Nous nous plaignons trop de l’inflation législative, qui nous fait réformer à tour de bras des pans entiers de notre législation, pour ne pas nous féliciter de voir un texte retoucher le code de la défense, afin de n’y apporter que des modifications nécessaires.
Un texte modeste, donc, mais un sujet important.
La reconversion est tout d’abord, historiquement, une mission des armées. Celles-ci prennent à la société une partie de notre jeunesse, pour la lui rendre quelques années plus tard. Ce brassage de jeunes Français de toutes origines rappelle l’existence d’un lien historique entre les armées et leur mission sociale de reconversion de leurs soldats. Cette mission n’a pas disparu malgré la fin de la conscription.
Il y a également un lien structurel entre les armées et cette mission de reconversion. Les carrières militaires sont en effet courtes. Ainsi, 80 % des militaires n’effectuent pas l’intégralité de leur carrière dans les armées. Ces dernières ont besoin de beaucoup de jeunes soldats aptes au combat et de peu de généraux.
La question de la reconversion se pose donc dès le recrutement. Les armées savent bien qu’elles pourront d’autant mieux recruter qu’elles sauront reconvertir.
Évidemment, cette reconversion revêt une importance conjoncturelle.
Vous l’avez largement souligné, monsieur le ministre : du fait du nouveau format des armées, celles-ci se seront, en 2014, séparées de 54 000 hommes, et c’est considérable. Nous avons jugé cette réforme nécessaire : la modernisation de nos armées passe par des effectifs resserrés, mieux équipés, plus entraînés. Nous devons toutefois veiller à la cohérence globale de l’action des pouvoirs publics. Les réformes actuelles préoccupent les familles de militaires et les bassins d’emploi concernés.
S’il nous faut moderniser notre outil de défense, il nous faut aussi lutter contre le chômage dans le contexte économique défavorable que nous connaissons. D’où l’impérieuse nécessité de reconvertir au mieux les anciens militaires.
La reconversion est donc un sujet d’importance, mais aussi un sujet délicat. Il faut ici concilier les aspirations individuelles et les besoins de l’institution militaire.
Les armées ne recrutent pas pour reconvertir, les armées ne forment pas pour reconvertir ; les armées recrutent et forment les soldats pour qu’ils accomplissent au mieux les missions qui leur sont confiées, au service de la nation.
Il faut donc trouver un juste équilibre entre la nécessité de rentabiliser les efforts consentis en matière de recrutement comme en matière de formation des soldats et la nécessité de préparer ces derniers à une reconversion leur permettant d’embrasser une seconde carrière. Cela suppose de veiller à ce que les efforts faits pour ceux qui partent ne soient pas supérieurs à ceux qui sont faits pour ceux qui restent.
Le chômage des militaires a un coût croissant, vous l’avez souligné, monsieur le ministre.
Pour bien des raisons, les pouvoirs publics ont, depuis plusieurs années déjà, renforcé le dispositif d’aide à la reconversion des militaires.
Comme vous l’avez également rappelé, en 2009, le Gouvernement a restructuré son dispositif au sein d’une agence unique, l’agence de reconversion de la défense.
D’ores et déjà, et en dépit d’un contexte économique difficile, les résultats sont globalement convenables. Cependant, le taux de reclassement n’est pas tout à fait satisfaisant pour les militaires du rang puisqu’il est de 50 %. Le taux de reclassement est encore moins bon pour les militaires du rang ayant quatre ans d’ancienneté : il n’est que de 35 %.
Ces chiffres permettent de comprendre clairement que la situation des militaires du rang, plus particulièrement de ceux ayant le moins d’ancienneté, est une priorité.
Les reclassements dans la fonction publique ne sont pas tout à fait satisfaisants non plus. Comme j’avais eu l’occasion de le dire lors de l’examen du budget, il fallait s’y attendre : seulement la moitié de l’objectif a été atteinte. En effet, toutes les administrations réduisent leurs effectifs et n’accueillent donc pas nos militaires à bras ouverts. Ces reclassements dans la fonction publique sont néanmoins en nette augmentation puisque près de 2 000 militaires ont intégré la fonction publique en 2009, soit une hausse de 54, 6 % par rapport à 2008. Mais n’attachons pas plus d’importance qu’ils n’en ont à ces résultats statistiques.
Comme vous pouvez le constater, ce projet de loi comporte des dispositions très techniques et de portée limitée.
À lire certaines dispositions du projet de loi – « la prise en compte des congés maladie, dans la durée maximale du congé de reconversion à partir du quarantième jour de celui-ci »