La commission des lois a toujours soutenu une seule et même position en ce qui concerne le rapport entre la loi et l’histoire : ce type de disposition ne relève pas du domaine de la loi. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 28 février 2012, a rappelé en outre qu’une telle mesure était dépourvue de portée normative.
Les auteurs de cette proposition pourraient la reprendre sous forme de résolution : depuis la révision constitutionnelle de juillet 2008, le Parlement peut y recourir pour affirmer une position sur un tel sujet.
Avant d’indiquer ma position personnelle, je veux vous remercier, mon cher collègue, d’avoir effectué ces rappels historiques.
Effectivement, il ne s’agit pas d’une déportation comme les autres. C’est un processus qui a commencé le 18 novembre 1939 par des assignations à résidence, sur décision préfectorale, de tout individu dit « dangereux » pour la défense nationale et la sécurité publique, dont les nomades.
Il s’est poursuivi, ensuite, par la signature, le 6 avril 1940, d’un décret par le Président Albert Lebrun visant à interdire la circulation des nomades, actant ainsi l’ouverture des premiers camps d’internement.
Puis, sous le régime de Vichy, des dispositions complémentaires ont été prises par la loi du 3 septembre 1940.
Le 4 octobre 1940, la puissance occupante exige par ordonnance l’internement des juifs étrangers et des Tziganes.
Le 17 novembre 1940, Vichy promulgue une loi transférant la surveillance des camps d’internement au ministère de l’intérieur par l’intermédiaire des préfets territorialement compétents.
À la Libération, le ministre de l’intérieur, Adrien Tixier, adresse, le 20 novembre 1944, aux commissaires de la République une circulaire au sujet des prostituées et des nomades internés dans laquelle il explique qu’il n’est toujours pas possible de les libérer sans enquête préalable. La circulaire est de nouveau confirmée le 25 mai 1945.
Ce n’est que le 10 mai 1946 qu’il est mis fin par une loi à l’internement des nomades, loi qui fixe également la date de cessation du conflit, ce qui, de facto, met un terme aux lois d’exception qui avaient été adoptées tout au long de l’année 1940.
Cette vérité historique doit être rappelée, elle doit être connue. Elle est, malheureusement, la conséquence d’actes officiels de la République. §Donc, la reconnaissance est acquise, puisque ce sont des actes de la République. D'ailleurs, des mesures de dédommagement sont intervenues.
Il est vrai qu’aujourd'hui cette page noire de notre histoire, notamment s’agissant de la responsabilité de la République française dans ces internements, n’est pas assez connue, mais la reconnaissance est une chose, la connaissance en est une autre. Ce qui est important pour la cohésion de notre communauté nationale aujourd'hui, c’est que chacun ait bien conscience de ces événements historiques, de la responsabilité de la République française, notamment de ceux qui, à l’époque, avaient la charge des affaires de l’État.
Mais, pour les raisons qui ont été expliquées précédemment, il s’agit de pédagogie, de connaissance historique et non d’une nouvelle reconnaissance, qui n’a pas lieu d’être aujourd'hui, puisque ce sont des faits historiques, des actes de la République. C’est la pédagogie qui doit permettre à chaque Français d’accéder à la connaissance de ces faits historiques tragiques que malheureusement rien ne peut changer.
Je remercie les auteurs de cet amendement de nous avoir permis l’utile rappel de ces événements tragiques et de la place des gens du voyage dans la communauté nationale.