Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires économiques, mes chers collègues, le parcours législatif du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dit ALUR, touche aujourd’hui à sa fin.
Après l’adoption par le Sénat du projet de loi en deuxième lecture, le 31 janvier dernier, la commission mixte paritaire s’est réunie le 11 février à l’Assemblée nationale et a abouti à un accord entre les deux chambres.
La réussite de la CMP est l’illustration du soutien appuyé du Parlement à ce projet de loi ambitieux, qui vise à apporter des réponses à la crise du logement subie par nos concitoyens. Il le fait en instituant un dispositif d’encadrement des loyers, en créant la garantie universelle des loyers, ou GUL, en réformant les professions immobilières, en renforçant la lutte contre l’habitat indigne et contre les « marchands de sommeil », en proposant des mesures ambitieuses pour la prévention et le traitement des copropriétés dégradées, en réformant les procédures d’attribution des logements sociaux, en réformant la gouvernance d’Action logement, ou encore en modernisant des procédures d’urbanisme, point sur lequel je laisserai M. Daniel Raoul s’exprimer.
On ne peut que saluer l’engagement du Gouvernement, et votre mobilisation, madame la ministre, pour apporter des réponses appropriées sur tous les fronts à la crise du logement. J’en profite pour renouveler mes remerciements tant à votre endroit qu’à celui des collaborateurs de votre cabinet ainsi qu’aux agents de l’administration, avec qui nous avons pu travailler dans les meilleures conditions et de manière très efficace.
Pour ce qui concerne les titres Ier et II, dont j’avais la charge, je souhaite souligner que, sur 104 articles, seule une trentaine restait en discussion avant la CMP. Cela montre la large convergence de vues entre la Haute Assemblée et les députés sur ces dispositions.
Je tiens d’ailleurs à saluer le rapporteur du texte à l’Assemblée nationale, M. Daniel Goldberg, avec qui j’ai constamment dialogué tout au long de la discussion de ce projet de loi. Je pense que nos échanges ont contribué à rapprocher les points de vue et à assurer une compréhension mutuelle des positions exprimées par les députés et par la sénateurs.
S’agissant des titres Ier et II du projet de loi, la commission mixte paritaire n’a apporté que des ajustements au texte adopté par le Sénat en deuxième lecture. Elle a ainsi adopté des amendements rédactionnels, des amendements de précision ou encore des amendements de coordination avec la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.
Je souhaite relever plusieurs modifications de fond intervenues à l’occasion de la commission mixte paritaire.
À l’article 1er bis, la CMP a précisé que, pour être cotitulaires du bail, deux personnes pacsées doivent en faire la demande conjointe, précision qui répond à une préoccupation exprimée en deuxième lecture par M. René Vandierendonck, rapporteur pour avis de la commission des lois.
À l’article 4, la CMP a poursuivi l’alignement des règles applicables aux logements meublés sur celles qui sont applicables aux logements nus en matière de congé : les dispositions prévoyant une sanction pénale en cas de congé frauduleux ont ainsi été étendues aux logements meublés.
À l’article 6 ter, la CMP est revenue sur une disposition introduite par la Haute Assemblée, qui permettait de déroger au régime d’autorisation préalable au changement d’usage pour les meublés touristiques, estimant que cette disposition allait à l’encontre de la libre administration des collectivités territoriales.
À l’article 8, qui institue la garantie universelle des loyers, la CMP a précisé une disposition issue d’un amendement de Mireille Schurch et du groupe CRC, adopté par le Sénat en deuxième lecture, prévoyant que l’agence de la GUL pourrait ne pas exercer ses droits à l’égard d’un locataire en situation d’impayés. Le texte issu des travaux de la CMP permet à l’agence d’exercer uniquement une partie de ses droits, ce qui me paraît plus favorable aux locataires en situation d’impayés. Je tiens cependant à souligner que l’agence de la GUL ne sera aucunement contrainte de renoncer à exercer ses droits. Ainsi, cette disposition ne constitue pas un encouragement à ne pas payer ses loyers.
À l’article 28, la CMP a introduit une disposition issue d’un amendement que M. Jacques Mézard avait déposé en deuxième lecture et retiré à la demande du Gouvernement. Cette disposition porte sur les droits d’agir en justice des associations syndicales libres, les ASL. Après analyse approfondie, il est apparu que la proposition de M. Mézard était pertinente et permettait de répondre à une jurisprudence incertaine sur le sujet. C’est pourquoi la CMP a repris cette proposition.
Enfin, à l’article 41, la CMP a prévu que, au sein de la métropole du Grand Paris, le président de la métropole pourrait déléguer ses compétences en matière d’habitat insalubre au président du conseil de territoire.
Comme vous le voyez, mes chers collègues, les principales modifications effectuées par la CMP ne remettent en rien en cause le texte tel qu’il a été adopté par le Sénat à la fin du mois de janvier.
Au terme de l’examen du projet de loi, je souhaite souligner l’apport de la Haute Assemblée. Une fois de plus, le Sénat a fait la preuve de sa sagesse et de la qualité de ses réflexions.
Je pense bien entendu à la garantie universelle des loyers. La commission des affaires économiques, sur l’initiative de son président Daniel Raoul, a mis en place lors de la première lecture un groupe de travail sur ce sujet, jugeant que le dispositif était pour le moins perfectible.
Ce groupe de travail, dont M. Jacques Mézard était le rapporteur, était placé sous la présidence de M. Daniel Raoul. Il a travaillé dans un esprit constructif et a permis de faire converger les points de vue. Je tiens à saluer à la fois cette initiative, la qualité des propositions formulées par M. Jacques Mézard et la participation de l’ensemble des membres du groupe de travail aux travaux de ce dernier.
Ces propositions ont largement inspiré le dispositif présenté par le Gouvernement à l’Assemblée nationale en deuxième lecture : il combine une « garantie publique socle » universelle et une assurance complémentaire facultative, la « garantie socle » étant plafonnée au niveau du loyer de référence dans les zones tendues, avec un taux d’effort des locataires couverts pouvant atteindre 50 %.
Du fait des réserves constitutionnelles soulevées par Mme la ministre, il n’a pas été possible de supprimer le cautionnement et de rendre la GUL obligatoire, comme l’avait recommandé le groupe de travail. Pour autant, sur l’initiative de M. Jacques Mézard, le Sénat, à l’occasion de la deuxième lecture, a renforcé le caractère automatique de la garantie universelle des loyers.
Au terme de cette coproduction législative, l’article 8 du projet de loi met donc en place un dispositif précis et solide, qui répond à une attente et à des préoccupations exprimées depuis de nombreuses années sur toutes les travées de cet hémicycle : faciliter l’accès au parc privé en sécurisant les propriétaires.
Enfin, je ne peux que me réjouir que ce projet de loi permette d’engager une grande réforme des copropriétés, qui aura malheureusement moins fait parler d’elle que le titre IV du projet de loi. C’est peut-être parce que cette réforme, inspirée assez largement des conclusions du rapport de notre ancien collègue Dominique Braye, était consensuelle.
Madame la ministre, je tiens à saluer votre détermination sur ce sujet extrêmement important. Je me réjouis également que le projet de loi reprenne des mesures auxquelles tiennent les acteurs des copropriétés dégradées et de la lutte contre l’habitat indigne et contre les marchands de sommeil. Je pense par exemple à l’interdiction pour un copropriétaire endetté auprès de la copropriété d’acheter de nouveaux lots.
Le volet « copropriétés » du projet de loi constitue une avancée très importante, attendue par les acteurs de terrain. La création du fonds de travaux, mesure phare de ce volet, constitue ainsi une mesure essentielle pour la prévention de la dégradation des copropriétés.
Je me félicite également que le projet de loi ait permis d’avancer sur la question de l’assurance au sein des copropriétés, le Sénat ayant introduit, sur mon initiative, une obligation d’assurance pour les copropriétaires et les syndicats de copropriété. Les députés ont utilement complété cette disposition, même s’il n’a pas été possible, pour l’heure, d’aller jusqu’au bout de la réflexion sur cette question.
En conclusion, la commission des affaires économiques vous invite bien entendu, mes chers collègues, à approuver le texte issu des travaux de la CMP. Pour ce qui concerne les titres Ier et II, ce texte est largement fidèle à la position exprimée par le Sénat en deuxième lecture ; il comporte des dispositions volontaristes à même d’apporter des réponses à la crise – on pourrait même dire « aux crises » – du logement que connaissent nos concitoyens au quotidien.