Ces deux amendements répondent à des objectifs complètement opposés.
Madame Benbassa, vous proposez la suppression des dispositions répressives existant aujourd'hui dans le code pénal.
Il convient de préciser que l’article 322-4-1 ne concerne pas spécifiquement les gens du voyage – heureusement, du reste ! – et que sa suppression entraînerait donc celle de l’ensemble des poursuites prévues pour occupation illicite d’un terrain appartenant à autrui.
En outre, je rappelle que, dans sa décision du 13 mars 2003, le Conseil constitutionnel a jugé cet article conforme à la Constitution, considérant notamment que le « législateur n’a pas entaché d’erreur manifeste la conciliation qu’il lui appartenait d’opérer en l’espèce entre, d’une part, la protection de la propriété et la sauvegarde de l’ordre public et, d’autre part, l’exercice des libertés constitutionnellement protégées ». Il a également souligné « l’absence de disproportion manifeste entre les infractions et les sanctions concernées ».
Le Gouvernement n’est donc pas favorable à la dépénalisation d’une disposition qui, je le répète, ne concerne pas que les gens du voyage, d’autant que cette dépénalisation donnerait un mauvais signal aux propriétaires, privés et publics, qui subissent ces occupations illicites : elle pourrait donner l’impression que l’on autorise la continuation de telles pratiques.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 10 rectifié.
En ce qui concerne votre amendement, monsieur Lefèvre, visant à doubler les sanctions inscrites dans le code pénal, je pourrais, là aussi, renvoyer à la décision rendue par le Conseil constitutionnel sur la loi pour la sécurité intérieure : ayant eu à se prononcer sur l’adéquation entre les objectifs des poursuites et les sanctions pénales retenues par le législateur, le juge constitutionnel avait alors considéré que les dispositions de la loi étaient équilibrées. Cet équilibre me semble devoir être préservé, d’autant qu’y porter atteinte pourrait nous faire encourir la censure du Conseil constitutionnel, ce qui irait à l’encontre de votre objectif d’efficacité.
De surcroît, le faible nombre des poursuites exercées au titre de cet article, sous tous les gouvernements, montre que le doublement des peines ne permettra pas une efficacité accrue : il s’est élevé à quarante-neuf en 2008, à cinquante-huit en 2009, à quatre-vingt-douze en 2010, à quarante-cinq en 2011 et à cinquante-sept en 2012.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 3 rectifié bis.