Intervention de Josiane Mathon-Poinat

Réunion du 3 décembre 2004 à 15h30
Loi de finances pour 2005 — Fonction publique et réforme de l'état

Photo de Josiane Mathon-PoinatJosiane Mathon-Poinat :

Pensez-vous réellement, comme le rapporte cet article, que le problème que nous avons en France, c'est que les gens sont contents des services publics ?

Ce sont là des propos âpres pour un représentant de l'Etat, des propos qui ne conduisent pas à la promotion d'une fonction publique moderne, digne du passé et du présent de notre pays, digne de l'intérêt général.

En 2005, votre projet de budget devrait subir, à structure constante, une mutilation de 8 % de ses crédits. Cette baisse vertigineuse, vous la revendiquez puisque votre approche consiste à faire « fondre » l'Etat, même si, évidemment, vous habillez cette présentation d'un discours sur l'efficacité et sur la culture de la performance.

L'idée que l'on puisse « faire mieux avec moins » ne vaut que dans une logique comptable et boutiquière, dans une recherche effrénée de restriction massive de la dépense publique.

Si, comme cela doit être sa finalité, la fonction publique est le bras de l'Etat pour répondre aux besoins de nos concitoyens, pour servir le développement de notre pays, alors votre projet de budget ampute la nation, altère ses capacités et crée même un nouvel handicap.

De quoi souffre aujourd'hui notre société ? De trop de justice sociale ? De trop de services publics ? D'une redistribution trop égalitaire des richesses ?

Il me semble intéressant à cet égard de citer les chiffres que vient de publier, pour la région Rhône-Alpes, une organisation caritative connue, le Secours catholique : 500 000 personnes y vivent sous le seuil de pauvreté, parmi lesquelles certaines travaillent dans la sphère publique !

Votre budget, monsieur le ministre, concerne directement plus de 5 millions d'agents publics. Il joue même un rôle d'entraînement dans le secteur privé. La présence de services publics conditionne en effet l'implantation d'entreprises et la vie des territoires.

Sans être exhaustive, je désire souligner la suppression de 4 816 emplois dans l'enseignement scolaire, de 1 018 emplois dans la défense et de 2 210 emplois dépendant du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Comble du cynisme, vous réussissez l'exploit de supprimer 80 emplois au parent pauvre de votre gouvernement, le ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

Votre collègue M. Borloo peut toujours s'escrimer à parler de « cohésion sociale » ! La seule cohésion que nous identifions dans ce gouvernement est celle de la priorité absolue au marché et à la privatisation du service public.

Ainsi, si M. Borloo confie l'ANPE au MEDEF à travers les Maisons pour l'emploi, vous-même confiez le service téléphonique de renseignements administratifs à une société privée au nom évocateur de « Phone Marketing ». Il en coûtera 12 centimes d'euro par minute à celui que l'on ne peut plus nommer un usager, mais bel et bien un client, alors que les centres interministériels de renseignements administratif, les CIRA, qui remplissent déjà cette fonction, proposaient ce service au prix d'un appel local de neuf centimes d'euro la première minute, puis de trois centimes d'euro pour les suivantes. Mis en concurrence, les CIRA ont aligné leurs tarifs sur ceux du privé. Est-ce cela, la rationalisation ?

Enfin, levons tout malentendu sur cette notion de prime au mérite que vous souhaitez mettre en place. Avec votre discours sur la culture de la performance, vous recherchez non pas le meilleur service rendu au public, mais le moindre coût de l'action de l'Etat.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion