Intervention de Marisol Touraine

Réunion du 13 février 2014 à 15h00
Assistance médicalisée pour une fin de vie digne — Renvoi à la commission d'une proposition de loi

Marisol Touraine, ministre :

Je me suis interdit toute instrumentalisation de cette affaire douloureuse, qui constitue au surplus une affaire privée, portée devant la justice. Les juges apporteront une réponse à la famille de Vincent Lambert, à lui-même et à ceux qui l’entourent, notamment aux personnels médicaux qui le prennent en charge.

Au-delà de la réponse apportée à la famille, dans la diversité de ses composantes, que nous enseigne, aujourd’hui, le cas de ce jeune homme ?

Tout d’abord, on constate que notre législation présente des lacunes, ou en tout cas des zones d’ombre qui méritent sans doute d’être éclaircies. Ensuite, on observe qu’il est essentiel de recueillir la volonté du patient : c’est l’enjeu majeur des directives anticipées. Enfin et surtout, on voit que ce cas ne reflète pas l’ensemble des situations auxquelles une réponse peut ou doit être apportée. En refusant de prendre en compte certaines réalités, nous prenons le risque de rester confrontés à l’hypocrisie.

Sur un tel sujet, chacun s’est forgé ses propres convictions, sans doute indissociables du parcours de vie qui l’a construit, des valeurs auxquelles il croit, de ses conceptions de la vie et de la mort. Pour autant, le débat ne peut s’articuler uniquement sur des conceptions, des histoires et des expériences individuelles. Il s’agit d’élaborer un cadre collectif qui soit à la fois socialement légitime et juridiquement sécurisé. Dans le cadre ainsi construit devra pouvoir s’inscrire l’expression de la volonté individuelle, en s’assurant bien entendu que c’est bien celle-ci qui s’exprime et qu’elle ne subit aucune pression.

Sur un sujet aussi sensible, la précipitation serait regrettable. C’est la raison pour laquelle le Président de la République a souhaité prendre le temps de la réflexion, de l’écoute et de la concertation.

Différentes étapes ont rythmé les débats qui se sont déroulés au cours des dix-huit mois écoulés.

Dès le mois de juillet 2012 a ainsi été confiée au professeur Sicard une mission de réflexion sur cette question, afin que toutes les opinions soient entendues, dans leur pluralité. Son rapport a été remis en décembre 2012. Le Président de la République a alors décidé de saisir le Comité consultatif national d’éthique, le CCNE, en le chargeant de se prononcer sur trois points : premièrement, les directives anticipées ; deuxièmement, les modalités et les conditions permettant à un malade conscient et autonome, atteint d’une maladie grave et incurable, d’être accompagné et assisté dans sa volonté de mettre lui-même un terme à sa vie ; troisièmement, les moyens de rendre plus dignes les derniers moments d’une personne dont les traitements ont été interrompus.

Le CCNE a rendu son avis le 1er juillet 2013. Ses conclusions ont mis en lumière toute la complexité des enjeux soulevés.

Un constat unanime a été dressé quant aux insuffisances de la loi actuelle et au trop faible recours aux soins palliatifs, malgré le déploiement dont ils ont fait l’objet ces dernières années. Par son avis, le CCNE reconnaît également que, s’ils sont fondamentaux, les soins palliatifs ne permettent pas de répondre à toutes les situations de souffrance rencontrées.

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