C'est un honneur pour moi de venir vous exposer notre plan stratégique : « La Poste 2020 : conquérir l'avenir ».
L'élaboration de notre stratégie, basée sur le projet « Confiance partagée » lancé par mon prédécesseur, s'est déroulée en trois temps.
Tout d'abord, La Poste est un groupe fascinant, car il touche toutes les activités du pays. Nous avons donc écouté les attentes de toutes les parties prenantes : les actionnaires, comme la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et l'État ; les élus locaux, à travers les différentes associations comme l'Association nationale des élus de montagne (ANEM) et l'Association des maires de grandes villes de France (AMGVF) ; et les organisations syndicales. J'insiste sur les nombreuses rencontres menées avec ces dernières, car elles nous ont permis d'exposer pleinement les enjeux stratégiques, et de partager un dossier économique qui fournissait tous les éléments d'appréciation de ces enjeux. Cette concertation extensive a d'ailleurs permis la signature d'un contrat triennal tripartite 2014-2016 entre l'État, l'AMF et La Poste.
La tenue de conférences citoyennes a également permis de mieux cerner les attentes des clients du groupe.
Enfin, nous avons consulté plus de 150 000 postiers, qui nous ont fait part de leur désir d'autonomie de développement.
Ensuite, nous avons travaillé sur deux axes principaux. Le premier concerne la stabilité du modèle économique de la Poste. L'année 2013 a vu l'inflexion de celui-ci, révélant une dichotomie profonde : d'un côté, les revenus d'exploitation sont en baisse, et nous ne sommes plus capables de payer de dividende à l'État et à la CDC sans avoir recours à l'endettement ; de l'autre, grâce à l'impact du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE), les résultats nets sont en hausse. Nous nous sommes donc fixés un délai de trois ans pour revenir à un modèle économique convergent.
Le deuxième axe concerne le modèle organisationnel du groupe. Il y a trente ans, les postes étaient des administrations d'État ; elles sont aujourd'hui devenues, dans tous les pays du monde, des entreprises. Trois modèles de fonctionnement se dégagent. En Europe du Nord - Allemagne, Autriche, Scandinavie, par exemple -, la poste est devenue un opérateur purement logistique. Cela signifie qu'elle ne gère aucune activité bancaire, et qu'il n'existe presque plus de bureaux de poste.
L'Italie a choisi un modèle à l'opposé, où la poste est avant tout une compagnie d'assurance qui propose des activités bancaires et, accessoirement, s'occupe du courrier. Cette activité, coeur de métier initial, ne représente plus aujourd'hui que cinq milliards d'euros sur les vingt-cinq milliards de chiffre d'affaires.
Le modèle qu'ont choisi la France, la Suisse, la Belgique et le Japon, est un modèle intermédiaire, multi-métiers, que nous souhaitons consolider pour plusieurs raisons. Les deux premières tiennent à l'amour des Français pour leurs bureaux de poste, et à la volonté des postiers de maintenir une unité postale forte entre tous les métiers du groupe. Mais surtout, ce modèle intermédiaire permet, dans un contexte où le cadre de régulation des activités bancaires et des assurances est instable, de garder toutes les options stratégiques ouvertes, minimisant ainsi les risques pour le groupe.
Enfin, nous avons décidé de plusieurs priorités pour faire converger le modèle économique et développer l'activité de La Poste. Cette conquête de l'avenir est essentielle, car tous les métiers du groupe sont aujourd'hui ouverts à la concurrence.
Nous devrons mener à la fois une politique de développement, basée sur des acquisitions externes et le développement de nouveaux services du facteur, et une politique de réduction des coûts de fonctionnement. Cet effort est nécessaire, car l'économie de l'activité courrier est en baisse, et cette tendance s'accélère : nous sommes passés de 18 milliards de plis à 13 milliards en 2013, et nous ne serons plus qu'à 9 milliards prochainement. Ces deux politiques passent par une meilleure organisation interne.
Par ailleurs, il faut mettre le service public au coeur de notre stratégie. Pour cela, nous proposons de développer trois nouvelles missions d'intérêt public : la première porte sur la transition énergétique, la seconde sur la modernisation des administrations publiques, et la dernière sur le tiers de confiance numérique.
En outre, des discussions budgétaires sont en cours avec l'État, car l'insuffisance des compensations financières sur les missions de service public engendre aujourd'hui une perte annuelle de 500 millions d'euros pour le groupe. Il s'agit, avec la baisse drastique du volume de courrier, d'une des causes principales de la baisse des résultats d'exploitation en 2013. Nous devons absolument remédier à cette situation.
Enfin, nous avons proposé aux organisations syndicales un nouveau pacte social axé sur la formation. Les postiers vont faire face à des changements de métiers et à de nouvelles missions auxquels nous devons les préparer. C'est une condition sine qua non de la réussite de notre stratégie. Nous proposons également l'extension du domaine des contrats négociés.
Du point de vue du calendrier, nous nous donnons trois ans pour stopper l'endettement et revenir à un excédent d'exploitation positif. Les principes de la nouvelle organisation interne seront mis en place au mois de mars ; les nouvelles trajectoires financières seront précisées d'ici juin 2014, et le lancement des plans stratégiques, de développement et de réduction des coûts interviendra avant la fin de l'année.
Ce plan d'avenir dans la société numérique est un plan de développement : notre groupe a une chance immense, c'est d'être là partout, pour tous, tous les jours, et d'accompagner au quotidien des millions de personnes.
Vous pouvez être assuré de notre détermination dans l'accomplissement de ce destin collectif.