Je pense, comme Francis Delattre, qu'on peut effectivement se demander si les 24 milliards d'euros dédiés à la formation professionnelle sont bien utilisés, notamment en ce qui concerne les chômeurs. C'est une somme nécessaire mais considérable, qui provient d'ailleurs surtout des entreprises, et à hauteur de 4,5 milliards d'euros de l'Etat. Malheureusement, comme cela a été dit, ceux qui bénéficient le plus de la formation sont ceux qui sont déjà bien formés : est formé, on est habitué à se former, on a les moyens de se former, on a le droit de se former... et on l'utilise. Mais la priorité devrait être donnée aux demandeurs d'emploi. Vous connaissez aussi les difficultés posées par la multiplicité des organismes formateurs, et par les règles des marchés publics qui imposent de prendre non pas le mieux disant, mais le moins disant, ce qui n'implique pas forcément la meilleure formation.
L'objet de ce texte est non seulement d'appliquer l'accord passé entre le Gouvernement et les partenaires sociaux, mais aussi - je le rappelle souvent - de clarifier, de simplifier et d'économiser. Et je crois que nous avons ces éléments : on passe notamment de 147 à 46 OCTA. Prenez par exemple l'OCTA de l'Union nationale des industries de carrières et matériaux de construction (UNICEM) : c'est un petit organisme mais il a des coûts de fonctionnement, des présidents, des secrétaires etc. Le regroupement des structures permettra de véritables économies.
Quant à la somme globale consacrée à la formation professionnelle, il ne me semble pas qu'elle soit en diminution. J'ai répété que la réforme se ferait à budget constant, sans prélèvement supplémentaire, notamment sur les entreprises.
Quant à la formation des chômeurs, c'est aux régions et aux partenaires sociaux de décider vers quels publics ils veulent flécher les financements, dans le cadre du Comité régional de l'emploi et de la formation professionnelle. Mais nous sommes d'accord : il faut d'abord aller vers les chômeurs. Il y a d'ailleurs une concurrence certaine des emplois d'avenir aujourd'hui, qui permettent de former des gens autrement.
Pour répondre à Vincent Delahaye, le « fonds paritaire » est subventionné à hauteur de 28 millions d'euros par l'Etat. La taxe d'apprentissage sera toujours collectée par les OCTA, même s'ils seront moins nombreux. La part régionale ne distrait pas les fonds de leur vocation à financer l'apprentissage puisque les régions financent directement les CFA. Chaque région est d'ailleurs soumise aux demandes des CFA qui sont actuellement en difficulté.
La méthodologie de calcul du coût de la formation professionnelle sera fixée par une prochaine loi de finances : je ne peux pas répondre à la première question de Jean Germain à ce stade. Vous posez aussi la question de la collecte des fonds par une seule chambre consulaire par région : il faut d'abord rappeler que si la transformation des chambres départementales en chambres régionales a pris cinq ans, c'est aujourd'hui une réussite, qui peut en préfigurer d'autres. C'est une convention entre les trois chambres - chambre d'agriculture, chambre des métiers, chambre de commerce - qui désignera la chambre consulaire en charge de la collecte (souvent la chambre de commerce). Par ailleurs, je partage pleinement votre avis sur la nécessaire clarification des compétences et sur le maintien de l'absence de clause générale de compétence : la première des économies, c'est cela.
Enfin, sur la « gratuité » : je précise que ce n'est pas l'apprentissage qui est gratuit, mais seulement les droits d'inscription. Malheureusement, nous assistons aujourd'hui à une diminution du nombre d'apprentis, aussi bien dans les grandes entreprises que dans les petites. Cela tient pour partie au changement récent de l'ICF, mais aussi à la crise qui vide les carnets de commande, et à la décision d'avoir porté le bac professionnel à trois ans, ce qui a dissuadé certains employeurs à ne plus prendre d'apprentis pour un temps aussi long. La situation est donc préoccupante pour l'apprentissage, d'où la nécessité de pérenniser et de clarifier la ressource, et de confier son fléchage aux régions pour une plus grande efficacité.