Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 11 février 2014 à 14h30
Accueil et habitat des gens du voyage — Article 2

Alain Vidalies, ministre délégué :

Les auteurs de cet amendement considèrent qu’il ne saurait y avoir d’exception au principe selon lequel la mise en demeure de quitter les lieux ne peut intervenir en l’absence de trouble à l’ordre public.

Lorsqu’une commune respecte ses obligations en matière de schéma d’accueil des gens du voyage ou lorsqu’elle dispose d’un emplacement provisoire agréé par le préfet, ce dernier peut, à la demande du maire, du propriétaire ou du titulaire du droit d’usage du terrain, mettre en demeure les propriétaires de résidences mobiles qui stationnent irrégulièrement sur ce terrain, qu’il soit public ou privé, de quitter les lieux.

Le délai d’exécution de la mise en demeure, qui peut intervenir sans recours préalable au juge, doit être fixé dans cette mise en demeure et ne peut toutefois être inférieur à vingt-quatre heures, sous réserve de l’exercice d’un recours suspensif devant le juge administratif. Celui-ci statue alors dans le délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine.

Cette procédure administrative se substitue à la procédure judiciaire, qui constitue le droit commun. Elle vise, pour les communes qui ont satisfait à leurs obligations en matière de schéma d’accueil des gens du voyage, à accélérer sensiblement la procédure d’expulsion des occupants illicites, tout en garantissant le respect des droits fondamentaux tant des propriétaires que des gens du voyage.

Toutefois, en l’état des dispositions actuellement en vigueur, le préfet doit justifier, à l’appui de sa mise en demeure de quitter les lieux, de l’existence d’un risque de trouble à l’ordre public créé par le stationnement illicite, en tenant compte du contexte local, ce qui n’est pas toujours aisé, notamment lorsque l’occupation est récente.

Le texte initial de la proposition de loi supprimait tout encadrement de la mise en demeure ; celle-ci pouvait intervenir du seul fait de l’occupation illicite, en l’absence de conditions tenant à l’ordre public, mais également en l’absence des garanties liées à l’accueil. Elle risquait par là même d’encourir la critique du juge constitutionnel.

La nouvelle rédaction de l’article 2, issue d’un amendement déposé en commission par le rapporteur, répond à cette critique, puisqu’elle rétablit la condition d’atteinte à l’ordre public figurant dans le texte actuel et ajoute une nouvelle possibilité de mise en demeure, distincte de la première, mais soumise à la condition de la garantie d’un accueil sur une aire de stationnement située dans un rayon de trente kilomètres autour du lieu d’installation.

Il faut rappeler que les mesures de police administrative susceptibles d’affecter l’exercice des libertés constitutionnellement garanties, au nombre desquelles figure la liberté d’aller et venir, doivent en principe être justifiées par la nécessité de sauvegarder l’ordre public et proportionnées à cet objectif.

Il est toutefois possible de soutenir que l’objet de la mise en demeure est bien, dans tous les cas, la préservation de l’ordre public, troublé du seul fait d’une occupation illicite, souvent massive et durable. En ce sens, l’atteinte portée aux libertés peut être proportionnée, si une possibilité effective de stationnement existe à proximité.

Cette nouvelle possibilité d’évacuation constituerait une avancée notable pour les communes ayant satisfait à leurs obligations en termes d’accueil des gens du voyage, mais elle doit alors se combiner avec d’autres dispositions visant à les contraindre en la matière, afin de garantir l’accueil effectif des gens du voyage. À notre sens, ce type de disposition ne peut se concevoir qu’au sein d’un texte construit autour d’un équilibre rigoureusement pensé. Le Gouvernement s’en remet par conséquent à la sagesse du Sénat sur cet amendement.

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