au cours des années trente consolida la xénophobie ambiante. Le gouvernement de Vichy s’inscrivit dans ce mouvement. Des dates dramatiques jalonnent alors le parcours des personnes appelées aujourd’hui « gens du voyage ».
Le 6 avril 1940, un décret interdit la circulation des nomades sur l’ensemble du territoire : les nomades doivent se déclarer à la gendarmerie ou au commissariat et sont astreints à résidence dans les communes du département choisies par le préfet.
Le 4 octobre 1940, le régime de Vichy autorise l’internement des « étrangers de race juive » et accède à la demande des autorités allemandes d’interner les Tziganes.
En mars 1941, des expériences de méthodes de stérilisation de masse sont lancées sur « des femmes tziganes indignes de reproduire » dans les camps de Ravensbrück et d’Auschwitz.
Le 22 juin 1941, des Tziganes sont exécutés dans des camions à gaz à Kulmhof.
Le 16 décembre 1942, un décret signé Himmler ordonne la déportation des Tziganes vers le camp d’Auschwitz.
En mars 1943, 1 700 Tziganes déportés de Bialystok sont gazés à leur arrivée et, le 25 mai, 1 000 Tziganes tchèques subiront le même funeste sort.
En 1944, l’Allemagne nazie réalise des expériences d’inoculation de la tuberculose à Neuengamme, principalement sur des Tziganes.
Par ailleurs, 1 000 Tziganes sont gazés et brûlés dans le camp d’Auschwitz.
Au total, entre 500 000 et 750 000 Tziganes sont morts, assassinés, le plus souvent gazés, par l’Allemagne hitlérienne.
En France, 30 000 Tziganes ont été internés dans des camps.
Pourtant, les Tziganes furent parmi les « oubliés » du procès de Nuremberg : de son ouverture jusqu’au verdict, le 1er octobre 1946, aucun Tzigane ne sera appelé à témoigner. Les victimes tziganes du régime nazi ne seront pas une seule fois mentionnées durant le procès de Nuremberg, et plusieurs pays européens continueront de garder ces populations dans les camps d’internement pendant plusieurs mois.
Aujourd’hui, soixante-huit ans après les premières exactions nazies, il serait grand temps que la représentation nationale française reconnaisse le génocide des Tziganes, ces gitans, ces manouches et ces Roms assassinés en raison de leur singularité, parce qu’ils étaient des « gens du voyage ».
Tel est le sens de notre amendement.