Intervention de Samuel-Frédéric Servière

Mission commune d'information sur l'accès aux documents administratifs — Réunion du 13 février 2014 : 1ère réunion
Audition de M. Samuel-Frédéric Servière responsable des études budgétaires et fiscales à l'ifrap

Samuel-Frédéric Servière, responsable des études budgétaires et fiscales à la fondation iFRAP, fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques :

Il paraît qu'ils circulent néanmoins parfois, en violation de la loi. Un ancien administrateur civil a même récemment pris délibérément le risque d'en publier un sur son site personnel. Il est donc possible de les rendre libérables.

Il faudrait par ailleurs réexaminer la communicabilité des données produites par les établissements publics industriels et commerciaux (Epic), qui n'est pas autorisée, au nom du secret commercial, même lorsque ces établissements étaient auparavant des établissements publics à caractère administratif (EPA). Aucune distinction n'est faite selon la nature des informations produites. Cherchant à analyser l'exécution du budget de voies navigables de France (VNF), établissement en situation de monopole, donc sans concurrence possible, nous nous sommes ainsi heurtés à un refus.

Réfléchissons aussi à l'ouverture de réseaux comme Quetelet, qui rassemble des données statistiques anonymisées aux fins de recherche scientifique, mais qui est réservé en pratique à la seule recherche publique. Pour y accéder, il faut montrer patte blanche auprès du Conseil national de l'information statistique (Cnis). Pourquoi les données, à condition bien sûr qu'elles soient d'une granularité adaptée, ne sont-elles pas accessibles à des organismes de recherche privés comme le nôtre, pour améliorer l'information citoyenne ?

Les évaluations budgétaires et fiscales sont le domaine réservé de la direction du budget et de celle de la législation fiscale, qui s'opposent parfois à la Cour des comptes. Pourquoi ne pas ouvrir le cercle des évaluations à des tiers, ce qui améliorerait le chiffrage des mesures ? D'autres modèles seraient bienvenus : de la contestation sortiront des évaluations plus précises.

Nous souhaiterions que la Cada soit dotée de compétences supplémentaires, puisse s'autosaisir et réaliser des audits de service auprès des administrations pour vérifier que le gouvernement ouvert que nous appelons de nos voeux est effectif. Elle pourrait, par exemple, vérifier que les jeux de données libérés le sont sous un format adéquat pour permettre leur réutilisation ou que le principe de redondance dans leur référencement est bien mis en oeuvre.

Elle devrait pouvoir aussi prononcer des astreintes et des injonctions : le recours à la justice administrative allonge, alourdit les procédures et les coûts. Elle serait ainsi allégée d'une partie des contentieux, qui risquent de se multiplier.

Une charte des données publiques et de leur réutilisation devrait être élaborée et respectée, posant un certain nombre de principes, dont celui de l'agenda, par lequel les administrations communiqueraient un calendrier prévisionnel de la libération des données, comme le fait déjà l'Insee, ou encore celui de la permanence des méthodes utilisées au cours du temps - il en va de la fiabilité des données publiques. Pour mesurer l'absentéisme dans les bilans sociaux, l'exploitation des données a été compliquée par l'archaïsme des méthodes employées par certaines communes pour recueillir ces données, recourant à un formulaire qui ne devrait plus avoir cours depuis 1998 ! Autre exemple : les ETPT, « équivalents temps plein travaillés » des administrations centrales ne peuvent être comparés avec des ETP, « équivalents temps plein » recensés par les collectivités territoriales et les opérateurs. L'Insee utilise encore un autre code (EQTP) ! La direction du budget a heureusement harmonisé la méthode de calcul au sein de l'Etat, mais l'inspection générale des finances, dans son rapport sur la révision générale des politiques publiques (RGPP), avait dénoncé cette incohérence statistique.

Il serait enfin intéressant de créer un site « Légilocal » pour rassembler la multitude de données produites par les collectivités territoriales. Il existe déjà des initiatives en ce sens, comme celle de la région Ile-de-France.

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